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L’efficacité de la gestion de crise du coronavirus dépend-elle du régime politique ?

Le Président chinois, Xi Jinping, en visite mardi 10 mars 2020 à Wu Han, la ville où s’est déclaré le coronavirus en décembre 2019 et qui est toujours en quarantaine (https://www.la-croix.com/Monde/Asie-et-Oceanie/Coronavirus-A-Wuhan-Xi-Jinping-garde-crier-victoire-2020-03-11-1201083349).

 

Depuis le 11 mars dernier, l’épidémie du Covid-19 est qualifiée de « pandémie » par l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé). Les chiffres à ce jour : 6 000 morts, plus de 150 000 personnes contaminées, 120 pays affectés. Pour l’OMS, l’Europe est devenue l’épicentre de la pandémie avec la situation la plus préoccupante tandis que la Chine semble avoir contenu le coronavirus, même si le doute persiste sur la fiabilité des statistiques officielles du géant asiatique. Les autorités de Pékin n’hésitent plus à vanter les mérites de sa gouvernance autoritaire et cela d’autant plus qu’il y a du règlement de compte dans l’air. En effet, elles dénoncent les médias occidentaux, accusés d’avoir critiqué la Chine pour sa gestion de l’épidémie dans les premiers temps de la crise sanitaire. Mais les critiques ne viennent pas seulement des États-Unis, d’Europe ou d’Australie. Jeudi 12 mars, des rapports de scientifiques chinois ont été repris par les journaux de Hongkong. Selon ces travaux, le virus aurait été identifié dès le 17 novembre dans la province du Hubei, mais l’information aurait été cachée par les cadres du Parti communiste chinois. Beaucoup d’experts pensent toujours, en Chine comme en Occident, que la Chine a perdu au moins cinq semaines au moment où le coronavirus commençait son œuvre mortifère. La raison de ce retard à l’allumage serait liée à la nature même du régime chinois : « hypercentralisation de la décision politique, obsession du contrôle social, répression de la moindre espèce de dissidence, fût-elle médicale (Alain Frachon, Le Monde, 13 mars 2020). Aujourd’hui, trois mois après le début de la crise sanitaire, la visite de Xi Jinping à Wuhan a été suivie par des manifestations contre la vie chère et le manque de soutien de l’État alors que les habitants sont en quarantaine depuis deux mois. Cela n’empêche pas la presse chinoise de dénoncer la « propagande américaine » et de souligner l’efficacité du « socialisme à la chinoise » qui a permis de gagner la guerre contre le virus.

Est-ce à dire que du côté de la démocratie libérale la gestion de la crise est plus transparente et plus efficace ? On peut en douter quand on regarde du côté des États-Unis où la démocratie dans sa version « trumpienne », autrement dit un « populisme à tendance narcissique » (A. Frachon, Le Monde, 13 mars 2020), énonce d’abord des contre-vérités d’ordre climatique, puis accuse des boucs émissaires (les démocrates, l’Union européenne). Pourtant, républicains et démocrates de la Chambre des représentants se sont unis pour adopter un ensemble de mesures exceptionnelles : gratuité du dépistage, fonds fédéraux pour les frais de santé des Américains les plus modestes, accès facilité à l’assurance chômage… Au Royaume-Uni, après le choix controversé de « l’immunité collective », le gouvernement de Boris Johnson s’est décidé à prendre des mesures drastiques. En tout cas, selon Alain Frachon, éditorialiste au Monde, le Covid-19 met à mal les gouvernements, qu’ils soient autoritaires ou démocratiques.

 

Daniel Oster, 16 mars 2020