Dans ma salle de classe, quelle géographie !
Représenter l’espace de la classe
Dossier proposé à l’occasion de l’exposition Change ta classe ! (14 février / 18 mars 2013, Cité de l’architecture & du Patrimoine, Paris) qui présente les travaux de neuf classes marocaines, tunisiennes et béninoises « dont l’objectif est d’une part de transformer la classe en espace de création et d’autre part de sortir de la typologie des lieux scolaires en proposant un réel espace de qualité : pour la lecture, l’écriture, les arts plastiques… ».
En 1936, Pierre George signe un article sur « Les premiers éléments de la géographie par l’expérience »[1] dans le tout premier numéro de L’Information géographique : le ton est donné pour cette revue qui publie depuis 1936 sur l’approche pédagogique de la géographie : « l’enseignement de la géographie seul nous intéresse »[2]. Pierre George consacre ainsi aux résultats proposés par Miss Sanders aux conférences d’Oxford pour « constituer dès les premières années scolaires une “expérience géographique” qui permette aux élèves d’utiliser ultérieurement, en connaissance de cause, les matériaux qui seront mis entre leurs mains, cartes, croquis, diagrammes, etc. et qui leur fournisse une réserve de points de comparaison éminemment expressifs pour eux »[3]. Appel entendu par de nombreux enseignants, dont la synergie a fait émerger de beaux manuels scolaires tels que le Géographie à vivre[4] pour le CM2. En tout premier lieu de cette « expérience géographique » comme préparation à l’enseignement de notre discipline : la salle de classe. Référent spatial pour les élèves, la salle de classe n’a depuis pas démérité, et entre par la grande porte dans les programmes scolaires !« Les salles de classe comptent parmi les rares locaux dont chacun d’entre nous a une expérience personnelle, et leur arrangement peut sembler d’une évidence si familière qu’on serait tenté de le croire universel et intemporel »[5]. L’espace de l’élève participe de la compréhension du rôle et du fonctionnement de la géographie comme discipline scolaire. Mais, derrière la porte, quelle(s) géographie(s) pour et dans la salle de classe ?
La salle de classe, un lieu d’enfermement ?
La salle de classe est un espace où se construit l’idée de la Nation. Gilles Fumey nous avertit : « ces lieux sanctuarisés depuis Jules Ferry ont reproduit des lieux d’enfermement mis en place à l’époque moderne pour les malades (hôpitaux), les criminels (prison) et, sur le modèle des couvents, les enfants (qu’on voulait soustraire aux parents jugés piètres éducateurs) »[6]. Le mur est un élément de la salle de classe qui revient régulièrement dans le débat. Le mur, un dispositif spatial contradictoire : il protège autant qu’il sépare.Contradictoire donc, et ce, depuis le film Entre les murs(pour lequel Bertrand Pleven propose un pas si étonnant rapprochement avec Gomorra[7]) jusqu’au nom du blog C’est au pied du mur… de Mila Saint Anne, enseignante en histoire-géographie, qui, « tombée par hasard dans une salle de classe un beau matin de novembre 1985, […] n’a jamais réussi à retrouver la porte de sortie »[8].
La porte, autre élément du décor de la salle de classe, fait sens dans l’imaginaire et les pratiques spatiales des élèves. Pour les uns, la porte de la salle de classe constitue le seuil vers un lieu du savoir. Pour d’autres, c’est l’ennui, la défiance envers ce savoir, l’enfermement : « à l’entrée, on pénètre dans la cage ; à la sortie, on est chassé du chaos »[9]. Et Pierre Gentelle de continuer, sous la plume de Cassandre, confrontant son expérience géographique de la salle de classe en inadéquation avec le « savoir » qu’on lui proposait (imposait ?) : « en attendant, ces manières de nous expliquer le monde étaient en contradiction flagrante avec ce qu’on voyait, mais on n’avait pas les moyens de contester. On en a gardé une grande méfiance pour les rapports entre théorie et expérience »[10].Rappelons combien l’appel de Pierre George de considérer « l’espace proche » dans l’enseignement de la géographie est longtemps resté en marge des programmes scolaires. Et la géographie, aujourd’hui encore, reste souvent un savoir perçu par les élèves comme du « par cœur ».
Mais la salle de classe, perçue par certains (beaucoup ?) élèves comme un lieu d’enfermement, est aussi, pour ces mêmes enfants/adolescents, un lieu d’évasion. Face à l’ennui, l’imaginaire prend toute sa place au cœur de la salle de classe, au grand dam des enseignants. Si les espaces virtuels, notamment par toutes les applications qui existent aujourd’hui sur la téléphonie mobile, sont devenus des espaces où l’ennui s’affiche (regardez le nombre de tweets[11] en live de cours de géographie !), l’évasion a toujours fait partie de la salle de classe.Plongeant vers des mondes imaginaires, l’élève « sort » de la salle de classe. Celle-ci devient le lieu d’une cospatialité, entre espace physique (celui de la leçon) et espace imaginaire (celui de la rêverie). Si les librairies ou les rayons de géographie sont remplis d’ouvrages dédiésau voyage et à l’évasion, la salle de classe n’est pas perçue comme un espace pouvant être dédié à la rêverie. Cette dernière est le fait du « cancre », de celui qui ne semble pas vouloir apprendre, comme si la géographie scolaire et la géographie de l’imaginaire ne pouvaient avoir leur place dans le même lieu.
Pourtant, aujourd’hui, « avec les smartphones, une bonne part de la “contrainte” spatiale disparaît comme le montrent les discussions d’après cours où il est peu question des contenus ni même des professeurs »[12]. L’espace de l’école est un élément à part entière dans les pratiques et les imaginaires spatiaux des élèves : leur (im)mobilité (selon les rythmes scolaires, mais aussi les choix pédagogiques) et leur (non-)attention dans la salle de classe s’inscrivent dans la salle de classe comme espace habité.
Les textes des Cafés géographiques :
– Pierre Gentelle, 2008, « L’école, ça peut rendre fou », Les Cafés géographiques, rubrique « Lettres de Cassandre », n°82, 12 octobre 2008.
– Bertrand Pleven, 2008, « Entre les murs (Laurent Cantet), Gomorra (Matteo Garrone) », Les Cafés géographiques, rubrique « Des films », 31 octobre 2008.
Pour aller plus loin :
– Elisabeth Deliry-Antheaume, 2001, « Murs des écoles, école des murs en Afrique du Sud. Les institutions éducatives vues du dehors », Autrepart, n°17, pp. 167-182.
– Anne Sgard et André-Frédéric Hoyaux, 2006, « L’élève et son lycée : De l’espace scolaire aux constructions des territoires lycéens », L’Information géographique, vol. 70, n°3/2006, pp. 87-108.
– Mila Saint Anne, 2010, « Où est-ce que j’ai rangé mes élèves ? », blog C’est au pied du mur…, 7 août 2010.
– Gilles Fumey, 2012, « Désanctuarisons la salle de classe ! », blog geographica.net, 4 septembre 2012.
– Gilles Fumey, 2012, « Comment les élèves sont des acteurs géographes ? », Le Café pédagogique, 23 septembre 2012.
La salle de classe : espace aménagé, espace à ménager ?
Désormais, la question de la salle de classe comme espace habité et pratiqué fait partie intégrante des programmes dans l’enseignement primaire et secondaire, et les enseignants sont nombreux à échanger, sur Internet, leurs pratiques didactiques et pédagogiques sur la salle de classe : comment organiser ma salle de classe pour en faire un lieu pédagogique, un lieu de travail, un lieu de savoir, un lieu d’apprentissage ? Comment enseigner la salle de classe comme espace proche et expérience spatiale ?Parce que la salle de classe est un espace aménagé, mais aussi « une ressource pour et dans l’action à l’échelle de la classe »[13]. Des « codes » dans l’organisation du mobilier scolaire traversent les temps et les espaces. En 1911, dans le Nouveau dictionnaire de pédagogie et d’instruction primaire[14], « le Buisson », les auteurs rappellent le rôle et l’histoire de la salle de classe, du mobilier scolaire et de l’architecture scolaire, qui sont autant d’espaces auxquels sont quotidiennement confrontés les élèves (et leurs enseignants !) et qui « formatent » leur imaginaire spatial.
L’architecture scolaire, elle-même, est au cœur de la production de l’école-bâtiment comme un espace ordonné, et l’école-territoire comme un espace de l’ordre, de la hiérarchie, d’une société réglementée. Parce que « les écoles sont les symboles des conceptions éducatives de leur temps »[15], l’espace de l’école comme lieu d’apprentissage évolue en fonction des pédagogies. Si en France, l’école-bâtiment est l’outil de l’Etat comme aménageur, « les concours d’architectures scolaires sont nombreux en Suisse alémanique depuis les années 1990. En 2003, on compta, à Zurich, 221 projets pour cinq nouvelles constructions »[16]. Pourtant, de part et d’autre de la frontière, le même constat sur l’inadéquation entre l’école-bâtiment et l’école-lieu d’apprentissage est souligné : de Gilles Fumey qui propose de désanctuariser l’école-bâtiment en France[17] à Simone Forster qui constate qu’en Suisse alémanique, les projets d’architectes pour l’école sont caractérisés par « leur absence de vision »[18], c’est bien l’imaginaire spatial des aménageurs (privés ou publics) qui est remis en cause. « Les architectes sculptent les espaces intérieurs, multiplient les puits de lumière et font un grand usage des couleurs. Ils témoignent d’une grande virtuosité artistique mais ne saisissent guère l’évolution du monde de l’école. Ils se réfèrent à une vision traditionnelle, soit celle d’une enfilade de classes avec, parfois, des espaces de travail dans les corridors »[19].
Cette enfilade qui fait frémir Mila Saint Anne, qui, dans le blog C’est au pied du mur…, nous invite à taper « salle de classe » dans Google Images[20]. Image après image, le même constat : la salle de classe est un espace ordonné, où les élèves sont « rangés » (en rang dans les couloirs pour attendre d’entrer en classe, assis sur des bureaux en rang dans la salle de classe). La salle de classe répondrait-elle d’un aménagement hygiéniste, où les grandes artères haussmanniennes (les « couloirs » entre les tables des élèves) n’ont pas que des objectifs sanitaires (éviter la contagion du rhume ou la profusion des poux), mais avant tout des fins sécuritaires (contrôler tout débordement) ? La salle de classe est aussi un espace de contrôle.Entre les murs de la salle de classe comme dans tout lieu d’apprentissage, c’est aussi l’apprentissage du conformisme qui est dénoncé, parfois même par les « premiers de la classe ».
« Coxsackie-Athens High School Valedictory Speech 2010 »
Voir le texte d’Erica Goldson lors de son discours de major de promotion.
Les ressources des Cafés géographiques :
– Gilles Fumey, 2008, « “Entre les murs”, mais quels murs ? », Les Cafés géographiques, rubrique Brèves de comptoir, 1er décembre 2008.
Pour aller plus loin sur la salle de classe :
– Marie-Claude Derouet-Besson, 1998, Les murs de l’école. Éléments de réflexion sur l’espace scolaire, Editions Métaillé, Paris, 305 p.
– Jean-François Marcel, 1999, « Espace et action enseignante. Eléments pour une chorématique de la salle de classe », Mappemonde, n°55, n°1999/3, pp. 6-9.
– J. Douillard, 2007, « Un croquis de la salle de classe en module », site de l’Académie de Nantes, compte-rendu d’un stage d’équipe des professeurs du Lycée du Pays de Retz, 29 juin 2007.
– Anonyme, 2009, « ‘Sur les murs’ : les cartes murales scolaires », blog Terrimago, 4 avril 2009.
– Mila Saint Anne, 2010, « Où est-ce que j’ai rangé mes élèves ? », blog C’est au pied du mur…, 7 août 2010.
– Leila Frouillou, 2011, « Géographie d’un espace conçu pour les élèves, approprié par les enfants : L’école maternelle française », Carnets de géographes, n°3, décembre 2011.
– Marc le Cœur, 2011, « La Chaire et les gradins. De la salle de classe à la salle de cours dans les lycées au XIXe siècle », Histoire de l’éducation, n°130, n°2/2011, pp. 85-109.
– Delphine Regnard, 2012, « Configurations pédagogiques », blog Enseigner en cherchant, 18 janvier 2012.
Pour aller plus loin sur l’architecture scolaire :
– Vidéo : « L’architecture scolaire », Capcanal, émission Cap Infos primaire, 2007.
– Vidéo : « Un exemple d’architecture scolaire européenne », Curiosphère, 2007.
– « L’établissement scolaire. Des collèges d’humanités à l’enseignement secondaire, XVIe-XXe siècles », Histoire de l’éducation, n°90, n°2/2001.
– « L’architecture scolaire. Essai d’historiographie internationale », Histoire de l’éducation, n°102, n°2/2004.
– Simone Forster, 2004, « L’évolution des pédagogies exige de l’espace, beaucoup d’espace », Bulletin CIIP, n°15, décembre 2004, pp. 15-17.
– Simone Forster, 2004, « L’architecture scolaire en Suisse alémanique », Bulletin CIIP, n°15, décembre 2004, pp. 30-31.
– Simone Forster, 2006, « Architecture scolaire », site de l’IRDP (Institut de recherche et de documentation pédagogique, Neuchâtel), rubrique « Brèches : brèves recherches » (voir également le diaporama proposé).
– Maurice Mazalto (dir.), 2008, Architecture scolaire et réussite éducative, Editions Fabert, 191 p.
– Maurice Mazalto, 2008, « Architecture scolaire et réussite éducative », Entretien réalisé par Norbert Gosset, Direction, n°156, mars 2008, pp. 54-55.
– Leigh Robinson et Taylor Robinson, 2009, « Architecture scolaire : des exemples à suivre en Australie », CELE Echanges, n°2009/3, revue de l’OCDE, 7 p.
– Marie Musset, 2012, « De l’architecture scolaire aux espaces d’apprentissage : au bonheur d’apprendre ? », Dossier d’actualité, Veille et Analyses, Institut français de l’éducation, n°75.
– Jean-Louis Auduc, 2012, « Pour un grand concours national d’architecture scolaire », Le Café pédagogique, rubrique « L’expresso », 17 avril 2012.
La salle de classe, le lieu d’un métier
Si la salle de classe est un lieu d’apprentissage pour les élèves, elle est aussi un espace de travail pour les enseignants. Ces territoires du quotidien prennent une dimension différente en fonction du « rôle » de chacun dans cet espace. Pour les enseignants, la salle de classe est un territoire du quotidien. Mais, selon les pratiques, cet espace est approprié de manière diverse : dans l’enseignement primaire, l’enseignant s’approprie totalement « sa » classe. Il l’aménage, la décore, la structure en fonction de sa pratique pédagogique. Dans l’enseignement secondaire, la salle de classe est un espace partagé : l’histoire-géographie requiert du matériel (depuis les cartes murales jusqu’aux tableaux interactifs). La salle devient alors la salle de classe d’une discipline (l’histoire-géographie) et l’espace où s’installent tour à tour les enseignants de cette discipline. L’identité de la salle de classe n’est donc pas la même dans ces deux niveaux : elle devient le lieu d’un enseignant en primaire, et le lieu d’une discipline dans le secondaire. Mais, dans tous les cas, elle est le lieu où l’enseignant exerce son métier.
Dans sa recherche sur les espaces de l’action enseignante, Jean-François Marcel distingue plusieurs types d’agencement dans la salle de classe : comme éléments signifiants, il retient « des points (bureau de l’enseignant et pupitre de chaque élève, tableaux sur pied, place assignée à l’observateur) ; des lignes (murs, portes et fenêtres, tableaux muraux) ; des aires (bureau et rangements de l’enseignant, surface impartie aux élèves dont les pupitres, rangements « libre-service » et recoins, surfaces de déplacements ou de rencontres, autres – tel l’évier) »[21], à partir desquels il confronte le mobilier scolaire aux dynamiques spatiales de la vie de la classe (déplacements, mais aussi regards, échanges verbaux…). « Il apparaît que l’architecture d’une classe se structure selon un modèle largement dominant, fondé sur une sorte d’assignation de chacun des quatre murs : celui de la porte, généralement sombre car donnant sur un couloir et dépourvu d’éclairage naturel ; celui des fenêtres, face au précédent et source de lumière ; il est généralement situé sur le côté gauche (en regardant le tableau) ; celui du tableau, qui détermine l’orientation générale de la classe ; celui du fond, le moins fortement assigné, le plus neutre, où sont des affichages et rangements (qui ne sont toutefois pas exclus du mur « sombre ») »[22]. Par l’architecture scolaire, la salle de classe est un espace aménagé.
Les ressources des Cafés géographiques :
– Jean-Louis Nembrini, 1999, « Le métier de professeur de géographie va-t-il disparaître ? », Les Cafés géographiques, rubrique Des cafés, compte-rendu du café géographique du 9 mars 1999, par Marc Lohez.
– Pascal Clerc, 2002, « La culture scolaire en géographie », Les Cafés géographiques, rubrique Des cafés, compte-rendu du café géographique du 14 novembre 2002, par Marie-Christine Doceul.
– Dominique Borne et Jacques Schiebling, 2002, « Histoire et géographie : faut-il les pousser au divorce ? », Les Cafés géographiques, rubrique Des cafés, compte-rendu du café géographique du 26 novembre 2002, par Marc Lohez.
– Marc Lohez, 2003, « La géographie scolaire », Les Cafés géographiques, dossier réalisé pour la rubrique « L’édition », 1er août 2003.
– Michel Vauzelle et Philippe Buysse, 2005, « Quelle place du prof dans les nouveaux environnements numériques de travail ? », Les Cafés géographiques, compte rendu du café géographique du 29 septembre 2005, par Yann Calbérac.
– Pierre Gentelle, 2009, « Un pilier de notre système éducatif : l’histoire-géo ? », Les Cafés géographiques, rubrique « Lettres de Cassandre », n°104, 13 décembre 2009.
– Jean-Pierre Renard, 2011, « Géographie à vivre (Xavier Leroux, André Janson, Bernard Malczyk) », Les Cafés géographiques, rubrique « Des livres », 12 décembre 2011.
– Gilles Fumey, 2012, « Tout sauf prof de géo ! », Les Cafés géographiques, rubrique « Brèves de comptoir », 23 février 2012.
-Xavier Leroux, 2013, « Maîtresse, pourquoi on fait de la géographie ? », Les Cafés géographiques, rubrique « Des Cafés », compte rendu du café géographique du 15 janvier 2013, par Bernard Malczyk.
Pour aller plus loin : des ouvrages
– Yves André, 1998, Enseigner les représentations spatiales, Anthropos, Paris, 254 p.
– Yves André et al. (dir.), 1989, Représenter l’espace : l’imaginaire spatial à l’école, Anthropos, Paris, 227 p.
– CNDP, 2002, Cartes et images dans l’enseignement de l’histoire et de la géographie, CNDP, collection « Documents, actes et rapports pour l’éducation », Clermont-Ferrand, 252 p.
– Micheline Roumégous, 2002, Didactique de la géographie. Enjeux, résistances, innovations, Presses universitaires de Rennes, collection Didact Géographie, Rennes, 220 p.
– Pascal Clerc, 2002, La culture scolaire en géographie. Le monde dans la classe, Presses Universitaires de Rennes, Rennes, 185 p.
– Jean-François Thémines, 2011, Savoir et savoir enseigner le territoire, Presses Universitaires du Mirail, collection « collection d’éducation », Toulouse, 176 p.
– Christine Vergnolle-Mainar, 2011, La géographie dans l’enseignement. Une discipline en dialogue, Presses universitaires de Rennes, collection Didact Géographie, Rennes, 184 p.
Pour aller plus loin : des ressources en ligne
– UNESCO, 1998, « Apprendre à vivre ensemble grâce à l’enseignement de l’histoire et de la géographie », Perspectives, n°106, vol. 28, n°2/2008.
– UNESCO, 1998, Apprendre à vivre ensemble grâce à l’enseignement de l’histoire et de la géographie, rapport final du colloque du 12 juin 1998 à Genève, 77 p.
– Paul Arnould et Catherine Biaggi, 2002, « Cartes et images dans l’enseignement de la géographie », compte-rendu de l’intervention au colloque Apprendre l’histoire et la géographie à l’Ecole (Paris, 12-14 décembre 2002), site Éduscol.
– Pascal Clerc, 2002, « Les villes de la culture scolaire en géographie », Mappemonde, n°65, n°1/2002, pp. 34-38.
– Marie-Armelle Barbier-Le Déroff, 2007, « Des grands dans l’espace des petits. Les agents spécialisés des écoles maternelles », Ethologie française, vol. 37, n°4/2007, pp. 655-662.
– Xavier Leroux, 2012, « Compléments des programmes de géographie de l’élémentaire : valait-il mieux jamais que si tard ? », Cybergeo, rubrique « Débats / Les nouveaux programmes dans le primaire », 8 février 2012.
– Vidéo : « Ca sert à quoi la géo ? », Capcanal, émission Capinfo.
La salle de classe, un lieu de l’innovation ?
Sur la toile, les débats entre enseignants, tel que celui « pour ou contre les tableaux interactifs dans l’enseignement de l’histoire-géo ? », nourrissent de nombreux partages d’expériences pédagogiques, et parfois mêmede réelles disputes virtuelles. Entre retour/renouveau de la pédagogie Freinet, utilisation des SIG éducatifs, développement des TICE dans l’enseignement de l’histoire-géographie, ou encore enjeux des contenus des manuels scolaires, la salle de classe n’est pas seulement l’espace de travail de l’enseignant, elle est aussi le lieu d’une réflexion sur l’enseignement. Pour certains enseignants, l’innovation ne se pratique pas dans les adaptations et évolutions pédagogiques, mais dans la recomposition de l’espace scolaire. Ainsi, « instituteur et militant Freinet, Strœsser (1977) chercha à concrétiser les souhaits de ses élèves qui ne plaignaient de ne pas avoir assez de “coins” spécialisés pour leurs ateliers. Après réflexion, ils proposèrent de les multiplier en construisant un balcon. L’idée trouvée, l’instituteur imagina une mezzanine »[23]. Par l’extérieur (le balcon) ou par la verticalité (la mezzanine), l’espace de la salle de classe se déforme, et devient le lieu de ce que Marie-Claude Derouet-Besson nomme une « innovation spatiale »[24]. Néanmoins, l’expérience ne s’appliquant qu’à la pédagogie Freinet, « des enseignants pratiquant d’autres pédagogies protestèrent contre l’implantation systématique de mezzanines »[25]. Et ce débat de dépasser le « cadrage » dans une pédagogie ou une autre, avec l’exposition Change ta classe ![26] qui présente l’histoire de neuf classes du Maroc, de Tunisie et du Bénin qui ont répondu au concours d’idées architecture et design pour scolaires lancé par la Cité de l’architecture & du patrimoine, invitant les enseignants et les élèves à être « les architectes de [leur] école » pour faire de la salle de classe « un espace où dessiner, chanter, slammer[27], conter, lire, philosopher, jouer aux marionnettes, faire de la musique, du théâtre, de la magie, de la calligraphie, du jonglage, des clowneries, écrire des histoires, créer des déguisements, construire, planter, cuisiner, sculpter… »[28]. Pour ou contre cette approche de la salle de classe comme « lieu poétique et joyeux », l’espace reste au cœur de l’innovation pédagogique. Dans la salle de classe, s’exprime et s’enseigne le génie des lieux. Et la géographie de la salle de classe peut être un moyen de « réenchanter le Monde ».
Pour aller plus loin sur les pratiques d’enseignement de la géographie :
– Site : Institut français de l’éducation (Ifé).
– Blog : aggiornamento hist-geo (Réflexions et propositions pour un renouvellement de l’enseignement de l’histoire et de la géographie du primaire à l’université).
– Anne Le Roux, 2001, « La formation des enseignants aux didactiques disciplinaires : de nouvelles problématiques ? L’exemple de la géographie, le cas français », Cybergéo, rubrique « Epistémologie, Histoire de la Géographie, Didactique », article 199, 14 novembre 2001.
– Anne Philippon, 2003, « Les finalités de la géographie scolaire », Les Clionautes, rubrique Géographie », 3 mars 2003.
– Jean-François Thémines, 2004, « Quatre conceptions de la géographie scolaire : un modèle interprétatif des pratiques d’enseignement de la géographie ? », Cybergéo, rubrique « Epistémologie, Histoire de la Géographie, Didactique », article 262, 22 mars 2004.
– Jean-François Thémines, 2006, « Le rapport pratique à l’épistémologie, chez des professeurs-stagiaires du secondaire en géographie », Cybergéo, rubrique « Epistémologie, Histoire de la Géographie, Didactique », article 344, 10 juillet 2006.
– Sylvain Genevois et Yvan Carlot, 2007, « Globes virtuels ou SIG éducatifs ; quoi de neuf pour l’enseignement de la géographique ? », Actes du FIG 2007.
– « L’enseignement de la géographie en France », L’information géographique, vol. 72, n°3/2008.
– Pascal Clerc, 2009, « Pour une autre géographie scolaire », site de l’Académie Aix-Marseille, communication aux 9èmes Rencontres de la Dur@nce, « L’Autre et l’Ailleurs ».
– Cécile Gintrac, 2011, « Quelques pistes de réflexion sur la géographie scolaire et universitaire », blog aggiornamento hist-geo, 15 avril 2011.
– Nacima Baron-Yelles, 2012, « Les tourments de la géographie scolaire face aux avancées des sciences du territoire », dans Sciences du territoire, Karthala, Paris, pp. 122-145.
Pour aller plus loin sur les manuels scolaires :
– Site : La géographie scolaire, outil géopolitique (Représentations de l’identité nationale française dans les manuels scolaires de la géographie), Jean-Pierre Capmeil.
– Pascal Clerc, 2001, « Les manuels scolaires au risque de l’innovation », Actes du FIG 2001.
– Danièle Soubeyrand-Géry, 2001, « Le manuel scolaire est-il vecteur des innovations de la géographie ? », Actes du FIG 2001.
– Christina Koulouri, 2001, « Le village et la ville : la Grèce imaginaire dans les manuels scolaires du XXe siècle », Strates, n°10, pp. 157-172.
– Stéphanie Krapoth, 2004, « Visions comparées des manuels scolaires en France et en Allemagne », Cahiers d’Histoire, n°93, pp. 45-62.
– « Valeurs, représentations et stéréotypes dans les manuels scolaires de la Méditerranée », Tréma, n°35-36.
– Leonardo Moreira Ulhôa et Vânia Rúbia Farias Vlach, 2012, « La problématique de la représentation des paysages brésiliens dans les manuels scolaires français », Confins, n°14.
Pour aller plus loin sur les programmes scolaires :
– Jean-Pierre Chevalier, 2000, « La géographie dans les programmes scolaires en Europe », Cybergéo, rubrique « Epistémologie, Histoire de la Géographie, Didactique », article 130, 15 mars 2000.
– Anne Bouchut, 2003, « La ville, le fait urbain dans les programmes de géographie du cycle III de l’école élémentaire (1882-2002) », Cybergéo, rubrique « Epistémologie, Histoire de la Géographie, Didactique », article 252, 10 décembre 2003.
– Jean-François Thémines, 2004, « Quatre conceptions de la géographie scolaire : un modèle interprétatif des pratiques d’enseignement de la géographie ? », Cybergéo, rubrique « Epistémologie, Histoire de la Géographie, Didactique », article 262, 22 mars 2004.
– Jean-Pierre Chevalier, 2007, « Education géographique et Révolution nationale. La géographie scolaire au temps de Vichy », Histoire de l’éducation, n°113, pp. 69-101.
– « Guerres et conflits dans les manuels et dans l’enseignement. Interprétations, représentations », Tréma, n°29.
– Marielle Wastable, 2010, « La notion de belt dans la géographie française des Etats-Unis », Cybergéo, rubrique « Epistémologie, Histoire de la Géographie, Didactique », article 495, 14 avril 2010.
– Alexis Sierra, 2010, « Les nouveaux programmes scolaires de géographie au Lycée », EchoGéo, n°14, septembre 2010/novembre 2010.
– François Louveaux, 2010, « L’élaboration des nouveaux programmes du Lycée : une question de compromis », Entretien réalisé par Alexis Sierra, EchoGéo, n°14, septembre 2010/novembre 2010.
– Philippe Sierra, 2010, « Appliquer de nouveaux programmes scolaires : quelle géographie enseignée ? », Entretien réalisé par Alexis Sierra, EchoGéo, n°14, septembre 2010/novembre 2010.
– Xavier Leroux, 2012, « Compléments des programmes de géographie de l’élémentaire : valait-il mieux jamais que si tard ? », Cybergéo, rubrique « Débats : Les nouveaux programmes dans le primaire », 8 février 2012.
– Mamadou Bouna Timera, 2012, « Le Japon, objet d’étude et d’enseignement au Sénégal », Cybergéo, rubrique « Epistémologie, Histoire de la Géographie, Didactique », article 609, 1er juin 2012.
La salle de classe, un « théâtre » de l’injustice spatiale ?
Pour d’autres enseignants, ce territoire du quotidien qu’est la salle de classe peut devenir un espace de violence. Confrontés à ce problème social grave, les différents gouvernements ont souvent (ab)usé des remaniements de la carte scolaire. Parce que « la gestion d’un territoire par des systèmes de sectorisation n’est jamais neutre », Gilles Fumey s’interroge : et si la carte scolaire, « au sommet des belles idées de la République », était une matérialisation de la « déroute de la géographie »[29] ? La manière de concevoir et de percevoir l’espace de l’école dans les territoires du quotidien, dans la société, ainsi que les aménagements à l’intérieur de l’école « formate » l’imaginaire spatial de ceux qui produisent ces cartes scolaires. L’espace n’est pas neutre, et comme l’ensemble des décisions relevant de l’éducation scolaire, l’espace scolaire est la traduction du politique dans l’école.Pour Gilles Fumey, la carte scolaire « dessinée par une technocratie qui n’a perçu l’école que comme un lieu de gestion, un ensemble de flux entrants et sortants », et non pas comme un lieu d’apprentissage et de transmission. Pour Louis Maurin, il ne faut pas oublier que « la carte scolaire est loin d’être la seule barrière entre les catégories populaires et les écoles des enfants de privilégiés »[30]. Dans les deux cas, la carte scolaire participe de la production d’une injustice spatiale qui s’inscrit autant dans l’espace social (par le prisme de l’(in)égalité des chances) que dans les conflits de représentations.
Se placer/être placé dans la classe, se situer dans la société ? Si la problématique du placement scolaire est généralement étudiée à l’échelle des stratégies des familles en termes de choix d’espaces scolaires au sein de la ville ou du territoire, cette question reste majeure à l’échelle de l’école elle-même. « Tout d’abord, c’est un espace fortement spécifié, immédiatement reconnaissable de l’extérieur, au-delà des évolutions architecturales qui accompagnent l’histoire de l’institution, avec les éléments propres que sont la cour, le préau, les grands bâtiments abritant les salles aux larges fenêtres, les parkings. Dès le plus jeune âge, celui qui y pénètre, reconnaît immanquablement les salles de classe, les bureaux administratifs, la bibliothèque, le CDI, la cantine »[31]. Se situer dans l’espace scolaire se joue également à l’échelle de la salle de classe.A cette échelle, l’espace est aussi fragmenté que l’espace scolaire : par-delà l’effet de seuil qui dessine un dehors et un dedans, se différencient les espaces de l’enseignant, les espaces des élèves, les espaces d’un élève et les espaces de partage. Pour certains élèves, l’expérimentation de la salle de classe est douloureuse : placés, ils ne se reconnaissent pas dans le plan de classe. Non placés, certains sont exclus des dynamiques de groupes. La sociabilité qui se joue à cette échelle s’inscrit dans la salle de classe comme un espace spécifique, porteur d’identités, d’éléments symboliques, structurant l’imaginaire et les pratiques spatiales de ceux qui y entrent quotidiennement.
Les ressources des Cafés géographiques :
– Gilles Fumey, 2006, « La carte scolaire, déroute de la géographie ? », Les Cafés géographiques, rubrique « Brèves de comptoir », 27 septembre 2006.
– Louis Maurin, 2008, « La mixité sociale passe-t-elle par la carte scolaire ? », Les Cafés géographiques, compte-rendu du café géographique du 11 novembre 2008.
Pour aller plus loin sur les espaces de la scolarisation :
– Claude Mangin, 1997, « Nancy des riches, Nancy des pauvres : des collégiens se représentent leur ville », Mappemonde, n°2/1997, pp. 35-40.
– « Des écoles pour le Sud », Autrepart, n°17, n°1/2001.
– Jean-Christophe François, 2002, « Evitement à l’entrée en sixième et division sociale de l’espace scolaire à Paris », L’Espace géographique, vol. 31, n°4/2002, pp. 307-327.
– « Scolarisation et territoires », Espace Populations Sociétés, n°2005/3.
– Stéphane Bonnéry, 2006, « La question de “l’ethnicité” dans l’Ecole : essai de reconstruction du problème », Sociétés et jeunesses en difficulté, n°1, printemps 2006.
– Catherine Barthon et Brigitte Monfroy, 2006, « Une analyse systémique de la ségrégation entre collèges : l’exemple de la ville de Lille », Revue française de pédagogie, n°156, juillet/septembre 2006, pp. 29-38.
– Iván Bajomi, Eszter Berényi, Gábor Eröss et Anna Imre, 2006, « Positions, logiques d’action et inégalités entre les écoles d’un arrondissement de Budapest », Revue française de pédagogie, n°156, juillet/septembre 2006, pp. 39-50.
– Anne Sgard et André-Frédéric Hoyaux, 2006, « L’élève et son lycée : De l’espace scolaire aux constructions des territoires lycéens », L’Information géographique, vol. 70, n°3/2006, pp. 87-108.
– Marie-France Lange, 2007, « Espaces scolaires en Afrique francophone », Ethnologie française, vol. 37, n°4/2007, pp. 639-645.
– Yves Jean, 2007, Géographies de l’école rurale. Acteurs, réseaux et territoires, Orphys, Paris, 303 p.
– Eric Charmes, 2007, « Carte scolaire et ‘clubbisation’ des petites communes périurbaines », Sociétés contemporaines, n°67, n°3/2007, pp. 67-94.
– Marco Oberti, 2007, L’école dans la ville. Ségrégation – mixité – carte scolaire, Presses de Sciences Po, Paris, 304 p.
– Jean-Christophe François et Franck Poupeau, 2008, « Les déterminants socio-spatiaux du placement scolaire. Essai de modélisation statistique appliquée aux collèges parisiens », Revue française de sociologie, vol. 49, n°1/2008, pp. 93-126.
– Jean-Christophe François et Franck Poupeau, 2009, « Le sens du placement scolaire : la dimension spatiale des inégalités scolaires », Revue française de pédagogie, n°169, octobre/novembre 2009, pp. 77-97.
– David Giband et Guillaume Lacquement (dir.), 2009, La ville et ses marges scolaires. Retour d’expériences sur l’éducation prioritaire et la rénovation urbaine en France et à l’étranger, Presses universitaires de Perpignan, collection Etudes, Perpignan, 147 p.
– Leïla Frouillou, 2011, « Géographie d’un espace conçu pour les élèves, approprié par les enfants : L’école maternelle française », Carnets de géographes, n°3, décembre 2011.
– « Education et ruralités », Revue internationale d’éducation de Sèvres, n°59, avril 2012.
– Gwenaëlle Audren, 2012, « Dynamiques scolaires et recompositions socio-territoriales : quels impacts sur la ségrégation à Marseille ? », Géographie, économie, société, vol. 14, n°2/2012, pp. 147-170.
Dans ma salle de classe, que de géographie(s) !
« Les établissements scolaires découpent dans les villes, les banlieues, les campagnes, des portions d’espace dévolues à l’accueil et à la formation des enfants et des adolescents. Ceux-ci y passent de longues heures ; jusqu’à atteindre l’âge adulte, leur école demeure l’un des principaux lieux de vie, juste après le domicile familial, où ils découvrent le travail et le jeu, la contrainte et la convivialité, l’ennui et l’excitation, l’amitié et le conflit… »[32]. L’espace scolaire est le lieu de l’apprentissage de la sociabilité : dans la cour de récréation, l’acceptation de « l’Autre » est une expérimentation de la différence et de l’habiter. Dans les écoles de la ségrégation, qu’elle soit subie (comme dans le cas des écoles en Bosnie-Herzégovine[33], devenues des écoles de l’exclusion) ou choisie (par les stratégies d’adaptation aux contraintes de la carte scolaire), l’habiter expérimenté est celui d’un vivre-séparé. A l’échelle de la salle de classe elle-même, les élèves expérimentent l’espace public, entre espace partagé (par l’enseignant et les élèves) et espace de contraintes (par les règles fixées par l’enseignant pour faire de la salle de classe un espace à la fois du vivre-ensemble et d’expérimentation des normes sociétales).« La question de la socialisation par l’espace scolaire permet d’interroger plus largement le rôle social de l’école maternelle, terrain privilégié pour observer et comprendre les questions de contrôle par l’espace »[34]. Dans cette perspective, l’espace scolaire « au même titre que le territoire domestique est essentiel à la structuration de l’adolescent »[35], et la dimension spatiale des espaces scolaires participe de la compréhension de l’apprentissage de l’habiter par les futurs adultes. Dans l’espace scolaire, la géographie n’est pas seulement une discipline, elle est aussi (et avant tout) une expérimentation de l’espace.
Lieu d’un métier, lieu pour le métier : la salle de classe et, plus généralement, les espaces de l’élève ont fait leur entrée dans la géographie scolaire. Le premier chapitre de géographie dans les nouveaux programmes de sixième part de « l’espace proche » du collégien (son domicile, sa salle de classe, son collège, son quartier) et de ses pratiques spatiales. Une manière pour l’enseignant de sensibiliser les élèves à de grands thèmes de la géographie qui traversent les débats politiques actuels, et structureront, plus tard, leurs choix citoyens. Analysant « les représentations de l’espace vécu et perçu par des collégiens, leur ville, leur quartier » à Nancy, Claude Mangin[36] montre « la subjectivité des élèves par rapport à leur espace familier ». Confrontant les espaces de référence d’élèves de différents collèges nancéens, il fait apparaître que le collège n’a pas la même place, le même rôle structurant dans les représentations des élèves de la « Nancy des riches » ou de la « Nancy des pauvres ». La salle de classe et, plus généralement, les espaces scolaires dans les représentations spatiales des élèves est à la fois un objet géographique permettant d’appréhender les injustices spatiales dans l’espace perçu et l’espace vécu ; un enjeu dans les politiques urbaines et scolaires ; et un « outil » pour amener les élèves à comprendre le sens d’une géographie innovante qui touche leurs quotidiennetés et leur donne des grilles de lecture pertinentes pour appréhender le Monde.
Bénédicte Tratnjek.
Pour aller plus loin : des revues en ligne
– Revue Internationale d’éducation de Sèvres.
– Sociétés et jeunesses en difficulté.
Pour aller plus loin : des sites et des blogs
– Page « Commission Epistémologie, Histoire et Enseignement » du CNFG (Comité National Français de Géographie ».
– Site : Institut français de l’éducation (Ifé).
– Blog : aggiornamento hist-geo (Réflexions et propositions pour un renouvellement de l’enseignement de l’histoire et de la géographie du primaire à l’université).
– Blog Cybercarnet du cours didactique de la géographie, Norbert Viau.
– Site Histoire et actualité de la pédagogie, Philippe Meirieu.
– Site : La géographie scolaire, outil géopolitique (Représentations de l’identité nationale française dans les manuels scolaires de la géographie), Jean-Pierre Capmeil.
Pour aller plus loin : géographie de l’enfance et de la jeunesse
– Jean Piaget et Barbel Inhelder, 1985, La représentation de l’espace chez l’enfant, Presses Universitaires de France, collection Bibliothèque de philosophie contemporaine, Paris, 4ème édition, 574 p.
– Yves André et al. (dir.), 1989, Représenter l’espace : l’imaginaire spatial à l’école, Anthropos, Paris, 227 p.
– Michèle Masson-Vincent, 1995, L’enfant et la montagne. Savoirs géographiques et représentations spatiales sur la montagne, Anthropos, Paris, 332 p.
– Stéphane Tessier (dir.), 2005, L’enfant des rues. Contribution à une socio-anthropologie de l’enfant en grande difficulté dans l’espace urbain, L’Harmattan, collection Inter-National, Paris, 474 p.
– Régine Sirota (dir.), 2006, Eléments pour une sociologie de l’enfance, Presses universitaires de Rennes, collection Le sens social, Rennes, 325 p.
– Isabelle Danic, Julie Delalande et Patrick Rayou, Enquêter auprès d’enfants et de jeunes. Objets, méthodes et terrains de recherche en sciences sociales, Presses Universitaires de Rennes, collection Didact Education, Rennes, 216 p.
– Kyriaki Tsoukala, 2007, Les territoires urbains de l’enfant, L’Harmattan, Paris, 284 p.
– Marie Morelle, 2007, La rue des enfants, les enfants de la rue, CNRS Editions, Paris, 282 p. (voir le compte rendu de lecture des Cafés géographiques).
– Isabelle Danic, Olivier David et Sandrine Depeau (dir.), 2010, Enfants et jeunes dans les espaces du quotidien,Presses universitaires de Rennes, collection Géographie sociale, Rennes, 273 p.
– « Les géographies des enfants et des jeunes », Carnets de géographes, n°3, décembre 2011, numéro dirigé par Sonia Lehman-Frisch et Jeanne Vivet.
[1] Pierre George, 1936, « Les premiers éléments de la géographie par l’expérience », L’Information géographique, vol. 1, n°1/1936, p. 35.
[2] André Cholley, « Editorial », L’Information géographique, vol. 1, n°1, p. 1.
[3] Pierre George, 1936, « Les premiers éléments de la géographie par l’expérience », L’Information géographique, vol. 1, n°1/1936, p. 35.
[4] Jean-Pierre Renard, 2011, « Géographie à vivre (Xavier Leroux, André Janson, Bernard Malczyk) », Les Cafés géographiques, rubrique « Des livres », 12 décembre 2011.
[5] Marc le Cœur, 2011, « La Chaire et les gradins. De la salle de classe à la salle de cours dans les lycées au XIXe siècle », Histoire de l’éducation, n°130, n°2/2011, pp. 85-109.
[6] Gilles Fumey, 2012, « Désanctuarisons la salle de classe ! », blog geographica.net, 4 septembre 2012.
[7] Bertrand Pleven, 2008, « Entre les murs (Laurent Cantet), Gomorra (Matteo Garrone) », Les Cafés géographiques, rubrique « Des films », 31 octobre 2008.
[8] Mila Saint Anne, « L’auteure », blog C’est au pied du mur…
[9] Pierre Gentelle, 2008, « L’école, ça peut rendre fou », Les Cafés géographiques, rubrique « Lettres de Cassandre », n°82, 12 octobre 2008.
[10] Pierre Gentelle, 2008, « L’école, ça peut rendre fou », Les Cafés géographiques, rubrique « Lettres de Cassandre », n°82, 12 octobre 2008.
[11] Voir : Bénédicte Tratnjek, « L’histoire et la géographie malmenées sur twitter », Les Cafés géographiques, rubrique « Brèves de comptoir », 21 novembre 2012.
[12] Gilles Fumey, 2012, « Comment les élèves sont des acteurs géographes ? », Le Café pédagogique, 23 septembre 2012.
[13] Marie-Claude Derouet-Besson, 1998, Les murs de l’école. Éléments de réflexion sur l’espace scolaire, Editions Métaillé, Paris, p. 127.
[14] Ferdinand Buisson (dir.), 1911, Nouveau dictionnaire de pédagogie et d’instruction primaire, Hachette, Paris, 2ème édition (1ère édition 1887), mis en ligne par l’Ifé (Institut français de l’éducation). Voir également l’édition numérique de la 1ère édition sur Gallica (site de la Bibliothèque nationale de France) : 1ère partie, 2ème partie.
A propos de Ferdinand Buisson et du Dictionnaire de pédagogie, voir notamment :
– tout comme Le Tour de la France par deux enfants, « le Buisson », grand classique de la pédagogie, a été érigé au rang de « lieu de mémoire » de l’école républicaine dans les travaux dirigés par Pierre Nora : Pierre Nora, 1984, « Le “Dictionnaire de pédagogie” de Ferdinand Buisson », dans Pierre Nora (dir.), 1984, Les Lieux de mémoire, Gallimard, Paris.
– Philippe Savoie, 2012, « Education et démocratie. Retour sur le Nouveau Dictionnaire de pédagogie de Ferdinand Buisson (1911) », Education & Didactique, vol. 6, n°1, pp. 117-126.
[15] Simone Forster, 2004, « L’évolution des pédagogies exige de l’espace, beaucoup d’espace », Bulletin CIIP, n°15, décembre 2004, p. 15.
[16] Simone Forster, 2004, « L’architecture scolaire en Suisse alémanique », Bulletin CIIP, n°15, décembre 2004, p. 30.
[17] Gilles Fumey, 2012, « Désanctuarisons la salle de classe ! », blog geographica.net, 4 septembre 2012.
[18] Simone Forster, 2004, « L’architecture scolaire en Suisse alémanique », Bulletin CIIP, n°15, décembre 2004, p. 30.
[19] Simone Forster, 2004, « L’architecture scolaire en Suisse alémanique », Bulletin CIIP, n°15, décembre 2004, p. 30.
[20] Mila Saint Anne, 2010, « Où est-ce que j’ai rangé mes élèves ? », blog C’est au pied du mur…, 7 août 2010.
[21] Jean-François Marcel, 1999, « Espace et action enseignante. Eléments pour une chorématique de la salle de classe », Mappemonde, n°55, n°1999/3, p. 7.
[22] Jean-François Marcel, 1999, « Espace et action enseignante. Eléments pour une chorématique de la salle de classe », Mappemonde, n°55, n°1999/3, p. 8.
[23] Marie-Claude Derouet-Besson, 1998, Les murs de l’école. Éléments de réflexion sur l’espace scolaire, Editions Métaillé, Paris, p. 33.
[24] Marie-Claude Derouet-Besson, 1998, Les murs de l’école. Éléments de réflexion sur l’espace scolaire, Editions Métaillé, Paris, p. 33.
[25] Marie-Claude Derouet-Besson, 1998, Les murs de l’école. Éléments de réflexion sur l’espace scolaire, Editions Métaillé, Paris, p. 33.
[26] Exposition Change ta classe !, 14 février / 18 mars 2013, Cité de l’architecture & du patrimoine, Paris.
[27]Retrouvez le « Géoslam » de Michel Sivignon pour le Banquet géographique des Cafés géographiques. « Moi, je voudrais faire un slam pour une vieille dame que je connais depuis que je suis tout petit. Je voudrais faire un slam pour une vieille dame qu’on appelle géographie ».
[28]Change ta classe !, Concours d’idées architecture et design pour scolaires, Cité de l’architecture & du patrimoine.
[29] Gilles Fumey, 2006, « La carte scolaire, déroute de la géographie ? », Les Cafés géographiques, rubrique « Brèves de comptoir », 27 septembre 2006.
[30] Louis Maurin, 2008, « La mixité sociale passe-t-elle par la carte scolaire ? », Les Cafés géographiques, compte-rendu du café géographique du 11 novembre 2008.
[31] Anne Sgard et André-Frédéric Hoyaux, 2006, « L’élève et son lycée : De l’espace scolaire aux constructions des territoires lycéens », L’Information géographique, vol. 70, n°3/2006, pp. 90.
[32]Anne Sgard et André-Frédéric Hoyaux, 2006, « L’élève et son lycée : De l’espace scolaire aux constructions des territoires lycéens », L’Information géographique, vol. 70, n°3/2006, p. 87.
[33] Voir le dossier « Education » du Courrier des Balkans.
[34] Leila Frouillou, 2011, « Géographie d’un espace conçu pour les élèves, approprié par les enfants : L’école maternelle française », Carnets de géographes, n°3, décembre 2011.
[35] Anne Sgard et André-Frédéric Hoyaux, 2006, « L’élève et son lycée : De l’espace scolaire aux constructions des territoires lycéens », L’Information géographique, vol. 70, n°3/2006, p. 107.
[36]Claude Mangin, 1997, « Nancy des riches, Nancy des pauvres : des collégiens se représentent leur ville », Mappemonde, n°2/1997, p. 35.
Une mise en abyme en quelque sorte.
[…] http://cafe-geo.net/article_2652/ […]