Patrimonialiser la nuit : des pollutions lumineuses aux ressources environnementales nocturnes

Café géographique Toulouse le 29.04.15
avec Rémi BENOS et Samuel CHALLEAT (Géographes, UMR Dynamiques rurales, Université Jean Jaurès Toulouse 2)

Rémy BENOS, maître de conférences, a fait une thèse sur « La patrimonalisation dans les espaces protégés » et Samuel CHALLEAT, chercheur contractuel, sur « Sauver la nuit » des pollutions lumineuses. Ils partagent leurs compétences et font partie d’un collectif pluridisciplinaire de sept chercheurs (géographes, politistes, économistes, psychologues, etc.) dont la question est : Dans quelle mesure les territoires se saisissent aujourd’hui de la nuit comme ressource ?

Au départ de la recherche, une intuition au vu de panneaux vantant la qualité de la nuit des villages ou l’organisation de randonnées pédestre nocturnes. Dans un contexte d’économies d’énergie et de réduction de l’éclairage public, il ne s’agit pas de multiplier les activités comme les marchés nocturnes, mais de changer notre rapport à la nature en observant sa biodiversité. Comment cela fait-il ressource ? Où ? Pour qui ?

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La Francophonie, une idée géographique ?

Café géographique 26 février 2015

Présentation de Daniel Weissberg

Que les géographes s’intéressent à la francophonie n’est pas chose nouvelle, puisque le mot lui-même a été initié par Onésime Reclus dans son fameux ouvrage France, Algérie et colonies de 1886. La Francophonie est aussi dans l’actualité après le dernier Sommet de Dakar et l’arrivée au Secrétariat général de Michaëlle Jean, ancienne gouverneure générale du Canada, évènement majeur de l’année francophone. Je ne reviendrai que brièvement sur l’histoire de la Francophonie, elle a été rappelée dans le document de présentation, si ce n’est pour bien marquer le rôle majeur des pères fondateurs acteurs de la décolonisation et le basculement des années 1990 avec le passage du « tout Agence » (ACCT, AIF, OIF) au « tout Sommet » marquant la prégnance du politique dans l’affirmation francophone.

Dans la construction de la Francophonie contemporaine, rappelons l’importance de la Conférence fondatrice de Niamey en Février 1969 ; André Malraux y tint un discours majeur dont je voudrais lire un extrait qu’il convient d’apprécier au regard de certain discours de Dakar:

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Pour une géographie des conflits au Viet Nam

Café géographique à Toulouse le 19.01.14
par Gabriel WEISSBERG, (Maître de Conférences, Géographie, Université Toulouse 2), Daniel WEISSBERG (Professeur des Universités, Géographie, Université Toulouse 2), Frédéric FORTUNEL (Maître de conférences, Géographie, Université du Maine).

Gabriel WEISSBERG :

Reprenant l’expression que le général De Gaulle a utilisée pour la France, on pourrait dire que « le Viêt-nam s’est construit par l’épée ». Rares sont les Etats dont l’histoire est jalonnée d’autant d’épisodes guerriers, à tel point que les conflits semblent constitutifs de l’affirmation nationale elle-même. A cette histoire guerrière établie dans la longue durée – la formation progressive du territoire national, « Nam Tiên » ou « Marche vers le Sud » a duré plusieurs siècles-, il faudrait ajouter les multiples conflits dynastiques, les oppositions entre principautés rivales, les révoltes paysannes récurrentes et les rébellions antifiscales endémiques. Près d’un siècle de lutte anticoloniale (jusqu’à Dien Bien Phu en 1954), et deux décennies de guerre impliquant les plus grandes puissances prolongent cette histoire tumultueuse. Et pour clore (provisoirement ?) cette énumération il faudrait rappeler les violents affrontements de 1979 avec la Chine, conséquences eux-mêmes d’une invasion du Cambodge, suivie de dix années de présence armée dans ce pays. Cette histoire –pour le coup vraiment « pleine de bruits et de fureur »- explique sans doute que le Vietnam soit aujourd’hui un théâtre de conflictualités multiples dont presque toutes s’enracinent, peu ou prou, dans ces héritages.

A ce stade, il serait commode de distinguer deux types de conflits : les conflits internes et les conflits qui résultent de la place et du rôle que le pays revendique dans son environnement régional. Mais cette distinction serait simpliste : les conflits fonciers liés au développement de l’hévéaculture et d’autres cultures pérennes par exemple s’expliquent largement par l’engagement actif du Vietnam dans la mondialisation depuis l’adoption de la politique d’ouverture et de modernisation (Doi Moi). Acteurs et enjeux sont donc multiples, à la fois endogènes et exogènes. L’ouverture d’un terrain de golf ou l’urbanisation des périphéries urbaines n’opposent pas seulement les paysans chassés de leurs terres et les bureaucrates chargés de leur expropriation au nom de l’intérêt national. Investisseurs singapouriens, grandes firmes transnationales, organisations multilatérales en charge de la coopération sont autant d’acteurs puissants quoique peu visibles. Et toujours, dans le gant du libre marché se glisse la main de fer du parti unique, même si, non sans mal, un embryon de société civile se constitue. Malgré la censure, internet ouvre quelques lucarnes sur le monde. La lutte pour la liberté d’expression et des pratiques religieuses, un combat de tous les jours, n’est jamais gagnée, jamais perdue. Ici ou là, des groupes informels se constituent de façon aléatoire pour dénoncer le bradage des ressources nationales (la bauxite), la corruption ou les bas salaires.

Pour le géographe, les conflits au Vietnam et autour du Vietnam sont difficilement lisibles. La perception et le traitement par les autorités vietnamiennes des revendications chinoises sur les archipels Spratleys et Paracels en offre une parfaite illustration. Si les droits nationaux sont clairement revendiqués dans les instances internationales (de l’ASEAN aux Nations-Unies), cela va de pair avec un contrôle étroit des manifestations intérieures, tolérées ou réprimées selon les circonstances. Ce traitement reflète, entre autres, l’état des rapports de force internes au sein des instances du pouvoir, une perception différenciée des possibles alliances régionales, une conscience claire de la dissymétrie des forces en présence, sans que l’on puisse dire ce qui l’emporte au fil du temps.

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Les animaux sauvages, ennemis des hommes ?

Café géographique à Toulouse le 23.04.2014
par Farid BENHAMMOU

Farid Benhammou est agrégé de géographie et docteur en géographie de l’environnement de l’ENGREF – Agro Paris Tech. Passionné depuis l’enfance par la faune, comme il le confie lui-même en préambule de « son » café-géo, il est aujourd’hui considéré comme l’un des spécialistes français des grands prédateurs. Il travaille sur les conflits autour de la conservation de l’ours et du loup depuis 1998. En 2007, il soutient une thèse distinguée par le Comité national français de géographie: « Crier au loup pour avoir la peau de l’ours : une géopolitique locale de l’environnement ». Il est l’auteur de nombreux articles sur le sujet et a été invité en 2012 dans l’émission « La tête au carré », l’émission scientifique de la radio France Inter.

Une anecdote : l’ibis sacré, un animal majestueux qui déchaîne les passions.

ibis-sacre

 

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Géographies de l’Apocalypse

Café géographique à Toulouse – 19.02.2014
Géographies de l’Apocalypse
ou comment l’arme nucléaire a engendré notre cartographie
par Henri Desbois

Henri Desbois, maître de conférences à Paris X-Nanterre, fait partie de l’équipe Réseaux, Savoirs & Territoires et du laboratoire LAVUE. Ses recherches actuelles portent les relations entre les techniques numériques et les représentations de l’espace. A paraître aux Presses de l’ENSIB (Lyon), son prochain livre  « Les mesures du territoires » qui portera sur les aspects techniques, politiques et culturels de la mutation de la carte topographique.

Sans stratégie de la destruction mutuelle assurée, pas de GPS, pas de SIG (système d’information géographique), ni peut-être de satellites d’observation de la terre.

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Grèce : le bout du tunnel existe-t-il ?

Café-repas géographiques du 18 décembre 2013
Grèce : le bout du tunnel existe-t-il ?
par Michel SIVIGNON
(Professeur émérite de géographie à l’Université de Paris X, spécialiste des Balkans et de la Grèce)

Quelques images
Pour entrer dans la crise grecque, quelques images non touristiques. En effet, nous entendons souvent des gens qui viennent de passer leurs vacances d’été en Grèce s’étonner : « la crise ne se voit pas » ou « la crise, connais pas ». Le tourisme de masse est-il propice à révéler la criseaux touristes ? Il est fait pour populariser une image de la Grèce qui correspond aux besoins de l’industrie touristique afin qu’elle puisse ensuite renouveler ses clients : pas d’images dramatiques surtout.

Autre question, celle du géographe attaché aux paysages : la crise est-elle visible ? Anecdote: la voisine d’une amie grecque perd son boulot, son mari aussi, ils ne peuvent pas payer la facture d’électricité (qui comporte aussi les impôts locaux), l’électricité est coupée, elle dépose chaque jour ses victuailles dans le frigo de mon amie… Est-ce visible ?
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Les glaciers pyrénéens, miroirs du climat régional

Café géographique à Toulouse – 27.11.2013

Les Glaciers Pyrénéens
miroirs du climat régional
par Pierre René

 Pierre René, glaciologue, a fondé en 2001 l’Association Moraine (http://asso.moraine.free.fr, siège social : mairie de Luchon 31110)  pour étudier l’évolution des glaciers pyrénéens. Il a publié en 2013 « Glaciers des Pyrénées, le réchauffement climatique en images », aux éditions Cairn.

La glace est un indicateur climatique exceptionnel car elle est hyper sensible aux variations climatiques. Les glaciers pyrénéens reflètent l’évolution climatique du Sud-Ouest de la France : si le recul des glaciers est général dans le monde, les disparités régionales sont très importantes et il est particulièrement intéressant d’en faire une observation fine pour avoir un maillage complet des glaciers de la planète

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Géopolitique de l’espace en 2013

Café géographique à Toulouse le 16.10.13
par Isabelle Sourbès-Verger

Géographe spécialiste des politiques spatiales, chercheur au CNRS, Isabelle SOURBÈS-VERGER est directeur-adjoint du centre Alexandre Koyré (EHESS, CNRS). Ses travaux portent particulièrement sur la comparaison internationale des politiques spatiales à partir de l’analyse de leurs priorités nationales et des relations entre acteurs dans la mise en œuvre des politiques d’occupation de l’espace circumterrestre.

1.1. Pourquoi  « Géopolitique » de l’espace ?

  « L’espace » est né en 1957, en pleine guerre froide, et les premières grilles d’analyse utilisées sont liées à la relation conflictuelle entre les deux blocs, donc à la géopolitique de l’époque. L’espace est par ailleurs alors associé au nucléaire, comme outil supplémentaire de puissance et comme moyen de renforcer l’image régionale et internationale d’un pays.

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Le monde de la rose, une filière mondiale

Café géographique à Toulouse, 30.01.13

Le monde de la rose
Une filière mondiale 

Professeur de géographie à l’Université de Bordeaux 3, Bernard CALAS, spécialiste de géopolitique et de géographie politique, travaille sur les villes d’Afrique orientale et les patrimoines africains. Il a été directeur de l’IFRA (Institut français de recherche en Afrique) à Nairobi de 2007 à 2010 et s’intéresse à la rose, aux roses et à leur filière mondiale qui le conduit du Kenya ou de l’Ethiopie à l’Inde en attendant Amsterdam, le Kazakhstan et le Japon…

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Enjeux géopolitiques des Pôles

Café géo de Toulouse 17.04.2013 

Discours de Michel Rocard (09.11.2010)

Ambassadeur de France chargé des négociations internationales relatives aux pôles Arctique et Antarctique

Je pense que je devrais me présenter. Personne n’est parfait : je viens de très loin de l’Arctique. Je suis Français. Je suis même un ancien Premier ministre, ce qui aggrave mon cas : pour un politicien, la relation avec le sérieux et la rigueur scientifique est moins claire qu’elle ne l’est pour la plupart d’entre vous. Mais j’ai néanmoins été nommé Ambassadeur français chargé de la négociation internationale pour les pôles Arctique et Antarctique. Inutile de le demander, j’entends vos deux questions : pourquoi, et pour faire quoi ?

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