Thème : Les régions de l’Arctique

 

Jean-Louis MARTIN (directeur du département Dynamique et gouvernance de systèmes écologiques CEFE/CNRS, Montpellier) et Sylvie BLANGY (ingénieur de recherche CNRS/CEFE, Montpellier), « Les communautés inuit face au développement minier de l’Arctique », Cafés Géographiques de Montpellier, Rubrique Les comptes rendus, mars 2014

 

  • CANOBBIO Eric, « Les enjeux de l’Arctique», Cafés géographiques de Mulhouse, Rubrique Les Comptes rendus, 18 janvier 2012.

 

ll est intéressant de faire le point aux temps présents polaires, pour remettre en perspective les informations des médias qui s’affolent, évoquant à qui mieux mieux, un eldorado minier, gazier et pétrolier en Arctique. L’Arctique est un territoire sorti de son hiver en 2000 pour rentrer dans l’espace mondial et on a toutes les raisons de penser que l’Arctique est dans une transition historique. C’est la raison pour laquelle on revisite cet énorme espace circumpolaire. Au départ, l’Arctique est un «non lieu», un océan et des littoraux que l’on peut regarder indifféremment par le Nord, le Sud, l’Est, l’Ouest ou parle pôle. La plupart des cartes des années 80 sont des représentations photographiques polycentrées mais la Norvège préférait représenter l’Arctique du Sud.

 

Eric Canobbio considère que l’expédition des deux sous-marins russes à la verticale du pôle Nord en 2007 a créé une forte onde de choc médiatique. Pourtant, si le chef de l’expédition, Artur Chilingarov, adoptait volontiers un discours offensif, cette opération d’envergure internationale a été financée par des privés et n’a pas bénéficié de l’assentiment du président russe de l’époque, Vladimir Poutine. Les médias ont pourtant développé la thèse selon laquelle l’Arctique était un des derniers domaines où une forme de conflit de souveraineté allait s’installer. Le conférencier suggère plutôt de démêler les fils de cette pelote géopolitique : ce supposé incident a eu lieu lors d’une phase de tensions très fortes sur les prix du pétrole, couplée à une vision commune des effets du réchauffement sur la réduction de la banquise. Il considère que les journaux ont alors « tout mélangé », annonçant une nouvelle guerre froide, de nouveaux conflits entre la Norvège, les Etats-Unis, le Canada, le Danemark…, là où lui ne voyait pas un territoire de conflictualités, soutenant au contraire que les Etats riverains, qu’il qualifie de « gentlemen », allaient régler ces différends entre eux. Son seul doute portait sur les Russes et les Canadiens, défendant alors intensément certaines souverainetés, faisant de l’Arctique un point de fixation symbolique. Mais l’arrivée d’Hillary Clinton au Secrétariat d’Etat en 2009 aurait permis un apaisement général, renforcé par l’embryon de gouvernance développé par le Conseil de l’Arctique. Au vu de cette évolution, Eric Canobbio considère non sans humour que le temps polaire lui a donné raison ! En 2010, certaines agitations autour d’une zone majeure contestée en Mer de Barents ont pu laisser poindre quelques craintes, mais la négociation sur les conflits de pêche a une nouvelle fois permis aux pays impliqués de trouver un accord

 

 

Eric Canobbio, Atlas des pôles. Régions polaires: questions sur un avenir incertain. Autrement, 2007, 80 p. Voici un ouvrage original qui s’intéresse à deux régions habituellement délaissées à l’échelle du globe. Paru en pleine année polaire internationale, cet atlas vise à faire le point sur les connaissances disponibles sur ces régions et à souligner les enjeux qui se posent à elles. Son auteur, Eric Canobbio (Paris 8), est chercheur en géopolitique et travaille sur la régionalisation du domaine arctique canadien.

 

 

Le samedi 16 mars 2019 de 10h à 12h, un public nombreux est rassemblé dans la salle du nouvel amphi de l’Institut de Géographie pour accueillir Olivier Truc, journaliste et écrivain français qui habite Stockholm depuis 1994. Il est l’auteur d’une trilogie de romans policiers « ethnologiques » consacrés aux Sami de Laponie. Olivier Truc est de passage à Paris pour la sortie de son dernier livre « Le cartographe des Indes boréales » aux éditions Métailié qu’il présente au Salon du Livre ce week-end. Cette rencontre a lieu sous forme d’un échange avec Daniel Oster et Michèle Vignaux. Elle donne une suite substantielle à l’article « De l’actualité des Sami » signé Michèle Vignaux et publié sur ce site en novembre 2018.

 

  • COLLIGNON Béatrice & TABEAUD Martine, « Les mondes du froid», Cafés Géographiques de Paris, Rubrique Les comptes rendus, 29 octobre 2013

 

Le café de ce soir est consacré à la nouvelle question du programme des classes préparatoires littéraire Ulm en géographie : « les mondes du froid ». Claudie Chantre (animatrice du café) présente la question et rappelle toutes les représentations qui sont associées à ces mondes du froid : des espaces périphériques, immobiles, … Le pluriel formulé dans le programme souligne une plus grande complexité, entre les espaces en altitude, les déserts, les lieux où l’on va subir une saison, les moments où l’on perçoit le froid, reliant la question à une dimension temporelle. Il faut croiser le temps avec le temps qui passe… Des espaces aussi souvent vus comme répulsifs et en pleine perturbation, avec le « réchauffement » ou plutôt le changement climatique. Ainsi, ce serait aussi des mondes dynamiques qui disparaitraient, un dernier eldorado auquel on s’accrocherait ou dont on voudrait s’emparer des richesses.

 

 

Les Cafés Géographiques ont proposé de piloter 6 interventions lors des journées du Festival International de Saint-Dié des Vosges, en 2018. Deux interventions ont porté sur le thème des pays scandinaves. Camille Escudé s’est intéressée à la Géopolitique de l’Arctique scandinave tandis que Thomas Merle a évoqué les situations des pays du Nord face à leurs outre-mers.

 

 

Depuis quelques temps déjà, on entend dire n’importe quoi à propos de la possibilité d’un réchauffement brusque de l’Arctique et de ses supposées conséquences catastrophiques pour l’humanité tout entière, une peur que le cinéma hollywoodien s’est d’ailleurs empressé d’exploiter. Ceci nous a donné un film catastrophe intitulé « The Day after Tomorrow », une œuvre qui, heureusement, ne s’est pas méritée d’Oscar. Mais il est pratiquement établi que le réchauffement climatique, en général, et celui de l’Arctique, en particulier, vont modifier à la longue les conditions de vie sur Terre d’une telle manière que les générations futures en seront parfois durement affectées. Alors, aussi bien chercher tout de suite à comprendre les processus qui régissent les changements climatiques, notamment dans l’Arctique, là où, pour le moment«c’est là que ça se passe», en vue de s’y préparer.

  

 

Alors que le Nord russe est aujourd’hui en profonde recomposition, tous les acteurs civils et politiques s’accordent sur la nécessité d’une nouvelle stratégie fédérale pour prendre le relai du système de compensations aux travailleurs, hérité de l’ère soviétique. Certaines régions aux riches sous-sols font en effet preuve d’un nouveau dynamisme tandis que d’autres sont en crise (« depressivnye » dit-on en russe) ou insuffisamment développées. L’Etat et les différents sujets de la Fédération, depuis déjà plusieurs années, peinent à se mettre d’accord. Au cœur du problème, la vision du Nord, qui depuis les débuts de l’URSS, inclue des territoires aux caractéristiques et aux situations géographiques très variées sous l’appellation de «Territoires du Nord et Assimilés». On oublie trop souvent que bon nombre de régions du sud de la Sibérie et de l’Extrême-Orient sont considérées et traitées par l’administration centrale avec les mêmes mesures que celles du Cercle Polaire. D’où vient cette largesse politique? Qu’est-ce que la frontière chinoise a en commun avec les rivages arctiques? L’Etat veut aujourd’hui définir scientifiquement une zone pouvant prétendre à des régimes avantageux, mais le difficile choix des critères est révélateur de la diversité des enjeux. Que veut donc dire le Nord pour les Russes?

 

 

Aujourd’hui, la frontier (que les géographes ne traduisent pas en français pour la distinguer de la frontière comme limite de souveraineté) nous permet d’évoquer des espaces pionniers qui, selon la formulation de Roger Brunet, « avancent dans l’inconnu ». C’est donc sans surprise que l’on y retrouve l’Arctique.

 

Ce Café Géo s’est tenu au Café de Flore (Paris 6e). Les deux intervenantes étaient Clara Loïzzo et Camille Tiano, agrégées de géographie, professeures de chaire supérieure en classes préparatoires littéraires au lycée Masséna (Nice) et au lycée Louis le Grand (Paris). La parution récente de leur ouvrage (16 octobre 2019) L’Arctique à l’épreuve de la mondialisation et du réchauffement climatique aux éditions Armand Colin tombait à pic.

 

 

Les preuves du réchauffement climatique, il faut aller les chercher parfois bien loin. Un très beau reportage paru dans le journal Le Monde raconte la vie des scientifiques venus du monde entier pour observer l’intensification de la fonte des glaces dans la base de Ny-Alesund située aux confins de l’Arctique dans l’île norvégienne du Spitzberg à un peu plus de 1 000 kilomètres du pôle Nord.

 

Ils s’y sont mis à deux pour écrire les carnets d’un voyage qu’ils ont fait ensemble en 2010 dans les contrées lointaines et largement ignorées de l’Extrême-Orient russe. Deux auteurs, deux photographes, deux mains, mais une seule voix dont on ne sait pas trop qui elle est en vérité, tellement nos deux écrivains-voyageurs, Eric Faye et Christian Garcin, ont réussi leur entreprise fusionnelle qui permet au lecteur de descendre ces fleuves en solitaire. Un voyage dans l’Extrême-Orient russe ? C’est vite dit car la distinction avec la Sibérie n’est pas toujours très claire comme le suggère le nom « Transsibérien » du train qui arrive à Vladivostok. Vue d’Europe occidentale, on croit le savoir depuis longtemps, la Russie comprend une partie européenne jusqu’aux monts Oural et, au-delà vers l’Est, il y a l’immense Sibérie qui s’étend jusqu’à l’océan Pacifique. En fait, l’organisation administrative russe considère que la Lena forme la limite orientale de la Sibérie tandis que l’Extrême-Orient regroupe toute la partie est du continent eurasiatique, entre Iakoutie et Kamtchatka.

 

 

L’Arctique est un vaste territoire, devenu un enjeu géopolitique important. C’est une région qui subit en fait de plein fouet les effets du changement climatique. Il sera ici question du Nunavut, qui a acquis un nouveau statut territorial depuis 1999, dans le Nord canadien.

 

 

Olivier Truc est venu récemment à l’Institut de géographie pour nous parler des Sami aujourd’hui et de leur intégration dans les sociétés d’Europe du nord (voir le compte rendu de Claudie Chantre). Son dernier roman évoque le temps (XVIIème siècle) de leurs premiers contacts avec la Couronne suédoise. D’abord un titre. Un titre poétique qui renvoie à l’imaginaire de ces hommes du début du XVIIème siècle qui voulaient découvrir le monde et en extraire les richesses symboliques et matérielles. Ne pouvant s’installer durablement ni dans les Indes orientales, ni dans les Indes occidentales, les Suédois ont choisi d’établir leur souveraineté sur les terres du Grand Nord, les terres boréales. Sous le titre de couverture, une baleine s’acharne, telle Moby Dick, à renverser une chaloupe de marins accrochés à leur rame pour sauvegarder leur vie. C’est à ce monde de baleiniers qu’appartient le héros du roman, Izko. Monde arctique, ambitions politiques suédoises, chasse à la baleine, société lapone, fanatisme religieux… tels sont quelques-uns des domaines où Izko, évolue avec courage et intelligence. Il nous emmène de Saint-Jean-de-Luz au sud du Portugal et de Stockholm à la mer de Barents, du palais royal aux tentes de Laponie.

 

 

Compte rendu de l’ouvrage de Farid Benhammou et Rémy Marion, « Géopolitique de l’ours polaire » paru aux éditions Hesse en 2015.

Le rapprochement des termes peut faire sourire ou intriguer. Il est pourtant parfaitement justifié. Le grand plantigrade est à la fois le symbole et l’habitant du monde arctique, territoire que se disputent de façon plus ou moins feutrée plusieurs Etats avides de ressources minières et territoire que le réchauffement climatique modifie rapidement, sujet d’inquiétude pour tous les terriens.

L’ouvrage se compose de huit chapitres de taille inégale, eux-mêmes divisés en courtes sous-parties (de type fiches), ce qui facilite la consultation si l’on cherche une information précise mais rend moins agréable la lecture suivie et n’évite pas les redites. Il comprend aussi un encart de 16 pages en couleur montrant cartes et photos et de trois annexes citant des accords internationaux sur la protection de l’ours polaire. La bibliographie est riche. Un petit glossaire n’aurait peut-être pas été inutile au lecteur peu familier de l’univers arctique.

 

 

Dossier réalisé par Emilie et Joseph Viney (octobre 2019)