- Les Cafés Géo - https://cafe-geo.net -

Battir, Palestine – Territoire Habité

Date / Heure
19/05/2015
18:00

Emplacement
Brasserie Granvelle

Catégories


Battir, Palestine – Territoire Habité

10km² topographiés pour 5000 ans d’histoire à partager

Mardi 19 mai 2015, à 18h00, Brasserie Granvelle, 3 place Granvelle, Besançon

Situées à quelques kilomètres au Sud-Ouest de Jérusalem et 5 kilomètres à l’Ouest de Bethléem, les vallées cultivées de Battir présentent un paysage d’une rare richesse, où se côtoient les jardins en terrasses millénaires bordés de murets de pierre, les potagers, les vergers, vignes et plantations d’oliviers. Le développement de la culture en terrasse est protégé par un réseau de canaux d’irrigation conçu à l’époque antique, toujours alimenté par des sources souterraines. Un système traditionnel de distribution de l’eau est toujours en pratique pour en garantir le meilleur partage. L’eau recueillie est répartie équitablement entre 8 grandes familles du village de Battir, traversé par la ligne verte d’armistice de 1949. Ce village au paysage exceptionnel, toujours protégé mais menacé, dont les terres sont entretenues sur le même modèle depuis tant de siècles, a été inscrit en Juin 2014 au Patrimoine mondial de l’Unesco.

cafe-carto-battir

Depuis fin avril 2012, en réponse à l’invitation qui m’était faite, c’est une aventure cartographique hors norme qui se déploie et que nous partageons dans le cadre des activités de l’association des Cafés-Cartographiques. C’est à partir d’une Étude socio-anthropologique, intégrant les relevés et mesures des paysages pour l’exécution de cartes topographiques du site que tout a commencé… Cette étude a été réalisée sur place par une équipe locale entre 2007 et Novembre 2011, sous l’impulsion du projet porté alors par l’Unesco. Une collection considérable de données géographiques a été relevée et mesurée à Battir, pour être étudiée : mesure du paysage, topographie du site, dessin du système antique de distribution de l’eau, des canaux et jardins en terrasses et des murets de pierre sèche, tracés des routes, sentiers et bâtiment, etc.

Les fichiers des données topographiques transmis alors par Hassan Muamer depuis l’Écomusée de Battir, ont été partagés pour être rectifiés et développés, dès Juin 2012, à l’ENSG (École Nationale des Sciences Géographiques,  Pôle universitaire Cité Descartes, Marne-la-Vallée). Pour que cette masse précieuse d’informations puisse être valorisée, toutes ces données ont été rectifées sur l’orthophotographie du territoire, structurées et mises à jour par des élèves de l’ENSG de 2012 à 2015 dans un SIG (Système d’Information Géographique) afin de partager la connaissance que ces représentations véhiculent vers toutes les plateformes de communication (logiciels de design graphique, Google Earth, OpenStreetMap, flux de données web, etc.). La base de données géographiques ayant été structurée, il reste capital de pouvoir restituer tout usage de ce matériel (qui leur appartient) aux habitants de Battir. En effet, outre l’intérêt collectif et collaboratif de ces travaux, la richesse des thématiques abordées, leur force et l’impact de leur diffusion, il y a derrière ces cartes des enjeux moins familiers pour nous, mais essentiels pour les villageois de Battir : la menace des projets de prolongation de mur de séparation voulu par Israël qui provoqueraient des dommages irréversibles au patrimoine historique et paysager, unique pour ce qu’il apporte d’équilibre au quotidien des Villageois, menaçant dès lors toutes leurs perspectives d’avenir.

Ces outils ne suffiront probablement pas à eux seuls à résoudre miraculeusement les maux de la région. Nos démarches citoyennes peuvent néanmoins contribuer à tisser de nouveaux liens entre nos territoires, celles et ceux qui y vivent et nous-mêmes, nous tous qui les partageons. Par la découverte des paysages fantastiques, la reconnaissance de leur histoire puissante, le regard attentif et complice à l’égard des personnes qui l’ont construite… par la diffusion des connaissances, illustrée ici par la cartographie, nous ne pouvons qu’espérer contribuer à l’addition de moyens réalistes pour envisager un avenir apaisé, durable. Pour tous.

Jasmine D. Salachas est cartographe et fondatrice des Cafés-Cartographiques à Paris. Elle enseigne la cartographie à l’École Nationale des Sciences Géographiques, à l’Université paris 8, et est membre du Laboratoire Géographie-Cités (Paris 7).