Dégustation des vins d’Alsace
Guy Chemla, Professeur de Géographie et d’Aménagement à l’Université de Paris IV.

Le vignoble d’Alsace est un vignoble méconnu et mésestimé car il traîne encore une réputation de vin faible et léger. Mais d moins en moins… Car ce vignoble a fait d’énormes progrès depuis 30 ans sous la conduite de l’interprofession : négociants, producteurs et coopératives. C’est une construction humaine tout à fait originale, racontée dans le maître livre de Roger Dion (Histoire de la vigne et du vin en France).

Physiquement, ce vignoble s’étend en longueur sur 120 km entre Strasbourg et Mulhouse et il est très peu large (entre 3 et 10 km). C’est le plus septentrional des vignobles français après le Champagne mais le plus méridional des vignobles rhénans avec celui du Bade-Wurtemberg. Trois éléments sont à retenir : le versant oriental des Vosges hercyniennes ; une zone très faillée, les collines sous-vosgiennes marno-calcaires ; la plaine du Rhin, des marnes et alluvions quaternaires. Avec un climat particulier, l’ensemble des vignes est à l’abri « derrière » les Vosges, avec peu d’influence océanique, un effet de foehn qui accroît les températures et accélère la maturité du raisin. Il tombe de 600 à 800 mm d’eau par an, voire un peu plus dans le sud (900 mm). La température moyenne annuelle est de 9°C, avec 1,1 °C en janvier et 19 °C en juillet. Avec ce climat continental froid et sec, le vignoble est couvert par la neige en hiver. Le compartimentage et l’importance d’un méso-climat font que des climats locaux vont donner une très grande variété de l’exposition et de la composante du terroir (par exemple, avec la différence entre la forêt et le milieu péri-urbain), d’où un vin très typé.

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Dégustation des vins du Trentin
Soirée Vins du Trentin, à la Sorbonne, le 5 décembre 2003

Jean-Robert Pitte, animateur d’un club de dégustation géographique du vin à la Sorbonne depuis de nombreuses années, invitait en grandes pompes et avec la simplicité enjouée qui le caractérise, sa collègue italienne, G. Andreotti, à présenter les merveilleux vins du Trentin.

Conférence du Professeur Guiliana Andreotti (salle des Actes)

Professeur à l’université du Trentin (Trente), spécialisée dans l’épistémologie de la géographie culturelle et géographie du paysage.

La vigne a dans le Trentin une origine très ancienne, toujours liée à l’exploitation du sol. Elle a profondément marqué le paysage et l’expression artistique, les mœurs et les activités.

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Etats et frontières en Asie centrale.
Relier le Ferghana au reste de l’Ouzbékistan

1. Ouzbékistan. Sous le col de Kamchik, au nord
(cliché de Denis Wolff, 5 mai 2023)
(le même paysage en hiver, et en été)

Au printemps 2023, parcourant l’Ouzbékistan entre Tachkent et la plaine du Ferghana[i], je traverse en voiture la chaîne du Qurama par le col de Kamchik[ii]. J’avoue être quelque peu surpris d’effectuer ce voyage sur une autoroute – ou au moins une route à deux fois deux voies – dans une région de haute montagne. Le col culmine à plus de 2200 mètres et les sommets, visibles au fond, encore enneigés au mois de mai (à environ la même latitude que Madrid), traduisent une altitude élevée. Si cette autoroute se révèle utile au vu de l’importance du trafic (outre les nombreux véhicules visibles sur la photographie, on note la présence d’un panneau publicitaire au-dessus du lacet), sa construction a dû coûter fort cher. Or l’Ouzbékistan n’est pas un pays riche. Son PIB (produit intérieur brut) par habitant est faible (bien qu’en croissance) : selon les sources, il se situe entre le 125ème et le 168ème rang mondial, sur environ 200 Etats (celui de la France est entre le 23ème et le 39ème rang mondial).
Je me pose alors la question : pourquoi cette autoroute ? La réponse semble simple. Au sud du col de Kamchik, s’étend le Ferghana, arrosé par le Syr-Daria et ses affluents, ce qui a permis, à l’époque soviétique, la monoculture irriguée du coton (aujourd’hui les cultures sont plus variées). Cette plaine, peuplée (6,5 millions d’habitants), est vitale pour l’Ouzbékistan : sur moins de 5% de la superficie du pays, vivent presque 20 % de sa population (densité très forte), sans parler de son importance économique. Au nord du col, on atteint la capitale, Tachkent (2,6 millions d’habitants) et tout le reste de l’Ouzbékistan. Je suis sur la seule voie routière qui relie le Ferghana au reste du pays.

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Hommage à Michel Sivignon, un grand géographe français

A Michel, notre ami

A peine arrivés à Paris au mitan des années quatre-vingt-dix, Michel Sivignon et son épouse Michèle (un seul prénom pour deux) sont invités au Café géo. Nous venons d’ouvrir la saison avec Yves Lacoste, Roger Brunet, Jean-Pierre Raison, Chantal Blanc-Pamard et Hervé Rakoto Ramiarantsoa et… très vite, Michel Sivignon nous parle de la Grèce, pays qu’il connaissait intimement pour y avoir fait sa thèse sur la Thessalie à la charnière des années 1960-1970, des Balkans, de l’Albanie… Dans les archives du Clermontois André Fel, nous retrouvons cette photo prise en Thessalie lors d’un voyage en 1992 : « Michel Sivignon, notre pâtre grec ».

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HUMAINS ET ANIMAUX, une géographie de relations

De l’élevage aux productions industrielles, de l’abattage rituel au bien-être animal, des animaux de laboratoire aux antispécistes, de la zoophilie à l’extermination, les relations des humains avec les animaux nourrissent de nombreux débats parfois polémiques, souvent violents qui trouvent des réponses différentes en fonction des contextes et stimulent l’enquête géographique.

D. Oster et J. Estebanez (Photo M.Huvet-Martinet)

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Taïwan : une île en état d’alerte ?

L’agression de l’Ukraine par la Russie a ravivé les inquiétudes sur la sécurité de Taïwan.
La petite île doit-elle redouter une prochaine invasion de son grand voisin chinois ?

Jacques Gravereau (Photo de J.-P. Némirowsky)

Le Café de la Mairie était bondé pour écouter Jacques Gravereau nous parler de Taïwan, de sa société, de sa géographie particulière et surtout de ses relations avec la Chine. Grand expert des questions économiques et politiques liées à l’Asie, notre intervenant, président pendant 25 ans de l’Institut HEC-Eurasia, a une connaissance approfondie de la deuxième puissance mondiale dans laquelle il a fait 70 séjours. Et c’est sur un ton combinant humour et érudition qu’il analyse la situation d’une zone très sensible de notre monde.

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La crise de l’eau en France

 L’actualité de ces dernières années est marquée en France mais aussi partout dans le monde par la multiplication de crises de l’eau auxquelles nous étions peu habitués : sécheresses prolongées même dans des régions inhabituelles comme la Bretagne, inondations catastrophiques récurrentes (Pas de Calais, La Roya), pénuries d’eau potable généralisées à Mayotte, et surtout affrontements violents autour des ressources en eau et de projets hydrauliques (Sivens, Sainte-Soline). En général la DCE (Directive Cadre sur l’Eau) qui visait à atteindre le bon état écologique des masses d’eau a échoué.

Daniel Oster présente David Blanchon (photo Micheline Huvet-Martinet)

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Balkans

Où visiter dans un même espace urbain mosquées et églises, forteresses ottomanes et palais habsbourgeois ? C’est dans les Balkans. Les villes y ont une histoire ancienne et un présent douloureux.

Jean-Arnauld DERENS et Benoît GOFFIN (sous la direction de), ENS EDITIONS, 2024

Quatrième ouvrage (1) de la collection « Odyssée, villes-portraits », consacrée à la géographie subjective qui entrelace savoirs et expériences personnelles, rationalité et subjectivité, Balkans nous emmène dans quelques villes de cette Europe du Sud-Est considérée souvent comme étrange et étrangère par les autres Européens. Vestiges de l’Empire ottoman côtoyant des palais habsbourgeois, populations musulmanes, mosaïque de peuples divers et opposés…cette région européenne « différente » a laissé de plus une image inquiétante dans les livres d’Histoire, celle de « poudrière balkanique ». Aujourd’hui libérés des empires dont le dernier a été l’empire communiste, ces Etats cherchent à s’ « occidentaliser » et à intéger l’Union européenne (2). Aussi ce livre a-t-il pour but de nous les rendre plus familiers grâce aux récits d’auteurs divers, anthropologues, géographes, historiens, journalistes qui ont une connaissance intime de villes dans lesquelles ils et elles ont vécu.

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Transition climat-énergie : appétit d’espace, soif de justice socio-écologique

Olivier Labussière est géographe et chargé de recherche au CNRS. Spécialisé sur les relations entre énergie, espace et société en contexte de transition climat-énergie, il est rattaché au laboratoire Pacte à Grenoble en sciences sociales et membre de l’équipe Environnements. Il a soutenu en 2007 une thèse consacrée aux défis esthétiques des aménagements liés à la transition. Adoptant une approche géographique de la question énergétique, son objet de travail est l’habitabilité de l’environnement, qu’il aborde selon une méthode qualitative fondée sur des terrains et des entretiens, sans modèles.

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Protéger la forêt au pays du soja ? (Brésil)

Les Cafés Géo de Montpellier ont reçu Ludivine Eloy, directrice de recherche au CNRS et membre du laboratoire ART-Dev à Montpellier, afin de parler des causes et des conséquences sociales, économiques, politiques et surtout environnementales de la déforestation au Brésil.

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