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La problématique du radon en Belgique

Intervenant : Boris Dehandschutter, docteur en sciences géologiques de la VUB (Vrije Universiteit Brussel) et expert en radioactivité naturelle pour l’Agence fédérale du contrôle nucléaire.

Le radon est l’élément n°86 du tableau périodique ; c’est le plus lourd des gaz nobles. Il est incolore et inodore et provient essentiellement du sous-sol. Sa principale origine est la désintégration du radium, provenant lui-même de celle de l’uranium 238; sa demi-vie est de 3,7 jours. Sa radioactivité  fait courir des risques sanitaires: il est la 1ère cause de cancer  du poumon chez les non-fumeurs, la 2ème cause chez les fumeurs (après le tabac).

Le radon se déplace dans le sous-sol et dans les constructions où il s’accumule en cas de mauvaise ventilation. Il peut aussi y former des aérosols avec les poussières avant de se fixer sur les murs.
La concentration en gaz varie très fort au cours du temps : elle dépend de l’humidité et de la pression atmosphérique. Durant l’hiver, des taux plus élevés sont enregistrés à cause d’une aération moindre et d’une ascendance d’air (chargé en radon) du sol due aux différences de températures entre maison chauffée et sol.

Le radon circule soit par diffusion dépendant de différences de  concentration (phénomène lent et limité à de courtes distances), soit par advection dépendant des différences de pression atmosphérique (phénomène plus rapide affectant des distances plus grandes). Le gaz circule par tous les espaces accueillant canalisations ou câbles, par les chambres de visite, par les fissures dans les matériaux. De plus, certains matériaux de construction (phospho-gypses par exemple) contiennent du matériel radioactif en faible concentration.

Le lien entre radon et cancer pulmonaire a été établi dans les années ’50. En 1987, l’OMS a reconnu le gaz comme matière cancérigène.

Le plan d’action « radon » de l’UE vise à réduire le nombre de cancers pulmonaires liés à ce gaz. Dans ce but, les concentrations devraient être inférieures à 100Bq/m3 d’air. Pour y parvenir, il faut rendre les nouvelles constructions étanches au gaz, et assainir les constructions plus anciennes.

En Belgique, les  radiations ionisantes totales sont à 45% d’origine médicale, à 7,5% dues au rayonnement terrestre, à 6% dues au rayonnement du cosmos, à 35%  dues au radon. Le reste provient du rayonnement de notre corps et de l’industrie.

Sur le total des cancers pulmonaires, 7% sont dus au radon.

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Les risques sont plus élevés au sud du sillon Sambre et Meuse, particulièrement dans le Massif ardennais (plus de 400Bq/m3).En effet, les concentrations dépendent de la nature du sous-sol (les terrains anciens du sud du pays sont plus producteurs de radon que les terrains plus récents du nord). La porosité de la roche influence la circulation du gaz ; quant à la perméabilité du sol, elle favorise l’évacuation du produit vers l’atmosphère.

Le plan d’action nationale a  pour but de réduire les concentrations en radon par la prévention et la remédiation. Des campagnes de mesures ont permis la cartographie des concentrations. Un réseau d’information est destiné aux professionnels de la construction, aux autorités locales, mais aussi au grand public. La réglementation en matière de construction est adaptée aux risques, notamment pour les maisons passives. Les nouveaux bâtiments peuvent être rendus étanches au radon par des bâches plastiques installées lors des fondations. Une ventilation bien conçue permet de réduire le taux à l’intérieur des bâtiments.

radon2

Pour fin 2017, les concentrations devraient être inférieures à 300Bq/m3 dans les anciennes constructions, inférieurs à 200Bq/m3 dans les nouveaux bâtiments (normes plus sévères car la prévention  est plus facile que la remédiation). L’objectif final est fixé à 100Bq/m3 comme prévu au niveau de l’UE.

Questions :

  1. Pourquoi n’impose-t-on pas un relevé des concentrations en radon lors de la vente d’un

    immeuble ?

La Région Wallonne a prévu d’associer  ce relevé aux normes d’isolation désormais obligatoires.

Le Royaume-Uni impose déjà un tel relevé.

  1. Dans les zones à risques élevés, les frais sont-ils à charge des propriétaires ?

Une prime à la réhabilitation (pouvant atteindre 30% des frais totaux) peut être demandée à la

Région Wallonne.

  1. Que penser du chauffage par le sol en relation avec la problématique du radon ?

Ce système est à éviter car il favorise les remontées du gaz.

  1. Pourquoi utiliser une moyenne de mesures pour estimer les risques de cancer ?

Le risque est lié à l’accumulation des radiations, pas à des pics d’émissions : plus il y a de

particules alpha, plus il y a de danger.

  1. La progression du radon à travers les roches poreuses est influencée par les conditions

    météorologiques. Cela concerne-t-il d’autres gaz ?

Tous les gaz du sol sont concernés.

  1. Comment expliquez-vous les concentrations différentes en Famenne et en Ardenne alors que les

    deux régions ont un sous-sol partiellement schisteux ?

Les schistes sont d’âges différents : cambriens en Ardenne, dévoniens en Famenne.

  1. Quelle peut être l’incidence de problèmes de type Tchernobyl sur les concentrations en radon ?

Aucune. Lors de tels incidents, il n’y a pas d’émission de radon, mais d’autres gaz radioactifs.

  1. Dans des grottes, des concentrations supérieures à 10000Bq/m3 ont relevées. Comment

    expliquez- vous un tel niveau ?

Ces valeurs n’ont rien d’exceptionnel. On a déjà enregistré des concentrations de 50000Bq / m3.
Les concentrations de gaz dans les grottes sont surveillées afin d’étudier l’exposition cumulable

annuelle ( limite annuelle à ne pas dépasser).

    Rapporteur : C.Richardeau