Compte-rendu du Café-géo du 21 septembre 2017 avec Bernard Bret

Les ambitions internationales du Brésil se caractérisent à plusieurs échelles :

À l’échelle mondiale d’abord par une franche disposition au multilatéralisme. On peut ainsi noter une nette évolution par rapport à sa position diplomatique affichée lors de la Guerre froide et du découpage bilatéral du monde, où le Brésil était alors un des pays « satellites » des États-Unis : dans cette position d’allié fidèle, l’impératif de « sécurité nationale » et la consolidation du pouvoir interne produisaient un régime dictatorial (comme dans d’autres pays latino-américains à cette période).

Cette mise en perspective historique souligne le contraste avec la situation actuelle : le pays a désormais des revendications internationales légitimes, qui se traduisent par exemple par la revendication d’un siège permanent au Conseil de Sécurité de l’ONU, d’autant plus légitime que le Conseil actuel ne dispose toujours pas de représentant du continent latino-américain. Le Brésil a par ailleurs pris des responsabilités au sein de l’ONU, par exemple lors de ses interventions à Haïti, se montrant ainsi capable d’assumer de hautes responsabilités à l’échelle mondiale.

Au-delà des opérations de prestige de la Coupe du Monde de football de 2014 et des Jeux Olympiques d’été à Rio de Janeiro en 2016, qui prouvent sa capacité d’organisateur de grands évènements, le Brésil possède d’importants atouts économiques, notamment grâce à de grandes entreprises nationales telles que Petrobras, entreprise pétrolière d’envergure mondiale, mais aussi Embraer, société de construction aéronautique brésilienne qui a étendu son champ d’action en se perfectionnant dans l’aviation civile.

La maîtrise technologique, par ailleurs, contribue à donner du crédit à son économie. Dans le domaine énergétique notamment, le Brésil a fait preuve d’une capacité inventive remarquable, après la crise pétrolière de 1973, en s’investissant grandement dans sa transition énergétique par la recherche de solutions alternatives, comme la mise au point de moteurs à alcool de canne à sucre et d’autres fonctionnant aussi bien à l’essence qu’à l’alcool.

En outre, dans le domaine du Soft-Power (influence d’un pays par d’autre biais que l’économie ou la force militaire) son statut de seul pays lusophone du continent américain donne au Brésil un rayonnement culturel non négligeable, notamment à travers la diffusion de médias comme le groupe Globo, spécialisé en feuilletons (les telenovelas), qui participent à l’ancrage d’une identité brésilienne spécifique aux yeux du public international (notamment dans un monde lusophone étendue en Europe et en Afrique).

À l’échelle continentale, l’enjeu du Brésil est désormais de rivaliser avec les États-Unis. Cela se traduit par son refus, dans les années 1990, d’un grand marché continental commun (ZLEA) proposé par le géant nord-américain qui a été perçu comme une menace pour son indépendance économique. Le pays a préféré se tourner vers l’élaboration d’un marché commun à l’échelle sud-continentale : le Mercosul, zone de libre échange créée en 1991 avec le traité d’Asunción (avec l’Argentine, l’Uruguay et le Paraguay). Aujourd’hui, outre des pays associés, le Mercosul compte parmi ses membres le Vénézuela, actuellement suspendu à cause des pratiques anti-démocratiques de son président Nicolas Maduro.  Le dispositif a été renforcé avec la mise en place d’un tarif extérieur commun (création d’une union douanière) par le protocole d’Ouro Preto en 1994. Cette intégration économique transfrontalière s’est réalisée en parallèle de la construction de l’Alena (Association de libre-échange nord-américaine entre les États-Unis, le Canada et le Mexique) en 1992, ce qui renforce la volonté d’intégration à l’échelle exclusivement subcontinentale afin de se détacher de l’emprise des États-Unis.

La position du Brésil au sein du Mercosul est profondément asymétrique car les pouvoirs sont très contrastés :  le Brésil occupe une place extrêmement importante qui laisse les autres pays membres dans une position d’influence très limitée. Cette asymétrie est notamment visible à travers les chiffres d’exportations : les exportations du Brésil ne concernent le Mercosul que pour 10% des marchandises exportées, les 90% restant concernant donc d’autres régions du monde ; par opposition, les marchandises de l’Argentine, de l’Uruguay et du Paraguay sont respectivement exportées pour environ 25%, 34% et 64% en direction de pays membres de l’intégration économique sud-américaine. Ces données montrent que les enjeux du Brésil sont bien moindres au sein du Mercosul, malgré son poids énorme, alors que les autres pays membres en sont largement plus dépendants bien que moins influents. Si l’on considère le PIB moyen des pays membres entre 2000 et 2015, celui du Brésil représente cinq fois celui de l’Argentine, cinquante fois celui de l’Uruguay et cent fois celui du Paraguay : le Brésil fait figure de véritable géant par rapport à ses pays voisins. Mais il faut considérer les divers enjeux dans leur totalité, car ceux-ci ne sont évidemment pas exclusivement économiques : les relations diplomatiques avec ses pays frontaliers sont très importantes et stratégiques pour le Brésil, notamment dans sa démarche de revendication pour entrer au Conseil de Sécurité, pour laquelle le soutien de ses pays voisins compte beaucoup ; il ne peut donc pas se permettre de les négliger. Il faut aussi remettre l’intégration du Mercosul dans le contexte mondial : en effet, le commerce interne au Mercosul ne représente qu’environ 0,5% des échanges commerciaux dans le monde ; le Brésil est donc le leader d’un marché très modeste à l’échelle mondiale.

L’intégration économique à l’échelle subcontinentale s’est élargie par l’intégration des pays andins : La Communauté Andine des Nations et le Mercosul se sont rapprochés pour fonder l’Unasur, sans pour autant faire disparaître les deux unions fondatrices. L’articulation des différentes intégrations économiques latino-américaines forment donc un système complexe. Cette fédération entre l’Unasur et le Mercosul, à l’initiative du Brésil, inclut des choix d’équipements et de planification particulièrement importants en matière de transport et d’énergie (se reporter à l’atlas du Brésil de la collection Autrement pour les tracés d’infrastructure). On peut constater que le choix du tracé des grands axes à l’échelle continentale a été largement favorable au Brésil : à travers l’Unasur, le Brésil a su saisir l’occasion de s’ouvrir une fenêtre stratégique sur l’océan Pacifique. Cette ouverture sur les deux continents bordant le continent est la conséquence géographique la plus directe de cette grande ambition brésilienne.

On est cependant amené à se demander si le Brésil est à la hauteur de ses ambitions internationales ; car il présente malgré tout de visibles fragilités internes. Tout d’abord, il s’agit de considérer la faiblesse de la conjoncture économique actuelle qui contraste grandement avec la période de la présidence de Lula. La période de fulgurante croissance économique s’est renversée lors des dernières années : entre 2014 et 2016, on a pu enregistrer une baisse de plus de 10% du PIB/habitant, une chute de 20% de la production industrielle, mais aussi une chute du cours des matières premières (notamment pour le soja, les minerais, la viande) et enfin une reprise de l’inflation (6,3% pour l’année 2016) restant toutefois largement inférieure à celle, massive, des années 1970. La conjoncture est donc globalement mauvaise et les indicateurs sont au rouge.

Cette conjoncture économique se traduit aussi par des finances publiques en mauvais état qui ont rendu d’autant plus choquantes les très grandes dépenses faites lors du Mondial de football auquel l’équipe nationale a indéniablement échoué (ce qui a aussi son importance dans la mesure où ce sport est emblématique du pays et représente généralement une fierté nationale). L’état des finances publique est alarmant non seulement au niveau fédéral, mais aussi à l’échelle des États fédérés : l’État de Rio de Janeiro n’est pas loin de la faillite. Cela provoque d’importants retards de paiement de salaire pour les fonctionnaires fédéraux et des réductions de budget pour des programmes publics et des institutions telles que les universités. En conséquence, un amendement constitutionnel a été voté l’année dernière gelant pour vingt ans les dépenses publiques, acte symbolique fort mais réponse sans doute peu crédible à une crise sévère des finances publiques.

Il importe en outre d’évoquer la crise politique au vu des scandales de corruption massive touchant l’ensemble des partis du pays, amenant le discrédit général et dévastateur du personnel politique. On peut en voir les manifestations dans le cadre de l’opération Lava Jato, qui a fait jaillir de nombreuses affaires à scandale comme l’affaire Odebrecht, compromettant la plus importante firme de bâtiment et travaux publics. Ces affaires de corruption consistent pour la plupart en des versements énormes de pots de vin orchestrés et mettent en jeu de nombreux pays dont la Suisse et de nombreux hommes politiques : en effet, tous les partis sont concernés, quelles que soient leurs orientations politiques. Cela peut mener à des situations improbables où les dénonciateurs des  politiques corrompus se révèlent eux-mêmes être corrompus (comme pour le président de la chambre des députés Eduardo Cunha, ayant déclenché la destitution de Dilma Rousseff, actuellement en prison pour corruption), mais aussi des affaires de corruption mettant en jeu le président de la République lui-même : Michel Temer, l’actuel président du Brésil a fait l’objet d’accusations avérées, mais aussi l’ex-président travailliste Lula, actuellement dans le collimateur de la justice, dont le parti avait par ailleurs acheté des  voix à la chambre des députés.

Cependant il s’agit de contextualiser et de nuancer ce phénomène de corruption de masse : sans bien sûr légitimer la corruption, le système politique proportionnel, quasiment intégral au Brésil (chaque État ayant entre 8 et 70 députés au Parlement) a tendance à pousser le personnel politique à la faute dans la mesure où il crée l’émiettement des partis et des représentants politiques ; il existe en effet pas moins de 28 partis politiques représentés aujourd’hui. Ce morcellement pousse à un démarchage généralisé des partis par le parti au pouvoir, quel que soit leur bord politique, afin de récolter plus de voix et de construire des majorités.

De quels atouts dispose alors le Brésil ? L’argument des ressources naturelles apparaît évidemment comme un élément majeur qui donne au pays un grand potentiel productif (se référer aux nombreux articles d’Hervé Théry sur le sujet). Les immenses réserves d’hydrocarbures au large de Rio ont valu à cette zone maritime le surnom d’« Amazonie Bleue », réserves qui ont pu être explorées grâce aux compétences acquises par Petrobras en matière de forage sous-marin à grande profondeur.

Mais un autre atout majeur réside dans le changement social en cours : plus d’un Brésilien sur deux appartient à la classe moyenne, et deux tiers des habitants des favelas, les « favelados », appartiennent à la classe moyenne, ce qui amène finalement à remettre en question notre définition de classe moyenne et de favela. Il faut en effet savoir se démarquer de l’image stéréotypée que l’on a des favelas, espèces de regroupement de cahutes marginalisées : ce sont en réalité des quartiers populaires, et les deux tiers des favelados se situent dans les catégories de petites classes moyennes, certaines favelas sont même l’objet du phénomène de « gentrification », car situées très près des centres, et donc peuvent être attractives pour des populations et des opérations immobilières.

Les sociologues discernent cinq catégories pour évaluer les classes sociales en fonction de leur revenu mensuel, allant de la catégorie A, la plus riche à E, la plus pauvre. Cette classe moyenne correspond à la catégorie C, celle des foyers disposant de revenus mensuels compris entre 1064 et 4591 reais par tête (équivalent environ à l’intervalle de 300 à 1200 euros). Cette classe sociale dispose donc d’un pouvoir d’achat légèrement supérieur aux classes plus défavorisées : elle a un accès à certains services dépassant les urgences quotidiennes, par exemple la possession d’un frigo, l’achat d’une voiture d’occasion, voire l’accès au trajets intérieurs en avion, ou encore l’accès à un crédit bancaire.

Or cette classe sociale se consolide : cela permet de rompre avec la tradition de l’inégalité sociale extrême caractéristique au Brésil par l’émergence de cette classe intermédiaire. Le renforcement de cette classe sociale peut en outre être de nature à consolider la démocratie par la prise de conscience de son droit de citoyen. Avec la crise actuelle, de nombreuses manifestations ont eu lieu : celles-ci ont commencé avec la protestation du prix des transports publics. Ce phénomène montre une capacité à la revendication des droits de cette catégorie sociale.

Cette émergence a été en partie permise par le président Lula : l’expansion économique qui a accompagné ses deux mandats a permis le financement de programmes sociaux, comme la création de nombreux emplois, la hausse du salaire minimum (actuellement fixé à l’équivalent de 300€ par mois), mais dont le pivot reste le programme de la Bolsa Família qui a fait sortir plus de quarante millions de personnes de la pauvreté. Ces différentes mesures expliquent la grande popularité de Lula, qui était et est toujours considéré comme le représentant du peuple, et ce malgré les soupçons de corruption dont il fait l’objet.

En conclusion, le principal atout à retenir aujourd’hui au Brésil est le sursaut et le progrès de la citoyenneté : en effet relancer la machine politique et économique ne suffirait pas à sortir de la crise globale que traverse actuellement le pays. Le terme de « crise » signifiant l’incapacité d’un système implique à se reproduire à l’identique, la situation présente appelle un changement en profondeur.

Questions :

Les problèmes liés à l’environnement tels que la déforestation en Amazonie peuvent-ils agir comme frein au développement ?

La déforestation en Amazonie est en effet un problème réel. Pendant longtemps, l’Amazonie a été montrée du doigt, à cause du mauvais traitement réservé aux Amérindiens or beaucoup reconnaissent que la situation va globalement mieux (même si les dernières années ont vu une reprise singulière des violences et des assassinats). La politique officielle du gouvernement brésilien protège effectivement les Amérindiens, mais on peut s’interroger sur sa capacité à contrôler en pratique les situations de massacre. Cette politique de protection a été organisée autour de deux références : le statut de l’Indien, adopté sous la dictature militaire en 1973, dont l’objectif était de faire cesser les massacres, dans une démarche d’assimilation des indigènes, pour les aider à devenir Brésiliens (ce qui pose le problème du point de vue des Amérindiens du rejet de leur culture et de leur identité au nom de leur intégration nationale). Le deuxième élément est la Constitution de 1988 présentant le Brésil comme un pays multiculturel, montrant une reconnaissance officielle de la culture des Amérindiens, ainsi que celle des populations noires descendant des esclaves d’Afrique. Reste à considérer la mise en exécution de ces principes qui dans les fait est très légère, d’autant que l’effectif des indigènes au Brésil est très minoritaire reflétant le rapport de force en pratique.

Comment se fait-il que problème de la corruption émerge si soudainement au Brésil ? Qui est derrière ce phénomène de main propre ? Cela correspond-il à la reprise en main d’une aile politique puissante ?

La crise politique actuelle caractérisée par ce phénomène d’émergence de la corruption a été analysée par certains observateurs comme une vengeance des classes politiques dominantes n’ayant pas « digéré » qu’une personne telle que Lula, à l’origine un simple ouvrier d’usine, ait pu être le président de la République : ces anciennes élites se considèrent ainsi menacées par l’ascension sociale des classes inférieures. Un article dans Le Monde par un anthropologue brésilien, Roberto da Matta, faisait remarquer qu’une expression revenait de plus en plus fréquemment chez les classes aisées, « Mais savez-vous à qui vous parlez ? » : ce réflexe social montre la diffusion dans la vie quotidienne de l’émancipation et de la prise de parole de plus en plus fréquente des classes modestes, vues d’un mauvais œil par les classes plus riches.

Quelles sont plus précisément les relations actuelles entre le Brésil et la Bolivie, par rapport à l’intégration de cette dernière dans le Mercosul ?

La Bolivie apparaît depuis un certain temps comme dominée par le Brésil dans le domaine de l’économie. La partie des terres basses (régions de Santa Cruz) de la Bolivie tend beaucoup plus à regarder vers le côté brésilien que vers les Andes. La voie ferrée reliant Santa Cruz au Brésil, modernisée récemment, agit comme un vecteur physique de l’intégration du pays. Cela se traduit par des achats de terres boliviennes par des Brésiliens. Dans l’histoire du Brésil, on a toujours pu constater ce tropisme vers l’Ouest ; ce phénomène se poursuit aujourd’hui au-delà de la frontière. Les infrastructures prévues par l’Unasur vont largement dans ce sens et favorisent ce rapprochement. Là encore, il s’agit de considérer le rapport de force inégal entre les deux pays.

En quoi les émissions de telenovelas brésiliennes font-elles partie du Soft Power ?

Bernard Bret : Le soft-power correspond au pouvoir d’influence d’un pays sur d’autres, notamment par la culture ; or du fait que le Brésil est le plus grand pays lusophone, la diffusion de ces émissions crée une connivence culturelle entre les différents pays parlant le portugais, par exemple en Afrique. Le grand groupe brésilien Globo en tient la tête. Cela permet de rappeler que l’aspect économique ne fait pas tout et qu’il faut toujours considérer les différentes natures des enjeux.

Philippe Piercy : De plus les telenovelas sont traduites et achetées par de nombreux réseaux de télévision dans le monde, et ont créé un genre à part entière, genre reproduit dans de nombreuses régions du monde mais dont les liens originaux avec le Brésil sont connus.

Quelle est la posture actuelle du Brésil au sein des BRICS ?

Il importe de mentionner que le Brésil est le seul pays représentant du monde latino-américain et même américain au sein de cette union. Mais le pays n’apparaît pas pour autant dans une position particulièrement dominante par rapport aux autres pays membres des BRICS. En effet, on peut simplement comparer leurs poids démographiques respectifs : si le Brésil s’impose indéniablement par rapport à ses voisins avec ses 200 millions d’habitants, il reste cependant très modeste sur ce plan par rapport à des pays comme la Chine et l’Inde.

Quel est le rôle des individus politiques (par exemple les présidents Lula et Temer) dans l’influence nationale et internationale du pays, peut-on leur attribuer une responsabilité à grande échelle ?

Il est vrai que Lula est une personnalité très charismatique, et le petit peuple considérait sa présidence l’accès de l’un des siens au palais présidentiel : il faut tenir compte de l’importance de son ascension sociale qui a eu comme effet la valorisation de l’ensemble des catégories populaires et la prise de conscience des masses, et souligner sa capacité à entraîner le peuple par le symbole qu’il représentait. Dilma Rousseff n’a pas eu ce même élan et cette même habileté représentative des classes populaires, ce qui a certainement joué un rôle dans sa déstabilisation politique dans les dernières années.

L’élection de 2018 risque donc d’être un moment très incertain ?

Ce qui apparaît très problématique à l’heure actuelle, c’est ce système d’élection à la proportionnelle qui rend très difficile, même pour le président de bonne foi, d’échapper à ce marchandage permanent qui débouche inévitablement sur le monnayage des appuis partisans et la corruption.

En terme de la durabilité de la position politique du Brésil, il semble assez remarquable qu’un pays qui était une dictature jusqu’il y a moins de trente ans ne connaisse ni tentation séparatiste, ni tentation nationale-populiste, ni tentation autoritaire. Peut-on considérer cela comme un signe de maturité politique ?

En matière d’absence de tentation de séparatisme régional, cela est grandement lié à l’unité culturelle au contraire de la Catalogne, par exemple, qui a elle une identité propre, clairement distincte de la Castille et d’autres régions espagnoles. Au Brésil, tous les Brésiliens se sentent Brésiliens et ne voient pas leur avenir autrement que dans le cadre d’une nation brésilienne. Il s’agit donc d’un facteur de cohésion extrêmement fort. Concernant l’absence de risque de dictature, il faut considérer l’époque des dictatures d’Amérique latine en lien avec la prédominance qu’exerçaient les États-Unis et le découpage bilatéral du globe. Les dictatures étaient soutenues voire provoquées par Washington pour faire rempart contre le danger soviétique. Or le contexte a changé depuis la chute de l’URSS, ce qui explique que le risque de dictature ne semble plus d’actualité. Mais il faut aussi mentionner la disposition démocratique qui a récemment fait ses preuves chez les Brésiliens.

Compte-rendu établi par L. Quevy (Première Sup. Lycée Berthollet), validé par Bernard Bret.