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Géographie électorale, géographie du vote, géographie des élections

Une première version de ce dossier a été mise en ligne le 6 février 2012. Nous remettons en ligne ce dossier suite à la mise à jour de notre site, les articles cités en références étant à nouveau disponibles. Voici donc une seconde version – actualisée – de ce dossier sur « Géographie électorale, géographie dans les élections », avec les liens vers les articles tels que republiés sur le nouveau site des Cafés géographiques et les liens vers les nouvelles ressources du site.

L’actualité électorale était particulièrement chargée lors de la première mise en ligne de ce dossier. 2011 : les élections présidentielles de fin 2010 en Côte d’Ivoire ont dégénéré en guerre civile, replongeant le pays face à la question de sa partition[1]. La République démocratique du Congo (RDC) semble plongée dans un scénario similaire à celui de la Côte d’Ivoire, avec la proclamation de deux candidats comme présidents, qui basculent également en conflit armé[2].

2012 : les campagnes présidentielles en France, en Espagne ou encore aux Etats-Unis sont lancées. Le Sénégal connaît, de son côté, ses premières violences pré-électorales. Plus que jamais, les élections interrogent notre rapport au Monde, aux territoires du quotidien, à l’identité… Comme l’écrivait en 2007 Gilles Fumey dans la Brève de comptoir « Ciel, mon village ! Petite étude sur la “campagne” présidentielle » comparant la France mise en affiche sur les campagnes présidentielles françaises : « du Café géo à l’affiche présidentielle, où est le lien ? ».

Quelques années plus tard, la republication de ce dossier confirme combien l’actualité électorale rythme la vie des territoires. 2014 : des élections européennes et des élections provinciales en Nouvelle-Calédonie. 2015 : des élections régionales en France post-réforme territoriale et une élection présidentielle en Côte-d’Ivoire. 2016 : les très attendues élections présidentielles étatsuniennes. 2017 : des élections présidentielles en France et en Allemagne. Et tant d’autres exemples.

Depuis la première version de ce dossier, la géographie électorale s’est déployée autant dans les médias (avec l’arrivée de cartes plus précises, contestant des représentations cartographiques dont les choix montraient la France par grands aplats, à l’échelle de région, sans subtilité dans la géographie du vote) que dans des sites spécialisés de plus nombreux[3]. La géographie électorale, la géographie du vote et la géographie des élections sont, de plus, révélatrices des évolutions de la géographie et de son rôle social. « L’histoire de la carte électorale se confond avec celle de la discipline géographique, depuis qu’elle fut testée pour la première fois par André Siegfried dans son Tableau politique de la France de l’Ouest »[4].

La dimension spatiale des élections est multiple, et « la géographie électorale est bien au carrefour des mutations en cours de la discipline géographique » [5]. Le vote est à la fois un acte spatial et l’« expression territoriale des sociétés »[6]. Ainsi, les enjeux électoraux nous donnent à voir les territoires à vivre, les territoires identitaires, les territoires politiques : derrière les cartes dites « électorales », se cachent des réalités multiscalaires contrastées[7]. Les territoires électifs sont autant l’enjeu de tripatouillages et de (re)découpages que de (re)conquêtes politiques. Et sur ces questions, les géographes apportent leur contributions et tout leur savoir-faire proposant des analyses éclairant les enjeux électoraux de par le monde[8] !

Les territoires électoraux : découpages  et identités en France

En France, la question des (re)découpages des territoires électifs est particulièrement d’actualité, avec la réforme territoriale engagée par le président François Hollande qui s’inscrit dans une longue tradition d’équilibre entre découpages administratifs (qui visent à redéfinir les « meilleurs » territoires administratifs dans la gestion du territoire national) et tripatouillages électoraux, comme l’illustrent parfaitement les réflexions géographiques sur la région comme notion administrative, politique et électorale ambiguë[9]. Découper les territoires électifs n’est pas seulement un enjeu pour obtenir/conserver le pouvoir : de tels découpages s’inscrivent dans les territoires du quotidien et participent de (re)constructions identitaires locales. C’est ainsi que les Cafés géographiques ont questionné ces découpages électoraux tant à l’échelle nationale qu’à l’échelle locale.

Gérard Buono, 2010, « Le redécoupage électoral du Tarn : quels enjeux identitaires et géopolitiques ? », Cafés géographiques, rubrique Des Cafés, compte-rendu du café géographique du 9 novembre 2010.

Gérard Buono, 2010, « Le redécoupage électoral du Tarn : quels enjeux identitaires et géopolitiques ? », Cafés géographiques, rubrique Des Cafés, compte-rendu du café géographique du 9 novembre 2010.

Pour aller plus loin : les découpages territoriaux en France

La géographie des candidats et par les candidats : la géographie dans les élections

La géographie des élections questionne également les stratégies spatiales des candidats : comment les discours politiques s’inscrivent-ils dans les territoires et dessinent-ils une géographie du vote différenciée ? Par-delà le cas des « fiefs électoraux » liés au parcours personnel des candidats, les campagnes électorales révèlent comment les candidats, les partis politiques et plus généralement les détenteurs du pouvoir perçoivent les territoires, à l’échelle nationale pour les élections présidentielles comme à l’échelle régionale et locale pour d’autres élections.

Pour aller plus loin : la géographie du politique

La géographie électorale, décrypteur des enjeux politiques, sociaux et spatiaux

Si la géographie électorale permet, à différentes échelles, de comprendre périodiquement des rapports de force politiques majeurs à l’échelle d’un territoire local, régional ou national, elle permet aussi de révéler des sentiments de relégation, de ségrégation, d’exclusion tels qu’ils s’expriment dans l’abstention ou dans les votes extrêmes, à des échelles extrêmement fines comme celle du bureau de vote. L’habiter repose sur des perçus, des vécus et des émotions qui se reflètent dans les votes majoritaires à des échelles locales. Dans cette perspective, la géographie des votes est un puissant décrypteur des sociétés.

Frédéric Leriche, 2008, « Les Etats-Unis : une nouvelle géographie électorale ? », Cafés géographiques, rubrique Des Cafés, compte-rendu du café géographique du 29 octobre 2008.

Frédéric Leriche, 2008, « Les Etats-Unis : une nouvelle géographie électorale ? », Cafés géographiques, rubrique Des Cafés, compte-rendu du café géographique du 29 octobre 2008.

Pour aller plus loin : la géographie du politique

Bénédicte Tratnjek

[1] Voir, à ce propos, le compte-rendu du café géographique « Le nouveau “miracle” ivoirien : un coup d’état ? » avec Jean-Louis Chaléard, et le compte-rendu de lecture de l’ouvrage Géopolitique de la Côte d’Ivoire de Christian Bouquet.

[2] Voir, à ce propos, les comptes-rendus des cafés géographiques « Le Congo (RDC) et la poudrière du Kivu : géopolitique d’une périphérie à haut risque » avec Roland Pourtier, « La guerre en RDC : l’Afrique centrale en crise » [mise en ligne à venir] avec Jean-Claude Mashini et Hugo Mwanza.

[3] On recommandera tout particulièrement :

Voir une sélection de sites plus complète sur le blog Géographie de la ville en guerre.

[4] Bussi, Michel, 2012, « La carte électorale : miroir de la démocratie ? », EchoGéo, n°20, avril/juin 2012, en ligne : https://echogeo.revues.org/13042

[5] Bussi, Michel, 1998, Éléments de géographie électorale. À travers l’exemple de la France de l’Ouest, Publications de l’Université de Rouen, collection Nouvelles donnes en géographie, Rouen, p. 19.

[6] Bussi, Michel, 1998, Éléments de géographie électorale. À travers l’exemple de la France de l’Ouest, Publications de l’Université de Rouen, collection Nouvelles donnes en géographie, Rouen, p. 19.

[7] Voir la brève de comptoir de Gilles Fumey : « Carton rouge pour les cartes électorales » et l’analyse de Frédéric Leriche des différentes cartes produites sur les élections présidentielles étatsuniennes de 2007 : « Les Etats-Unis : une nouvelle géographie électorale ? ».

[8] Pour aller plus loin sur la géographie électorale, la géographie du vote et la géographie des élections, voir le journal de curation « Géographie des élections » qui recense les ressources accessibles en ligne qui traitent de la dimension spatiale des élections et du vote : http://www.scoop.it/t/geographie-des-elections

[9] Parmi les nombreux travaux de géographes, on conseillera tout particulièrement :

On renvoie tout particulièrement le lecteur aux bibliographies de ces articles, qui indiquent de nombreuses ressources sur le concept de région en géographie (notamment les travaux d’Armand Frémont).

Sur le site des Cafés géographiques : Frédéric Giraut, 2015, « La réforme territoriale, y a-t-il un territoire idéal ? », Cafés géographiques, rubrique Des Cafés, compte-rendu du café géographique d’Annecy du 2 avril 2015, par Marion Lévis et François Duclos.