Café géographique de Paris, Mardi 27 mars 2018
Café de Flore, Paris
Intervenante : Brigitte Dumortier, maître de conférences à l’Université de Paris-Sorbonne
Animateurs : Michel Sivignon, Olivier Milhaud
En préambule de ce café géo, Michel Sivignon rappelle l’Atlas des religions de Brigitte Dumortier paru en 2002 aux éditions Autrement. L’ouvrage, certes un peu ancien, pose des questions éminemment géographiques toujours d’actualité : la difficulté de quantifier et donc de cartographier le fait religieux qui explique peut-être le retard avec lequel les géographes ont étudié cet aspect socioculturel ; le problème du choix du niveau d’appartenance religieuse (la croyance, la pratique, le rattachement revendiqué, l’appartenance culturelle ?) pour cartographier ; l’importance des questions d’échelle (continentale, nationale, régionale ou encore beaucoup plus fine) pour aborder la territorialisation religieuse. Voilà trois exemples de question qu’une réflexion géographique portant sur le fait religieux se doit d’aborder.
Olivier Milhaud (OM) : Un sujet effectivement peu facile d’autant que les idées préconçues sont nombreuses selon qu’on est franco-centré ou catholico-centré dans l’analyse, alors qu’il existe une diversité considérable des ancrages des christianismes dans le monde. Une étude géographique du fait religieux est-elle vraiment possible vu le nombre des chausse-trappes statistiques, méthodologiques, d’affiliation… pour appréhender le christianisme ?
Brigitte Dumortier : Une première difficulté est liée à la définition du chrétien. Le critère le plus significatif est sans doute la déclaration d’appartenance, c’est-à-dire le fait de se sentir de telle ou telle religion. Mais en France la réflexion sur ce qu’est « être chrétien » a été limitée. Ceci pose donc le problème de la catégorisation. D’autre part on est réduit à des estimations car chaque religion, chaque Eglise va avoir tendance à gonfler le nombre de fidèles, notamment au Moyen-Orient pour des raisons politiques (pas de recensement au Liban depuis 1932 car on saurait officiellement que les chrétiens maronites ne sont plus majoritaires), sans compter les Eglises ou les confessions plus faciles à quantifier que d’autres (les archives du Vatican sont considérées comme fiables, tout comme les registres des Mormons bien sûr).