Environ 200.000 km2 et 12 millions d’habitants. Population en croissance rapide et forte émigration : émigration du travail à destination de la France et aussi du Canada et des Etats-Unis. Emigration de commerçants vers l’Afrique du centre et de l’ouest. Rôle économique importants des remises des émigrés. La ville de Dakar est devenue une grosse agglomération (2,5 millions d’habitants).
Le Sénégal constitue un des carrefours importants de l’Afrique : c’est le point le plus occidental du continent africain. Dakar se situe à environ 15° de lat. nord. Climat de type intertropical avec des pluies en saison chaude (à Dakar de juin à octobre). Un gradient des pluies qui va de 300 mm au nord sur la frontière de la Mauritanie, à 1500 mm au sud sur la frontière de la Guinée-Bissau, donc d’une végétation steppique à une végétation forestière. En l’absence de tout relief important, c’est le climat qui détermine les oppositions régionales. Autre influence, celle de l’Atlantique. Le littoral est bordé par le courant froid des Canaries, très favorable aux poissons.
Du point de vue ethnique, une population (ou une ethnie) domine : les Wolofs. Leur langue est comprise à peu près partout et sert de langue de communication. Dans la péninsule du Cap Vert où se trouve Dakar, la population d’origine est celle des Lébous, qui parlent wolof. Autres ethnies, les Serer, les Peuls, les Mandingues et en Casamance les Diolas. Pour le propos qui nous intéresse, retenons l’opposition entre les peuples de la savane qui historiquement furent à l’origine de constructions politiques très hiérarchisées et commandant des surfaces étendues (tels les Wolofs) et les peuples de la forêt, atomisés, où l’horizon politique ne dépasse guère le village, tels les Serer et les Diolas. Ces derniers furent les seuls à adopter le christianisme, les Peuls, les Wolofs sont depuis longtemps islamisés. Le système des confréries y est particulièrement développé.
Le Sénégal et le monde extérieur.
Le contact avec les Européens est beaucoup plus tardif que celui avec le monde arabo-musulman. Islamisation précoce. Au large du Sénégal, les Portugais arrivent aux Iles du Cap Vert, alors totalement désertes au milieu du 15° siècle. Jusqu’au 18° siècle, compétition entre Portugais, Français, Anglais. Colonisation de comptoirs littoraux, à l’embouchure des fleuves, en vue de les remonter pour commercer avec l’intérieur (on cherche l’or, les épices mais aussi les esclaves, dont l’île de Gorée devient un centre d’expédition vers l’Amérique). Les Français s’installent à St Louis dès 1638 ; les Anglais sont en Gambie et les Portugais en Casamance. Puis c’est au 19° siècle la seconde phase de la colonisation : conquête du Sénégal par les Français entre 1854 et 1865. Dakar devient la capitale de l’AOF, et St Louis la capitale du Sénégal. L’indépendance du Sénégal est acquise en 1960.
Le carrefour alimentaire
Des nuances climatiques découlent certains traits de l’approvisionnement alimentaire : le blé est interdit par l’absence de saison froide. Le Sénégal est partagé entre le mil et le riz. Mil dans le nord, localement une céréale à grain très fin, le fonio, et riz dans le sud En Casamance : le riz des « Rivières du sud » est un riz local, sans lien historique avec le riz d’Extrême Orient. Le golfe de Guinée est une des grandes zones d’origine des plantes cultivées. Du temps de la colonisation, l’Indochine fournit du riz (sous forme de brisures).
La présence d’une société européenne relativement nombreuse introduit le blé sous forme de pain. Le pain est très apprécié des Sénégalais et se répand, parfois comme un aliment de luxe (boulangers itinérants dans les pays de l’arachide, après la récolte, car on dispose d’argent à cette saison). Pour l’huile, le pays est partagé entre l’huile d’arachide (cette plante est devenue la grande culture commerciale) et l’huile de palme dans le sud.
Pas de vigne, des arbres fruitiers tropicaux, locaux mais pour beaucoup introduits à partir d’Asie ou d’Amérique : manguier, papayer, baobab (pain de singe) ; agrumes, bananier, goyavier, sapotillier. Mais pas d’arbres tempérés, toujours faute de saison froide. En revanche, les légumes d’origine tempérée sont à leur place (choux, carotte, pomme de terre, aubergine. Depuis quand ?) à côté de la banane plantain, de la patate douce, du manioc et aussi de légumes tropicaux tels l’aubergine amère dite diakhaté, les gombos (qu’on trouve aussi en Amérique), et un haricot niébé, dont on utilise aussi les feuilles. La tomate est partout présente, mais aussi en concentré sous forme de boîtes de conserve importées : un des effets de la Politique agricole Commune de l’Union Européenne est de concurrencer les produits agricoles locaux et parfois de les éliminer ; On peut faire la même remarque à propos du lait en poudre.
Les protéines animales sont fournies par le poulet et lors des fêtes par le mouton et la chèvre ; on tue le mouton pour la tabaski (fête du sacrifice). Naturellement pas de porc chez les musulmans (et peu chez les chrétiens très minoritaires) Parfois une certaine exception pour le phacochère, voisin du sanglier. Les Peuls, qui ont des troupeaux de bœufs les utilisent beaucoup pour les produits laitiers et peu pour la viande. La consommation de viande grillée sur la braise vient d’une influence arabo-musulmane. D’une manière globale, la consommation de poisson, traditionnelle sur la côte, : progresse vers l’intérieur, à cause de son bon marché et du développement des transports par camionnettes équipées pour conserver de façon relativement convenable le poisson sous des blocs de glace. Le poisson repousse le mouton ! En Casamance, on fait griller les huîtres des palétuviers de la mangrove. Un gros mollusque, le yète, est séché puis utilisé par petits morceaux comme condiment. Beaucoup moins local mais très répandu, l’usage du « bouillon Kub/Maggi » comme condiment. Encore un apport de l’Europe !
En matière de boissons, le vin de palme dans le sud, boisson légèrement fermentée issue de la sève de palmier et la bière de mil. Le thé à la menthe est une boisson très appréciée venue d’Afrique du nord par le Sahara. Mais on aime beaucoup la bière, produite localement (marques Flag et Gazelle). En outre, il faut mentionner des boissons locales. Le Kinkeliba est une infusion d’une feuille d’un arbuste, le Combretum Micrathum Don. Les feuilles, retenues par une sorte de ruban végétal, sont vendues en longs fagots.
Le bissap est une infusion, servie chaude ou froide de fleurs d’hibiscus. C’est l’équivalent ducarcadet des Egyptiens. Cette fleur provient elle aussi d’un arbuste, Hibiscus sabdariffa, dont il existe une variété à fleurs rouges et une variété à fleurs blanches. Elle était dite autrefoisoseille de Guinée, peut-être parce qu’on utilise les feuilles acides du bissap blanc comme des épinards.
Le terme de Guinée doit être pris dans une acception géographique large. On appelait autrefois Guinée une très vaste contrée de l’Afrique occidentale. C’est ce qu’indique encore la dénomination de Golfe de Guinée. Dans une époque où l’origine des animaux ou des plantes était peu connue, on utilisait le terme de Guinée. En anglais ce que nous nommons cochon d’Inde est appelé guinea-pig et ce que nous appelons pintade (l’oiseau peint des Portugais) est nommé guinea-fowl par les Anglais. La monnaie dite guinea par les Anglais, maintenant monnaie de compte mais autrefois monnaie d’or devait son nom à l’or de Guinée.
Manières de table
A Dakar, notre voisin et ami, au demeurant universitaire et de surcroît géographe nous avait gratifié d’une sortie violente contre nos manières de tables de blancs : il était excédé par tout ce cérémonial, par cette succession de plats dans un ordre déterminé (entrée, plat principal, fromage, dessert) par notre souci de disposer soigneusement les couverts, par l’impossibilité de quitter la table pendant un repas quand bon vous semble…Toutes ces contraintes lui paraissaient insupportables.
C’est qu’au Sénégal la notion de menu n’existe pas. Un repas se compose d’un plat, servi dans ce qu’on appelle un bol et qui peut être une cuvette émaillée. S’il y a de la viande, le maître de maison en fait des morceaux et chacun mange avec sa main droite en se limitant à la fraction du plat qui est en face de lui. S’il arrive un convive imprévu, on se serre pour lui faire place. Dans toutes les catégories sociales on mange les mêmes plats. C’est la plus ou moins grande abondance de viande ou de poisson qui fait la différence.
La cuisine
Si l’on met à part les viandes à la broche, préparées lors des grandes fêtes ou consommées dans la rue, dans les dibiteries les préparations sont mijotées dans une marmite, sur un « fourneau » à charbon de bois, ou sur un réchaud à gaz pour les plus fortunés. Il s’agit de viande ou de poisson, accompagnés de légumes, de riz ou de mil.
Il ne s’agit pas ici de concurrencer les livres de cuisine, mais de mentionner le plat qui est devenu un emblème du Sénégal, le thiéboudienne, parfois orthographié très différemment. C’est un plat de riz au poisson. Le meilleur poisson est le thiof ou mérou bronzé, il est accompagné de poisson séché, de yète, de légumes (chou, carottes, potiron, aubergine, manioc) et de riz.
Un des plats les plus renommés est le mulet farci à la saint louisienne. On retire l’arête centrale et on recoud, non sans avoir farci (ail, oignon, piment, persil, tomates, mie de pain) Il est cuit au court bouillon avec des légumes (carottes, navets, pommes de terre. ). On trouvera plus bas la recette du poulet yassa.
En revanche, pas d’entrées. Ce qui en rapproche le plus, les pastels, petits chaussons ou beignets fourrés à la pâte de poisson. C’est un plat de fête, mais aussi une gourmandise servie le long des rues.
Très peu de desserts, plutôt des fruits.
Poulet Yassa
Pour 1 poulet coupé en morceaux :
8 citrons verts
4 gousses d’ail, 8 oignons
1 petit piment fort, sel, poivre,
5 cuillères d’huile d’arachide
4 cuillères à café de moutarde, ½ verre d’eau.
– Faire mariner la veille ou 2h avant, le poulet coupé en morceaux avec les oignons émincés, jus de citron, la moutarde, sel, poivre, piment coupé en morceaux et 2 c. d’huile et bien mélanger.
– Faire griller légèrement sur la braise les morceaux de poulet égouttés (de loin la meilleure solution), ou griller à l’huile fumante 5mn de chaque côté.
– Egouttez les oignons et mettez-les à dorer dans le reste de l’huile, laisser cuire doucement sans colorer puis ajouter la marinade et quand elle est chaude les morceaux de poulet. Versez alors l’eau, couvrez et laissez mijoter une ½ heure environ jusqu’à ce que le poulet soit cuit.
– Servez avec du riz blanc (« petit riz »).
Michel Sivignon