Café géographique du 21 janvier 2016

Etienne Monin, jeune docteur en géographie, agronome de formation qui vient de soutenir sa thèse intitulée « Formation agraire, nouveaux modèles agricoles et encadrements métropolitains à Shanghai »

Comment prendre en considération la durabilité des espaces agricoles chinois, dans la phase présente du développement du pays ? En référence à leur fonction alimentaire et en rapport avec l’environnement ?

En Chine, il y a une dynamique incontournable aujourd’hui : la métropolisation qui s’accompagne d’une forte hiérarchisation des villes dans l’espace régional, amenant une redéfinition des rapports entre villes et campagnes. Ces rapports sont un thème de recherche récurrent en France, qu’il s’agisse de la grille de lecture par la périurbanisation ou de la « géographie des relations » décrite dans les Suds. La question des échelles en Chine est primordiale pour comprendre les nouveaux agencements ville-campagne, en particulier ceux des régions métropolitaines en formation, et interpréter les interactions des aires urbanisées avec leurs périphéries agricoles et rurales. On est amené à s’interroger sur la façon dont fonctionnent ces espaces au plan des activités et des ressources qu’elles mobilisent, comment le développement urbain rejaillit localement, et quelles spécificités supportent les activités agricoles, à l’intersection de l’alimentation et de l’environnement.
À titre d’exemple, le delta du Yangzi, la région la plus développée de Chine, forme une mégarégion urbaine regroupant 100 millions d’habitants sur 100 000 km2, le cinquième de la superficie de la France. Les densités rurales y dépassent couramment 500 hab./km2.La municipalité de Shanghai, en son centre, couvre l’équivalent de la moitié de la superficie de l’Ile de France – 6300 km2 – pour une population double – 23 millions d’habitants. Les espaces agricoles y représentent le tiers de cette superficie. Dans cette trajectoire, le delta manifeste un archétype des schémas de peuplement de la civilisation han, associant le rayonnement économique de ses centres urbains à une occupation agraire intensive. Après avoir été un foyer de domestication du riz au Néolithique, le delta s’est affirmé après le Ve siècle ap. J.-C. comme le pôle majeur d’échanges marchands en même temps que l’émigration des populations han de Chine du Nord poussait à une colonisation systématique des terres du delta et une extension des cultures par les aménagements hydrauliques.

Aujourd’hui, le fait urbain s’y affirme de manière incontournable. Il conduit à reposer le lien e l’agriculture avec l’alimentation – l’approvisionnement des villes – et l’environnement à plusieurs niveaux : les impacts physiques de l’urbanisation et des infrastructures ; les enjeux d’interdépendance avec le milieu, sous le jour de la ressource hydrique, de sa dégradation et de sa régulation ; l’adaptation des systèmes agricoles productifs, .du point de vue du contexte de l’insertion au marché urbain.

Le propos se tiendra en trois points :

– Le rappel de l’importance du monde agricole en Chine et les héritages de la période collectiviste dans la trajectoire environnementale actuelle

– La construction environnementale en Chine comme un fait saillant des discours et des pratiques du gouvernement central, accompagnant la conception actuelle de mettre en place un changement du mode de croissance. De ce point de vue là, il y a une certaine convergence, dans ces contextes métropolitains, entre la Chine et les pays plus anciennement industrialisés, et ce d’autant plus depuis les récents accords de Paris (COP 21).

– La manière dont l’agriculture répond à cette urbanisation dans ses fonctions et dans ses interactions avec les milieux.

Il y a plusieurs manières de décrire l’espace chinois (avec néanmoins la permanence du dualisme Est/Ouest). La première serait de diviser le territoire en 4 types d’environnements : l’aire côtière orientale incluant la plaine du Nord, et les reliefs tourmentés du Sud, la Mandchourie (espace sibérien) au nord-est, les déserts d’Asie centrale (Mongolie Intérieure et Xinjiang) et les hauts plateaux Tibétains. 90% de la population se concentre dans les provinces littorales. La région littorale chinoise représente la moitié du total mais concentre 90 % de la population. C’est en effet l’espace de civilisation où les premiers grands foyers urbains se sont développés à l’âge du Bronze et ont commencé de diffuser, notamment depuis la basse vallée de la Wei et les rives du Fleuve Jaune à partir de 2000/1000 av. J.-C. C’est un peuplement de masse caractéristique des civilisations hydrauliques, aménageant très tôt les bords du fleuve pour essayer de contrer les crues spectaculaires et dévastatrices du Yangzi. On y retrouve les techniques d’aménagement agraires apportées des plaines du Nord, qui sont alors les principaux foyers de population Han, avec déjà une forte polarisation de l’espace par les villes. La deuxième manière de lire l’espace chinois serait celle dit des « 9 régions agricoles », suivant la distribution climatique latitudinale et les paliers topographiques longitudinaux du dispositif intérieur chinois. Elle traduit la forte disparité dans le potentiel des milieux : distribution des ressources hydriques, fertilité des sols, rythmes climatiques. Elle oppose agricultures du nord du fleuve Yangzi, de type céréales sèches et irriguées, à la riziculture de la zone subtropicale, au sud du fleuve Yangzi. Concentrées dans la moitié (quart) Est, les ressources agricoles jouent d’un déséquilibre, la terre étant plus abondante au nord et l’eau au sud. Enfin, le troisième modèle serait celui de William Skinner (anthropologue du XX° siècle, spécialiste d’analyse régionale ; voir : https://content.lib.washington.edu/skinnerweb/, divisant la Chine en macro régions géographiques, respectant une répartition par grands bassins hydrographiques adossés à une structuration par les réseaux de villes interconnectés mais disjoints (il y en aurait ainsi 9). Cette structuration offre une clef géohistorique reliant la répartition des densités démographiques et celles des semis de villes actuelles aux formes d’occupation intensive de l’espace préexistantes.

Le fonctionnement de l’agriculture chinoise a soutenu, avec les cultures céréalières et la riziculture (la « civilisation du végétal ») de très hautes densités de population. Au début du XIX°, il y a un début de saturation, associée à une stagnation de l’économie. Après la révolte des Taiping (1851-1864), cause d’une saignée démographique dans le Centre-Sud, le croît démographique d’ensemble est ralenti par les troubles qui se succèdent, jusqu’à l’invasion de l’armée japonaise et la guerre civile menée entre nationalistes et communistes. Les premières décennies du régime communiste (1949) sont une période d’explosion démographique, jusqu’à l’adoption du contrôle des naissances au cours des années 1970. Ce boom démographique intervient essentiellement dans les campagnes, qui rassemblent plus de 80 % de la population, le tout dans le contexte de l’organisation collectiviste de la société où les tentatives de modernisations de l’agriculture vont servir le projet de l’état chinois dans la course au rattrapage des puissances industrialisées. L’idéologie Maoïste et ses principes ont ainsi eut un impact croissant sur l’environnement, avec notamment une idéologie du progrès, qui va considérer que la domination de l’homme sur la nature est sans limite. Cette idéologie est alors associée à une mobilisation de masse, comme celle du Grand Bond en Avant (1958-1961).

Après 1978, une autre forme d’équilibre s’instaure avec la politique de réforme et d’ouverture, qui fait intervenir la décollectivisation et la libéralisation économique, défaisant les monopoles d’État. La chine devient alors une économie d’exportation. Mais à ce renouveau s’ajoute une nouvelle concomitance entre un fait urbain et industriel effréné et une dégradation constante et croissante de l’environnement.

Un des enjeux fondamentaux concernant l’environnement chinois est celui de la terre, qui se résume dans cette expression selon laquelle il y a « beaucoup de gens pour peu d’espace ». En effet, la Chine dispose de 9 % des terres arables pour 20 % de la population mondiale ; la disponibilité du sol devient alors un véritable enjeu. De plus, on observe une rapide diminution de cette déjà faible surface due à une urbanisation massive. Dans le delta du Yangzi, ce phénomène du recul de la terre est majeur et entraine de nombreuses modifications paysagères : les chefs lieux de bourgs qui polarisent les espaces ruraux ne sont alors plus que très faiblement agricoles et se transforment en petites ville économiquement dynamiques.

Aujourd’hui, la Chine dispose de 130 millions d’hectares, mais depuis 2001, le gouvernement a fait rentrer en vigueur une ligne rouge, qui fixe une limite : 120 millions d’hectares doivent être conservés au niveau national. Cette politique, visant à contrôler la conversion des terres, est intervenue alors que le compte des terres cultivables avaient atteint 90 millions ha à la fin des années 1990, avant qu’un nouveau recensement en acroisse le nombre. Au cœur de cet enjeu de la terre, on retrouve une véritable dialectique entre le local et le national puisque le développement foncier est du ressort des gouvernements locaux. Un véritable bras de fer s’engage alors entre les gouvernements locaux, qui ont besoin du foncier pour développer leur territoire, et le gouvernement central qui montre la volonté de plus en plus grande de préserver l’environnement. Le 11e plan quinquennal marque en effet l’affirmation de nouveaux slogans au cœur de la doctrine de l’état-parti, avec une direction majeur, celle du Développement Durable. Une véritable mise en scène de la durabilité devient alors le fil rouge de la politique du Parti, nettement visible en 2010 lors de l’Exposition Universelle de Shanghai, qui avait pour slogan « Une ville meilleure pour une vie meilleure ». Il y a eu une progressive mise en place d’une gouvernance environnementale, dont les problématiques peuvent être mises en parallèles avec les questions de l’alimentation.

Pendant la période Maoïste, la question alimentaire dans les campagnes est reliée à l’extraction des surplus pour nourrir les villes dans le cadre d’une économie planifiée et financer par leur exportation l’industrialisation du pays. Les réalisations de la période collectiviste amorce la révolution verte en procédant à une intensification des cultures menée d’abord avec une politique de Grands Travaux. La mobilisation de masse y contribue, non sans catastrophe : au moment du Grand Bond en avant (1959-1961), elle engendre une profonde désorganisation des paysans, à l’origine d’une famine causant plus de 30 millions de morts. Dans les décennies qui suivent, la croissance régulière des rendements permet au pays d’améliorer sa capacité d’autosuffisance alimentaire, malgré l’engorgement rural et le faible taux de mécanisation. À partir des années 1990, la croissance continue de la demande alimentaire qui accompagne l’urbanisation fait prévoir des scénarios catastrophiques de déficit de la balance alimentaire nationale que la Chine compenserait par des importations sur le marché mondial, provoquant une tension pouvant aller jusqu’à une crise agricole mondiale. Lester R Brown popularise ce pronostic, dans son ouvrage Qui nourrira la Chine ?, soulignant l’enjeu du niveau d’autosuffisance vis-à-vis de la sécurité alimentaire du pays. Le géant chinois a bien eu recours aux importations de manière accrue, devenant dans les années 2000 le premier importateur de soja, de maïs et de produits à destination industrielle, tout en soutenant à l’intérieur des productions stratégiques comme le riz et devenant un exportateur incontournable sur les marchés horticoles de niche (fruits, légumes, noix). L’évolution de la balance agricole alimentaire suit aujourd’hui la transition alimentaire du pays, caractérisée par la diversification alimentaire et la hausse du régime carné. Les importations massives de protéines végétales sont ainsi destinées aux productions animales. Le stade actuel de la transition a à voir à la fois avec la demande urbaine toujours plus importante et la multiplication des flux pour y répondre dans le contexte de marché.

Ce renouveau alimentaire se joue dans l’apparition d’une puissante industrie agro-alimentaire comme dans le nombre croissant de scandales alimentaires accompagnant le productivisme agricole. La problématique sociale de l’alimentation se déplace de l’enjeu de l’abondance – la sécurité alimentaire – à celui de l’assurance – la sûreté alimentaire (en 2013, des centaines de porcs morts sont retrouvés dans la rivière Huangpu, en fait victimes d’une épidémie et dont les éleveurs se débarrassent en l’inexistence de sociétés d’équarissage, on retrouve également du lait, des légumes, contaminés aux métaux lourds..)

« Constructions » environnementales et alimentaires suivent à cet égard des évolutions parallèles. Elles associent l’action normative de l’État pour ériger un système légal et administratif de contrôle et de surveillance, l’inscription sociétale de leur enjeu dans les traitements médiatiques et les mouvements d’opinion (avec le rôle des organisations non gouvernementales), l’emprunt à des standards et des pratiques internationales de régulation – c’est le cas de la promotion de l’« économie verte » de la part de l’Etat comme des labels de consommation alimentaire associés à la protection de l’environnement et des consommateurs. Ces représentations qui s’ancrent dans la société urbaine contemporaine s’affrontent aux logiques antagonistes des producteurs, des réseaux marchands, des autorités locales des campagnes, sommées de s’adapter au développement métropolitain pour en récolter quelques fruits.

Figure 1. La Une du Phœnix Weekly, magazine d'information du Guangdong, titrant sur le « style de gestion chinois » du contrôle de la qualité du lait avec cette question, « Le lait vendu est-il sain ou pas ? » Source : Zhao et Ceng, 2013, « Jianguan de daijia – niunai zhen de bu anquan ma ? » [Le prix de la surveillance – le lait de vache est-il vraiment dangereux ?], Fenghuang zhoukan (Phœnix Weekly), n° 5, paru le 24 février 2013, URL : http://blog.sina.com.cn/s/blog_4b8bd1450102ebzt.html, consulté le 20 février 2014.

Figure 1. La Une du Phœnix Weekly, magazine d’information du Guangdong, titrant sur le « style de gestion chinois » du contrôle de la qualité du lait avec cette question, « Le lait vendu est-il sain ou pas ? »
Source : Zhao et Ceng, 2013, « Jianguan de daijia – niunai zhen de bu anquan ma ? » [Le prix de la surveillance – le lait de vache est-il vraiment dangereux ?], Fenghuang zhoukan (Phœnix Weekly), n° 5, paru le 24 février 2013, URL : http://blog.sina.com.cn/s/blog_4b8bd1450102ebzt.html, consulté le 20 février 2014.

Finalement, l’entrée par les questions d’alimentation chinoise pousse à s’intéresser à la société métropolitaine en tant que moteur de nouveaux rapports villes-campagnes. La métropolisation accentue au plan de la croissance économique la fracture entre les villes et les campagnes, tout en générant de nouvelles interactions autour de l’alimentation et l’environnement. Ces deux dimensions sont au cœur des recompositions du monde agraire.

Questions :

Aujourd’hui, il y a d’un coté la mise en évidence d’une fracture ville-campagne, et d’un autre coté, un élargissement d’une sorte d’espace mixte, baptisé du terme indonésien de « desakota », dans les représentations actuelles. Quelle compatibilité existe t-il entre cette fracture et cette sorte de mixité qui s’établit sur des zones assez large ? Quelle valeur peut-on donner à cette fabrication d’une zone mixte ?

La fracture entre villes et campagnes s’observe différemment selon que l’on s’intéresse aux régions métropolitaines ou aux marges intérieures du pays. On retrouve avec la disposition des régions métropolitaines le modèle centre-périphérie du schéma de Skinner, où villes et campagnes manifestent la structuration d’un espace commun inscrit dans la macrorégion. En outre, dans l’organisation territoriale, la ville et la campagne sont réunies l’une et l’autre. Les régions métropolitaines actuelles correspondent en effet au cœur des macrorégions, où les densités sont maximales et où effectivement s’établit un continuum rural urbain pris dans des interconnexions de toutes sortes. Les marges traditionnelles de l’espace chinois sont les déserts intérieurs et les régions montagneuses, mais avec le développement urbain régional de nouvelles marges « internes sont apparues, celles à l’écart des régions métropolitaines, dans leur intervalle, comme dans le cas de la plaine centrale. C’est le cas par exemple de l’Anhui, traditionnellement en décalage avec le proche delta du Yangzi.

Aujourd’hui, la lecture géographique invite à lire la Chine selon un gradient entre les régions métropolitaines et les marges intérieures qui se distinguent par une nette différence de revenus (un rapport de 1 à 3). D‘autres écarts de revenus séparent parallèlement ruraux et urbains, différence accentuée par le système du Hukou : instauré dans les années 50, ce véritable passeport intérieur à d’abord été crée pour encadrer les populations agricoles, puis plus tard pour empêcher les migrations vers la ville. Cet instrument de contrôle social continue de peser sur les inégalités entre ruraux et urbains.

Dans le desakota (que l’on peut définir comme étant les aires rurales au contact avec les villes en forte croissance, se caractérisant par de fortes densités, une pluriactivité et l’absence d’exode de population), la densité de population va basiquement de 500 hab/km² au minimum jusqu’aux alentours de 1500 (en Ile de France, la densité est en moyenne de 1000 hab/km² mais en Seine et Marne, département majoritairement rural elle atteint 230 hab./km2, la densité des campagnes est de l’ordre de 80 à 100 hab./km2). Ce sont des densités qui pour nous sortent de la définition du rural.

-La mise en place de la ligne rouge a-t-elle exacerbé la concurrence entre les régions ?

C’est une politique de quota, fixant une limite de terres cultivables au plan national à 120 millions d’ha, où chaque territoire est responsable localement de conserver un quota de terre. Les possibilités de compensation interterritoriale – entre provinces, municipalités, districts, etc. – ont évolué dans le sens d’un accroissement des contraintes de régulation locales. Aujourd’hui, ce qui contribue à augmenter la quantité terre c’est :

  • Une mise en culture des territoires vierges ( en Mandchourie et dans les déserts d’Asie centrale)
  • Une mise en valeur de certains espaces pas cultivés et une occupation croissante des pentes (dans les jardins à thé des plaines du Sud et de l’Est)
  • La destruction de certains villages pour une « rationalisation de l’espace » avec la « politique des villages concentrés », c’est-à-dire la création de petits villages centraux, modernes, avec des bâtiments à étages pour optimiser l’espace, ce que l’on désigne par l’expression « d’urbanisme des campagnes ». Il intervient de manière prééminente dans les régions urbanisées, les plus développées.

Augmenter la qualité des sols certes, mais qu’en est t-il de la qualité ?

C’est vrai que les villes se sont implantées sur les terres les plus fertiles. Typiquement, l’Anhui est moins développée car les terres sont moins fertiles. C‘est une grande question pour les agronomes, d’autant plus que la Chine est déjà le 1er consommateur d’engrais au monde.

Aujourd’hui, la crise agraire désigne l’inadéquation grandissante entre la structure agraire, fragmentée dans chaque village entre les paysans détenteurs d’un hukou/permis de résidence rural, les stratégies de survie économique des ruraux qui migrent depuis plus de vingt ans en masse vers les villes pour améliorer leur revenu, et les conditions de marché qui s’imposent à l’agriculture, dans le sens de la concentration des terres et de la mécanisation. Socialement, cette crise se dessine par une désertification des villages : les actifs sont à la ville, donc seules les personnes âgées et les enfants restent au village. L’âge moyen des paysans est de 60 ans, alors même que la Chine rurale est entrée dans une dynamique de transition générationnelle : les jeunes populations qui ne sont plus rurales. La politique d’urbanisation massive menée par l’État centrale est perçue comme la solution pour lever ces contradictions.

Les contrastes sont importants entre régions. On note l’apparition d’une nouvelle classe moyenne de paysans qui vit notamment d’une possibilité de transfert des terres, depuis 2013. Il n’y a donc pas vraiment de disparition de la paysannerie en tant que telle, mais simplement un changement de contenu et de statut. Les évolutions les plus radicales sont à venir.

Des efforts locaux de restructuration sont effectués, avec une organisation en coopératives notamment, mais aussi l’apparition d’exploitations agricoles redimensionnées et de type « managériale » et une forte spécialisation.  Ce que l’on constate actuellement autour de Shanghai (et qui est clairement liée à la position de centre métropolitain), c’est une exploitation agricole de très haute intensité pour la culture des fleurs. C’est une des orientations du développement majeure de Shanghai aujourd’hui.

Au sein de cette nouvelle organisation, il faut comprendre que la croissance des mégalopoles nous aveugle et que ce sont finalement les villes moyennes, dans l’épaisseur des régions chinoises, qui croissent le plus rapidement. Ainsi, la question du développement foncier se joue dans le jeu entre les opportunités locales de développement et les cadres de contraintes plus ou moins importants des gouvernements de rang supérieur (les provinces), mais aussi avec le gouvernement central.

Compte rendu établi par Juliette Dop, augmenté et validé par E. Monin.