Le dessin du géographe, n°63
Rodolphe Toepffer (1799-1846), fut le directeur d’un collège Genevois. Il est ainsi l’auteur des Voyages en Zigzag (Paris 1844) qui relatent les excursions annuelles organisées à travers les Alpes avec ses collégiens. Il s’agit de voyages de découverte menés par un pédagogue admirateur de Jean-Jacques Rousseau. Le récit du parcours par monts et par vaux est ponctué de dessins à la plume. Il fourmille d’anecdotes cocasses, de scènes curieuses, de rencontres avec des personnages pittoresques sur le chemin ou dans les auberges, et présente les paysages traversés. La marche est à la fois une épreuve physique d’initiation et le moyen de multiplier les observations naturalistes, d’herboriser, de chercher les insectes, de discuter de la carte, d’admirer les grands paysages romantiques ou de trouver les traces de l’histoire. La géographie de l’équipe consiste principalement à suivre la carte, évaluer les distances et à identifier les points remarquables dans le paysage, à comprendre la vie des villages traversés.
Les récits sont illustrés de dessins réalisés d’une plume alerte. Ils ont été édités par Schmidt à Genève, par la technique bon marché de l’autographie (sorte de lithographie sur carton). Plus tard, les textes ont été regroupés et imprimés à Paris dans les Voyages en Zigzag, puis les Nouveaux Voyages en Zigzag (1856) assortis de quelques gravures sur bois de facture plus romantique.
L‘excursion de 1841 vers Venise, passe par la haute vallée de l’Aar et le col de Grimsel où séjourne, à ce moment, l’équipe de Louis Agassiz, naturaliste, pionnier de l’étude des glaciers. Tœpffer fait un croquis de « l’hôtel des neuchâtelois», un énorme bloc de la moraine médiane qui sert d’abris à l’équipe de recherche.
Le dessin de Tœpffer représente la langue du Lauteraarglenscher, avec des trainées de blocs alignés dans le sens de l’écoulement de la glace. Le motif central du rocher-couvercle est placé entre les trois plans du glacier et des deux versants qui encadrent l’espace : la nappe de glace est dominée par de grands versants raides sous les sommets de l’Oberland Bernois A gauche, la silhouette puissante du Lauteraarhorn (4042m) prolongée par l’arête du Schrechkorn (4078m), à droite la masse aigue de l’Eiwigsheenhorn (3329 m). Les éperons, parois rocheuses et couloirs d’avalanche esquissés, contrastent avec le détail des gros blocs de la moraine au premier plan.