Frida Kahlo, Diego Rivera
L’art en fusion

Musée de l’Orangerie
9 octobre 2013- 13 janvier 2014

Autoportrait en robe de velours (1926)

Autoportrait en robe de velours (1926)

Lorsque deux artistes se rencontrent, qu’ils partagent l’amour de l’art, la passion de leur pays et les mêmes combats politiques… cela fait boum !

Les deux peintres mexicains, unis dans la vie pour le meilleur et pour le pire, sont deux peintres immenses et singuliers. Leur relation fut tumultueuse mais créatrice, chacun reconnaissant le génie de l’autre.

Frida est restée longtemps dans l’ombre de Diego. Mais aujourd’hui, une sorte de « Fridamania » l’emporte dans la lumière. Elle est devenue l’icône et l’image de toutes les modernités.

Une grande partie des œuvres présentées vient du musée de Dolorès Olmedo, mécène qui a mis sa vie au service de l’art mexicain et des deux monstres sacrés aujourd’hui exposés à l’Orangerie.

Un couple mythique

 La gloire de Diego

Autoportrait  au chapeau (1907)  Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Autoportrait au chapeau (1907)
Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Il est né au Mexique en 1886. En 1907 il obtient une bourse pour étudier l’art qui lui permet d’aller en Europe et d’entrer en relation avec le cubisme et les mouvements d’avant-garde. Il fréquente Modigliani, Picasso, Apollinaire. Il acquiert rapidement la reconnaissance de ses pairs. Il est célèbre dès les années 1920.

Paysage du Midi (1918) Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Paysage du Midi (1918)
Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

De 1907 à 1921 Diego vit en Europe. A Madrid il s’enthousiasme pour Goya, à Paris il admire Cézanne, jusqu’à éprouver ce que l’on a appelé « le choc cézannien de Diego. Puis il devient l’ami de Picasso et s’éprend du cubisme, « l’art qui ne respecte rien » dit-il.

Le marché aux puces (1915) Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Le marché aux puces (1915)
Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

En 1916 une exposition personnelle lui est consacrée à New York, alors qu’il appartient au mouvement cubiste.

A Paris, il rencontre aussi en 1917 Léon Trotski, icône de la révolution soviétique, qu’il soutiendra plus tard au Mexique, à la fin de sa vie.

Le tourbillon de la bohême parisienne s’achève en 1921. Diego est alors convaincu que pour accéder à l’universalité, l’artiste doit être soutenu par le peuple. La révolution muraliste peut commencer.

Muralisme et révolution mexicaine

L’Arsenal. La distribution des armes (1928) Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

L’Arsenal. La distribution des armes (1928)
Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Au premier plan de ce tableau on reconnaît Diego et Frida, qui viennent de se rencontrer et qui militent ensemble.

La Renaissance de l’art au Mexique ne peut guère se comprendre sans évoquer le contexte politique de ce début du XX ème siècle.

De 1910 à 1920 la révolution mexicaine ravage le pays. Le dictateur Porfirio Diaz est tombé après avoir certes modernisé le pays mais aussi terriblement accru les inégalités sociales. L’épisode le plus célèbre de cette révolution, plus nationaliste qu’idéologique est la lutte menée par Zapata, chef d’une armée de paysans et Pancho Villa, devenus héros de légende. Cette guerre, brève et furieuse, fit presque 1 million de morts.

En Russie, la révolution de novembre 1917 a aussi un immense retentissement. Diego n’a pas participé à la révolution mexicaine puisqu’il était en Europe, mais comme de nombreux artistes il adhère au Parti communiste en 1922.

Le muralisme naît donc au Mexique, en période de grande ferveur démocratique. Il se présente comme une lutte contre l’impérialisme occidental (économique et culturel).

Le nouveau ministre de l’Education, José Vasconcelos, souhaite que le peuple mexicain se réapproprie son histoire. Il confie la réalisation de vastes fresques  aux Tres Grandes du muralisme.

Le fondateur est Diego Rivera, l’idéologue est Siqueiros (1899-1974), militant inconditionnel qui prit part à toutes les luttes ouvrières. Le troisième, et peut-être le plus doué représentant de cette Renaissance artistique mexicaine est Orozco.

L’art du muralisme se confond avec celui de la fresque monumentale offerte au peuple. Animée d’intention pédagogique, elle doit être comprise facilement par les travailleurs et les paysans du monde entier. Elle accorde une grande attention à la tradition précolombienne et à l’expérience révolutionnaire mexicaine.

Dans les années 1920, Diego Rivera est appelé par le nouveau ministre José Vasconcelos, pour couvrir de fresques les murs de son ministère. Il peint aussi les murs de l’amphithéâtre Bolivar. En 1927, il peint à Moscou le bâtiment de l’Armée rouge.

L’éléphant et la colombe

Frida Kahlo & Diego Rivera (1931) Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Frida Kahlo & Diego Rivera (1931)
Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Diego Rivera est un Falstaff de la peinture. Il est laid et pantagruélique, avec un visage enfantin. Il est aussi grand séducteur et coureur de jupons invétéré. Mais il reconnaît le génie de sa femme. Il écrit :

« Jamais auparavant une femme n’avait créé de poésie aussi déchirante sur la toile…

Je vous la recommande, non en tant qu’époux, mais comme admirateur enthousiaste de son œuvre, acide et tendre, dure comme l’acier et délicate et fine comme une aile de papillon, aimable comme un beau sourire, et profonde et cruelle comme l’amertume de la vie ».

Frida  Kahlo est née en 1907, elle a eu une enfance difficile, mais dont elle ne se plaint jamais. Son père est un juif hongrois, né en Allemagne et arrivé au Mexique en 1891. Il est athée et photographe. En deuxième noce, il épouse une Mexicaine au sang mêlé, dont il a quatre filles. Sa préférée est Frida, celle qu’il enverra dans l’école la plus réputée du pays, la Préparatoire. Il y a 35 filles et 2 000 garçons. Elle se rêve médecin, elle s’engage dans un groupe d’étudiants communistes.

La vie est rude pour Frida enfant puisqu’à 8 ans elle est frappée par la poliomyélite et reste « Frida la boiteuse ». En 1925 une épreuve encore plus terrible l’anéantie : un accident d’autobus la brise en mille morceaux et tue plusieurs personnes. Sa vie durant, elle sera opérée, encore et encore, endurant mille souffrances.

C’est sur son lit d’hôpital qu’elle reçoit de ses parents des pinceaux et des toiles pour tromper son ennui. Elle réalise immédiatement des choses sublimes : des portraits de ses amis, de sa famille et des autoportraits. Celui de l’affiche –voir ci-dessus, date de 1926 ; elle n’a que 19 ans et elle est autodidacte !

En 1928, c’est elle qui va voir Diego, déjà croisé en 1922, pour lui montrer ses toiles et lui demander conseil. Ils s’admirent comme artistes, ils tombent amoureux, ils se marient en 1929. Tout les sépare ; il a le double de son âge et le triple de son poids. Leur union est vivement décriée par les proches.

Frida, épouse qui vit d’abord dans l’ombre du maître, est toujours merveilleusement parée : de coiffures traditionnelles, de bijoux incroyables, de toilettes indiennes qui imposent fièrement les symboles de la culture mexicaine, mais aussi qui cachent sa jambe atrophiée.

La femme Frida est complexe. Excentrique, provocatrice, elle a une âme narcissique et baroque. Elle s’habille parfois comme un homme pour se moquer des codes sociaux, elle se veut libre, indépendante. Elle boit, elle fume, autant que Diego; elle a des aventures homosexuelles. En 1934 la liaison de Diego avec la propre sœur de Frida brise leur couple. Ils divorcent en 1939 pour se remarier en 1940.

La gloire de Frida

De 1929 à 1940, elle vit dans l’ombre du génie et le suit dans tous ses déplacements de San Francisco à New York en passant par Paris. Et partout elle se sent mal à l’aise. La peinture reste sa seule raison d’être.

Autoportrait à la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis (1932) New York Collection Manuel Reyero

Autoportrait à la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis (1932)
New York Collection Manuel Reyero

Ce tableau illustre le rapport ambivalent que Frida entretient avec les EU où son mari connaît de grands succès et reçoit d’importantes commandes publiques. De petit format, il reprend l’iconographie populaire des ex-voto mexicains. Elle se présente debout sur un socle, sous l’aspect d’une statue vivante. Elle est revêtue d’une élégante robe rose et elle tient à la main un petit drapeau du Mexique. Sa figure divise l’espace en deux : à gauche la terre natale, avec ses symboles, son histoire, la vie naturelle ; à droite l’image des EU avec ses machines, ses  hautes cheminées (dessus est écrit FORD) et ses gratte-ciel.

En 1938 André Breton s’enthousiasme pour ses œuvres et lui organise une exposition personnelle à New York. C’est un succès, la moitié des 25 œuvres présentées est vendue.

En 1939 elle expose aussi à Paris. Elle déteste tout ce qu’elle voit : « Bon sang ! ça valait la peine de venir jusqu’ici, juste pour comprendre pourquoi l’Europe est en train de pourrir, pourquoi tous ces incapables sont la cause de tous les Hitler d et de tous les Mussolini.

En 1940 elle participe à l’Exposition internationale du surréalisme organisée à Mexico et reçoit de nombreuses commandes.

De 1940 à 1945, elle est véritablement admise dans le cercle des grands peintres Mais sa notoriété reste plus importante à l’étranger que dans son pays. Puis elle fut oubliée jusque dans les années 1980 avant de devenir une icône de la modernité pour les artistes de la fin du XX ème et du début du XXI ème siècle.

En 1958 la Casa Azul est transformée en musée Frida Kahlo, à la demande de Diego.

La Maison Bleue, c’est la maison où elle est née, où elle a grandi. Fêtes, amours, séparations, querelles, art et révolution font de cette maison le lieu des aventures intellectuelles les plus singulières du XX ème. Le couple y a reçu, entre autres, André Breton et Léon Trotski.

La politique un peu, beaucoup, passionnément

Frida est contemporaine de la révolution mexicaine. Zapata fut l’un de ses héros. Elle adhère au Parti communiste en 1923, elle a 16 ans.

Diego adhère au PC en 1923, il en est expulsé en 1925, y revient en 1926 comme secrétaire général et s’auto exclut peu après. Ensemble ils s’engagent en 1936 en faveur des républicains lorsque la guerre civile éclate en Espagne. Ensemble ils accueillent chez eux Léon Trotski lorsque le président Cardenas lui accorde l’asile politique en 1938. Cela n’évitera pas son assassinat par les sbires de Staline en 1940.

Ils vont pourtant revenir au PC et adhérer au stalinisme. Nul n’est parfait !

La défense de la culture mexicaine

Les deux artistes ont aussi donné un nouveau langage à la culture métisse du Mexique. Ils sont les premiers à avoir fait fusionner l’art populaire, l’art pré colombien et le langage de l’avant-garde artistique. Ils ont d’ailleurs rassemblé une grande collection de statues précolombiennes. Leurs œuvres, figuratives, surfent sur la vogue de l’indigénisme. Elles célèbrent le peuple et sa vie quotidienne. Elles explosent de couleurs et de vie.

Un hymne à la vie, même cabossée

Diego montre ce qu’il voit. Frida montre ce qu’elle est.

André Breton voulait considérer Frida comme une surréaliste. Elle s’y refuse avec véhémence :

« On me prenait pour une surréaliste. Ce n’est pas juste. Je n’ai jamais peint de rêves. Ce que j’ai représenté était ma réalité… Je déteste le surréalisme. C’est une manifestation décadente de l’art bourgeois, une déviation de cet art véritable qu’attend le peuple… Le surréalisme est la surprise magique consistant à trouver un lion dans l’armoire dont on voulait sortir une chemise »

En 1954 Frida rend l’âme. Elle a 47 ans et presque autant d’années de souffrances. Elle écrit : « J’espère que la sortie sera joyeuse et j’espère bien ne jamais revenir. Sur son dernier tableau, l’inscription : Viva la vida !

Diego se remarie dès 1955, insatiable de la vie. Il meurt d’un cancer en 1957.

Diego Rivera

L’œuvre de Diego rayonne encore au Mexique où ses fresques gigantesques ornent encore de nombreux bâtiments officiels de la capitale : Palais National de Mexico.

En 1930, bien que communiste, les Etats-Unis font appel à lui pour peindre des fresques sur des bâtiments officiels.  En 1930, à San Francisco, il peint une Allégorie de la Californie. En 1932 à Detroit il peint L’industrie à Détroit. Il expose en 1931 à New York pour la deuxième fois.

En 1932 il peint L’homme à la croisée des chemins pour le Rockefeller Center. Il a l’audace de représenter, clairement identifiable, Lénine ! C’est un scandale. La famille Rockefeller, furieuse, fera détruire son œuvre. Mais lorsqu’il rentre au Mexique, il est considéré comme un traître à la patrie.

En 1950, il représente le Mexique à la Biennale de Venise avec Siqueiros et Orozco, les Tres Grandes.

Zapata (1931)  Fresque du Palais Cortes à Cuernavaca

Zapata (1931)
Fresque du Palais Cortes à Cuernavaca

Le canoë fleuri (1931) Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Le canoë fleuri (1931)
Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Femme aux tresses (1941)Collection Miguel Aleman Velasco

Femme aux tresses (1941)
Collection Miguel Aleman Velasco

Vendeuses d’arums (1943)Collection Miguel Aleman Velasco

Vendeuses d’arums (1943)
Collection Miguel Aleman Velasco

Dolorès Olmedo La Tehuana (1955) Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Dolorès Olmedo La Tehuana (1955)
Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Ces cinq tableaux résument parfaitement les valeurs de Diego : l’amour de son pays, l’amour de son peuple et l’amour des femmes, dont Dolorès son amie et mécène représentée en indienne.

Cependant ces œuvres vont rapidement être perçues comme faisant preuve d’un conformisme pictural qui confine au folklore. Même les artistes de la mouvance muraliste dénoncent ce langage allégorique et symbolique qui se voulait moderne et qui est archaïque, un art qui se voulait subversif et qui est devenu officiel.

On jalouse Diego, riche et célèbre, on lui reproche de vouloir « épater la galerie » on le moque, on le caricature, on le maltraite. Connu pour son travail de muraliste, il a pourtant réalisé quelque 2 500 peintures de chevalet, art pourtant réputé bourgeois en son temps.

Frida Kahlo

L’art de Frida est à l’opposé de celui de Diego. C’est une écriture intérieure, intime.

D’abord, elle est autodidacte, mais elle lit beaucoup et sa culture est vaste. Elle admire Bruegel et Bosch, Goya et Van Gogh, le Douanier Rousseau et Modigliani (le tableau représenté sur l’affiche de l’exposition en témoigne).

Elle ne peint  que de petits formats qui constituent un récit autobiographique. Ce choix n’en est pas un,  puisque souvent clouée dans son lit ou dans une chambre, elle ne peut guère peindre autrement ou autre chose.

Sans compromis, elle aborde aussi bien ses traumatismes physiques (opérations à répétition, fausses couches) que sa relation complexe avec Diego l’infidèle ou encore sa bisexualité.

En 1950 elle écrit : « Mes tableaux sont l’expression la plus franche de moi-même. Je suis le motif que je connais le mieux ».

Elle échappe aussi à la souffrance par l’écriture. La correspondance qu’elle échange avec de nombreux amis en témoigne.

On peut résumer sa vie en regardant quelques tableaux

Mes grands-parents, mes parents et moi (1936) Mo Ma New York

Mes grands-parents, mes parents et moi (1936)
Mo Ma New York

Ma nourrice et moi (1937) Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Ma nourrice et moi (1937)
Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Nourrice absente de sa tâche, tout comme l’était  sa mère et un bébé ne prêtant aucune attention au lait qu’on lui

Présente. Mais la nourrice est indienne, c’est une sévère idole olmèque et le bébé boit au sein de la tradition mexicaine.

Dona Morillo (1937) Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Dona Morillo (1937)
Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Hôpital Henry Ford (1932) Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Hôpital Henry Ford (1932)
Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Parsemée d’épreuves traumatisantes, sa vie constitue la trame de son œuvre. Toute sa vie elle va essayer d’enfanter, mais chaque grossesse se termine par une fausse couche.

La colonne brisée (1944) Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

La colonne brisée (1944)
Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Elle s’y représente seule, debout au milieu d’un paysage désertique. Elle porte un corset médical laissant apparaître sa poitrine nue, tandis que le bas du corps est couvert d’un drap blanc. Le milieu du buste est coupé en deux par une colonne architectonique qui soutient sa tête et représente sa colonne vertébrale. Sa peau est constellée d’une multitude de clous. Cependant, le visage de l’artiste reste stoïque. Elle se représente toujours de trois quarts, yeux noirs, regard sévère, expression fière. Ses sourcils sont des ailes de corbeaux. Elle est maquillée. Sa coiffure est élaborée. Mais il arrive que le masque se fissure. Ici le visage est noyé de larmes.

Portrait avec le portrait du Docteur Farill (1951) Collection particulière

Portrait avec le portrait du Docteur Farill (1951)
Collection particulière

Elle se peint ici avec son médecin auquel elle rend hommage.

Autoportrait au singe (1945) Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Autoportrait au singe (1945)
Museo Dolorès Olmedo, Mexico, Xochimilco

Elle se représente toujours de la même façon. On la voit posant sans concession, les gros sourcils noirs en aile de corbeau, un soupçon de moustache. Elle est toujours soigneusement parée comme une image populaire ou comme une vierge laïque, entourée souvent de singes ou de symboles divers.

Frida devait apprivoiser la souffrance, la solitude, elle a voulu aussi apprivoiser la mort. Dans la culture mexicaine la mort n’est pas un sujet tabou. Chaque année la fête de la mort est célébrée avec force réjouissances : des fleurs à profusion, des bougies, des squelettes en papier mâché et des sucreries. Frida y fait sans cesse référence « Pensendo en la muerte ».

Le soleil et la vie (1944) Collection particulière

Le soleil et la vie (1944)
Collection particulière

L’œuvre confronte deux symboles. Dans un cercle Diego représente le soleil et son énergie vitale. Au second plan un paysage inquiétant désigne Frida, assimilée à des bulbes vulves à l’intérieur desquels la vie est impossible.

Étrange histoire d’amour, dans ce couple légendaire, qui a exploré toutes les formes de la déraison, mais qui se construit et s’exprime par la peinture, à travers une œuvre à la fois dissemblable et complémentaire. Sur fond de révolution, de drames, leurs toiles fascinent autant qu’elles dérangent.

Mais aujourd’hui, ceux qui se pressent à l’Orangerie viennent surtout pour Frida, devenue un symbole pour les féministes, les homosexuels, la culture pop, etc.

Maryse Verfaillie

Bibliographie

Frida Kahlo Diego Rivera, L’art en fusion – Musées d’Orsay et de l’Orangerie /Hazan