Carte postale de Radicofani (Italie) : dans les pas de William Turner
Photo 1 : La fontaine de la poste médicéenne et la forteresse de Radicofani © RCourtot 2011

Photo 1 : La fontaine de la poste médicéenne et la forteresse de Radicofani © RCourtot 2011

Radicofani, 28 mai 2011

Celui qui suit la via Cassia entre Sienne et Bolsena aujourd’hui ne sait pas que, lorsqu’il passe à l’est du monte Amiata, il emprunte un « raccourci », un itinéraire tracé dans la vallée de la petite rivière Paglia lors de l’aménagement des routes « nationales » du nouvel Etat Italien à la fin du 19e siècle. Il abandonne donc pour une quinzaine de kilomètres l’itinéraire originel de la voie romaine, devenue ensuite via Francigena au Moyen âge (la « route des Français »), qui escaladait les collines pour passer par Radicofani, gros bourg perché surmonté d’un rocher et d’une forteresse (il s’agit d’un neck volcanique pléistocène dont le sommet est à plus de 900m d’altitude).

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« En Bourgogne, il n’y a pas de touristes »
Affiche sur les murs du métro Gare d’Austerlitz, 10 avril 2011.

Affiche sur les murs du métro Gare d’Austerlitz, 10 avril 2011.

Cela devait arriver. La boucle est bouclée. Sur une affiche, ici gare d’Austerlitz, on annonce la grande nouvelle « En Bourgogne il n’y a pas de touristes ». Pas de touristes, mais seulement des randonneurs, des marins d’eau douce, des amoureux, des cyclistes, des oenophiles etc.…

Dans cette province bénie des dieux, l’espèce honnie a disparu. Pour confirmation on peut s’adresser à www.pasdetouriste.com

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Carte postale d’un habitat sur cour (Abidjan)
Un espace-cour à Treichville, quartier populaire d’Abidjan Crédits : Bénédicte Tratnjek, 2009

Un espace-cour à Treichville, quartier populaire d’Abidjan
Crédits : Bénédicte Tratnjek, 2009

Un espace-cour au cœur de Treichville, quartier populaire d’Abidjan. Atypique par rapport à d’autres formes d’espaces-cours de par le monde : la première impression que laisse l’habitat sur cour reste son aspect hétéroclite et désordonné. Le linge flotte sans discontinu au centre de la cour, à proximité du puits qui recueille les eaux de pluie. Autour de cet espace central, des canapés miteux sont installés sous des toits en tôle usée qui permettent de s’installer dans l’espace-cour par temps de pluie comme par grand soleil. Sous la tôle, des rigoles récupèrent les eaux et les entraînent dans la rue sans système de tout à l’égout. Elles s’amasseront dans les autres saletés de la rue de Treichville. A l’intérieur de l’espace-cour, les canapés de récupération sont accolés aux murs peints de couleur vive, mais décrépis. Derrière les murs, des pièces séparées qui accueillent des familles nombreuses. Elles se sont dotées, depuis les années 1980, de cuisines sommaires, et de postes de télévision reliées par des branchements informels au câble. L’intérieur contraste avec l’espace-cour : la lumière y est absente, les murs qui donnent sur la rue sont dotés seulement de petites fenêtres voilées par des rideaux épais. Le tout forme l’habitat sur cour, un espace clos qui ne donne sur la rue que par une petite porte sommaire, en bois, délabrée, mais qui marque nettement le seuil d’entrée entre espace public et espace privé partagé. Rien ne permet d’observer ce qui se passe à l’intérieur depuis la rue : on passe de la rue à l’espace-cour par cette seule porte. Une sorte de « sas » qui permet d’être observé par tous les habitants qui se partagent l’espace-cour, qui est bien plus vivant que l’intérieur des pièces. « Sas » non par la forme ultra-sécurisée, mais par la surveillance accrue : entrer dans l’espace-cour demande d’être identifié (et donc accepté) par tous les habitants, et non pas seulement celui que vous visitez. Pour dresser le portrait de l’habitat sur cour, il manque à la photographie le son : l’habitat sur cour n’est pas un lieu des plus reposants. Le bruit y est constant, entre les jeux des enfants et les « palabres » des adultes.
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Carte postale de Trani (Pouilles, Italie)
Cliché Roland Courtot, septembre 2009

Cliché Roland Courtot, septembre 2009

Trani campe au loin une silhouette familière sur la côte des Pouilles : une église avancée sur la mer, une agglomération remparée sur un site perché et dominant un port abrité par des jetées. L’église, blanche du calcaire dur semblable à un marbre, est massive à sa base et close comme une église fortifiée, mais élancée pour être vue et voir au loin. Autour, le premier cercle d’habitat est celui des ruelles étroites entre les anciens palais des anciennes familles des nobles et des marchands, énormes blocs aux ouvertures parcimonieuses, qui ressemblent à des forteresses au rez-de-chaussée, mais dont les hautes façades s’ornent de quelques balcons en étage.

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Carte postale de l’hôtel Méridien (Tahiti)

Vous avez dit « paradis » ou « prison dorée » pour honeymooners ? La Polynésie française ou l’envers du décor des pratiques touristiques.

Hôtel Bora Bora Pearl Beach Resort and Spa, Bora Bora, Polynésie française Source: Caroline Blondy, 2006

Hôtel Bora Bora Pearl Beach Resort and Spa, Bora Bora, Polynésie française
Source: Caroline Blondy, 2006

Quand on imagine Tahiti et ses îles et que l’on fantasme sur une lune de miel dans ces îles du bout du monde, ce couple amoureusement enlacé dans la piscine à débordement de l’hôtel Bora Bora Pearl Beach Resort and Spa est assez archétypal. Au premier plan, la piscine reprend les formes d’un lagon entouré de plage, ici carrelée où des transats et parasols en bois exotiques et tissu beige évoquent les couleurs du sable et du bois flotté. Cocotiers et autres arbres tropicaux, rochers et massifs aux fleurs exubérantes autour de la piscine semblent vouloir nous faire croire que l’hôtel se fond dans ce paysage lagonaire. La Polynésie est une destination touristique caractérisée par la présence d’hôtels à la silhouette bien particulière mettant en scène un décor paradisiaque et luxueux. Les infrastructures se développent à moitié sur la terre et sur le lagon. La piscine est souvent au cœoeur de l’hôtel comme le montre le plan ci-dessous et symbolise souvent la limite entre terre et mer. Autour d’elle, bars et restaurants permettent de boire un verre ou de manger avec l’illusion d’être sur la plage. L’illusion se poursuit avec la seconde auréole, celle des bungalows. Sur l’image, on ne distingue que les bungalows sur pilotis. Ils avancent loin dans le lagon surplombant les eaux turquoises. Ils imitent le style architectural traditionnel du fare [1]. polynésien et sont construits à partir de matériaux essentiellement locaux. Les cloisons sont en bois et couverts de panneaux de bambous ou de nattes en feuille tressées. La charpente est chapeautée d’un grand toit en feuille de pandanus. Le plancher de ces fare est en partie vitré et peut s’ouvrir directement sur le lagon pour observer et nourrir les poissons qui viennent nicher dans le jardin de corail qui a été reconstitué artificiellement sous les pilotis. Ces fare de forme carrée ou rectangulaire montés sur des pieux en béton sont rattachés à la terre ferme par des pontons de bois.

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Carte postale de Vercelli (Italie)
La cascina Darola, commune de Trino, province de Vercelli Photo : Roland Courtot (17/09/08)

La cascina Darola, commune de Trino, province de Vercelli
Photo : Roland Courtot (17/09/08)

A la mi-septembre, sur la route provinciale des grange entre Vercelli et Trino, au nord du Pô. C’est la route des grands domaines dont les greniers à riz ont fait la fortune de leurs propriétaires, et la géométrie des grandes parcelles y déploie les couleurs jaunes du riz mûr. De loin en loin, les constructions de brique, longues et basses, des cascine étalent leurs constructions de brique rouge, et les neiges du massif du Mont Blanc semblent flotter à l’horizon nord-ouest comme un nuage immobile au dessus de la brume du matin. Les premières moissonneuses commencent à apparaître au bord des champs, mais pour l’instant ce sont seulement de grands tracteurs qui vont par deux, avec des bras articulés armés de disques, pour désherber les digues et les bords des rizières afin de préparer l’entrée des engins de récolte en action.

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Carte postale de Beaulieu-sur-mer
BEAULIEU SUR MER, Au bord de mer, Un coin fleuri N°1010 de G. Le Maître et Cie, éditeurs, Nice (collection de l’auteur)

BEAULIEU SUR MER, Au bord de mer, Un coin fleuri
N°1010 de G. Le Maître et Cie, éditeurs, Nice (collection de l’auteur)

Cette carte postale m’a été « délivrée » en « chinant » chez un petit brocanteur, dans la vieille ville de Belfort, à l’ombre du Lion.. Elle vient de Beaulieu-sur-mer et a été envoyée sous enveloppe, donc non oblitérée et non datée…Mais cela n’empêche pas de situer l’envoi au début des années trente, car c’est la grande période de la diffusion des cartes postales « colorisées », avant l’apparition des « vraies »couleurs (après la seconde guerre mondiale) Le décor est celui de la fin de la saison d’hiver sur la Riviera : sur le bord de mer endigué d’un jardin public, deux enfants (garçon et fille, 8 et 5 ans à peu près) prennent la pose pour la photo en habit marin et chapeaux de toile, chaussettes blanches. Un peu en retrait, deux femmes s’avancent : vêtements légers, chapeaux de paille-toile ( ?), canne et livre à la main, sweater sur le bras. La mode est celle des années vingt (Quel est le degré de préparation de cette « mise en scène » ? la spontanéité des « acteurs ?)

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Carte postale du Pinde (Grèce)

Le pope aux fourneaux, le barman chez les moines

 

La taverne, le pope et sa femme Photo : Michel Sivignon (juin 2007)

La taverne, le pope et sa femme
Photo : Michel Sivignon (juin 2007)

Nous fûmes dans le Pinde, « rocs inaccessibles et précipices affreux ».

A Mouzaki on nous avait dit de nous arrêter à l’hôtel de Pétrilon dont on nous garantissait le confort. On est passé devant sans le voir. Arrivés au village, on demande où manger et on nous a dit que deux km plus loin, juste après la fin de la route goudronnée, il y avait un bon restaurant. On a du bien faire 5 km au-delà du goudron sur une route déserte et on a découvert une superbe bâtisse en surplomb sur la rivière avec un grand parking et des tas de voitures. De part et d’autre de la porte des grandes couronnes mortuaires accrochées sur des piquets. Le patron est sorti pour nous dire qu’il regrettait mais que c’étaient les obsèques de son père. Il nous a conseillé d’aller juste un tout petit peu plus loin dans un village au-dessus de la route.

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Carte postale du Hoggar

Le matin du monde

carte-postale-hoggar

      Hoggar, Avril 2006.

Un paysage rudéral se répète d’instant en instant et de pas en pas jusqu’à l’obsession. Cailloux, blocs, rochers, graviers, sables et rocailles à perte de vue : rien qui fixe l’attention dans ce vide primordial, mais le regard est prisonnier d’un chaos minéral et monochrome de laves sombres et d’arène bistre, ponctué d’ombres noires. Du col de Téhen Tarit, il plonge vers le fond d’un chaudron calciné par un feu disparu et un soleil tout-puissant. Cette vision d’outre monde est une expérience du sublime : je marche sur la croûte terrestre.

Selon Hésiode, le Chaos de la cosmogonie grecque fut le premier être, qui enfanta d’abord Erèbe et Nyx, l’Obscurité et la Nuit, avant Gaïa, la Terre. “Au commencement, dit la Genèse, Dieu créa le ciel et la terre : or la terre était informe et vide et les ténèbres couvraient l’abîme”. Une même formulation des origines inaugure les deux mythes : la béance du gouffre, le défaut de lumière, l’absence de formes, le noir sans couleur. L’enfer ? “Non, me dit Maryvonne émerveillée, c’est le matin du monde”.

Jean-Marc PINET.

Miami International Airport

miami_airport

Qu’est-ce que j’attends ici?
Aéroport prêt-à-porter
Sans odeur, sans saveur, seulement propre
Dalles de plastiques brillantes. Duty free shops.
Où d’un bout du monde à l’autre, les alcools attendent dans les mêmes bouteilles,
Les cigares dans les mêmes boîtes, les parfums, les montres…
Boutiques du village planétaire.
Bourg fabriqué dont on sait tout avant d’y avoir mis les pieds
Un sas peut-être vers les paradis perdus, les eldorados
Les vagues irisées où la mer vire au turquoise
Les îlots de Key-West où Hemingway allait pêcher au tarpon.
L’Indien devant moi, casquette californienne à l’envers,
Reeboks blancs aux pieds, contemple la marque de ses chaussettes,
Satisfait.

Michel Sivignon
Miami Airport, Septembre 1996

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