Le Maître-Loup (Gwénaëlle Kempter)
Editions Plaisir de Lire, Lausanne, 2009, 150 pages.
Le Canton du Valais est connu en Suisse et à l’étranger pour son microclimat qualifié de « méditerranéen ». Les sites internet promouvant le tourisme dans cette région alpine ne manquent jamais de souligner l’exceptionnalité du climat valaisan, qui peut vanter, en été comme en hiver, une présence presque constante de soleil. Les genevois connaissent les bienfaits hivernaux des escapades dans les montagnes valaisannes. Quand la grisaille domine les côtes du Lac Léman, il suffit de prendre le train en direction du Valais pour retrouver le ciel bleu et le soleil.
Le paysage qui s’offre au voyageur est dominé par les vignobles en terrasse, grimpant sur les pentes des deux versants de la vallée. La plaine, arrosée par le Rhône, est parsemée d’abricotiers, un produit labellisé « du terroir ».
Le livre de Gwénaëlle Kempter est un roman. Quelques indices nous suggèrent que l’auteure a choisi son Valais natal pour situer son premier ouvrage. Elle ne dévoile pas la période dans laquelle son histoire se déroule, mais il est clair qu’Aleksei, protagoniste de ce « thriller écologique », comme le petit éditeur aime à qualifier ce roman, est un de nos descendants. Il n’est pas forcément attachant ; il peut se révéler très cynique et dur, à l’image de l’environnement qui l’entoure tout au long de son errance.
En effet, à l’heure où les scientifiques et les médias nous alertent sur l’augmentation de la température due aux changements climatiques, Aleksei nous plonge dans environnement dominé par la blancheur de la glace et de la neige, signes précurseurs du début d’une nouvelle ère glaciaire, d’un « Ordre du Chaos », comme Aleksei la qualifie. Il est une des rares personnes qui erre au cur ce monde hostile, dans lequel le nomadisme n’est pas un choix de vie, mais une simple question de survie. Pourtant, on devine que cet espace était autrefois habité ; grâce à la présence de maisons désertées et en ruine. Mais ces ancêtres, qui, on s’en doute bien, ne sont autre que nous (hommes du XXe siècle), ont provoqué cette catastrophe écologique à laquelle Aleksei doit faire face.
Désormais, c’est l’instinct qui le guide dans ses choix de déplacement, dans ses actions, dans sa recherche d’abris et de nourriture. L’intrigue se tisse autour de l’être humain en voie d’extinction, menacé par les animaux et la nature. Une nature bien différente de celle qu’on connaît dans les Alpes valaisannes : les vignobles et les abricotiers ont laissé la place aux lichens. Les rennes, les loups et les ours prennent possession des lieux. Dans un monde où bêtes et hommes se confondent ; les rares rencontres d’Aleksei avec ses semblables se transforment souvent en cauchemar. Mais il y a toujours une exception…
Cristina Del Biaggio