Le 4 février 2015, les Cafés géographiques ont convié leurs adhérents à une soirée exceptionnelle à à l’Union Internationale des Chemins de Fer à Paris à deux pas de la Tour Eiffel.
Paul Véron, directeur de la communication de l’UIC et directeur du Moyen-Orient, introduit la soirée et nous accueille au siège de l’UIC. Le directeur général de l’UIC, Jean-Pierre Loubinoux, nous présente la maison et son histoire. Créée en 1921 dans le cadre d’une conférence diplomatique (ou intergouvernementale) et organisée à Portorose en Italie (actuellement en Slovénie), l’UIC devait harmoniser les conditions de construction et d’exploitation des chemins de fer à l’échelle internationale. Une alliance franco-roumaine cherchait à faire prévaloir une démarche totalement européenne jusqu’à l’Oural et ouverte aux régions voisines du Proche et du Moyen-Orient, de l’Asie jusqu’à la Chine et le Japon. L’UIC est ainsi née à Portorose, avec l’idée d’être basée à Paris. L’immeuble actuel date de 1962-1963. Il a été édifié sur des terrains qui étaient de grands triages amenant le charbon au cœur de la capitale. Ces terrains appartiennent toujours à la SNCF qui a conclu avec l’UIC un bail emphytéotique de 99 ans.
L’UIC est une association internationale de la Loi de 1901, qui regroupe 240 membres sur les 5 continents : des sociétés de chemin de fer intégrées, des gestionnaires d’infrastructure, des prestataires de services liés au ferroviaire, des opérateurs de transport public. Une sorte d’ONU ferroviaire, 1 million de kilomètres d’infrastructures, 7 millions de cheminots et cheminotes à travers le monde au service de la mobilité de 7 milliards de personne (1 pour 1000). Trois objectifs majeurs : développer les chemins de fer de telle façon que les systèmes soient interopérables à l’échelle du monde ; développer la recherche et l’innovation, offrir l’expertise aux exploitants gestionnaires membres de l’UIC ; promouvoir les valeurs du chemin de fer à l’échelle mondiale (valeurs techniques, économiques et sociales).
L’UIC est présidée depuis 2013 par Vladimir Yakounine, Président des chemins de fer de la Fédération de Russie (RZD).
Intervention d’Antoine Beyer : L’intégration européenne par le rail
Antoine Beyer est maître de conférences de géographie à l’Université Paris-Sorbonne, SPLOTT/IFSTTAR. En 2014 il a soutenu son Habilitation à diriger des recherches sur « La dynamique des systèmes de transport, des logiques transfrontalières à l’intégration européenne ». Une des lignes directrices de son travail consiste à rapprocher les intégrations nationales et la structuration des infrastructures de transports nationales avec l’intégration européenne et sa structuration des infrastructures des transports. Son propos portait plus précisément sur l’Union européenne qui cherche à intégrer/dépasser les héritages nationaux pour promouvoir un espace ferroviaire unique.
Les transports sont un élément central de l’intégration européenne
Les objectifs fondamentaux sont ceux de la libre circulation des personnes et des biens, auquel concourt un espace ferroviaire unique européen. Comme pour les autres modes de transport, les bases en ont été définies par le Traité de Rome (1957), même si leur interprétation a longtemps été l’objet d’interprétations contradictoires. Ainsi les grands Etats souhaitaient soutenir leurs sociétés nationales et ne concevaient d’ailleurs pas d’acteurs ferroviaires libérés de leurs obligations d’intérêt général. La construction d’un espace commun passait alors par le rapprochement des structures existantes. Ces coopérations entre réseaux allaient toutefois à l’encontre de la philosophie libérale du Traité de Rome tel qu’il s’appliquera tardivement : ouverture des marchés nationaux, non-discrimination et libre concurrence des opérateurs. Si les ententes entre monopoles nationaux ont longtemps dominé, au modèle de la coopération de type intergouvernementale a succédé dans les années 1980 le principe d’éclatement des entreprises de réseau, notamment ferroviaires. L’objectif était, outre l’émergence de grands opérateurs européens, de relancer un mode de transport en crise. L’intérêt de son redéploiement rencontrait d’autres priorités de la Commission, la réduction des encombrements, un moindre impact environnemental et une meilleure efficacité énergétique, alors que l’intégration économique souhaitée contribue à l’accroissement des échanges intra-européens.
Des freins particulièrement puissants à l’européanisation
Toutefois, un tel objectif se heurte à des héritages multiples qui freinent l’uniformisation européenne. Les Etats nations se sont accaparés, fin XIX° et première moitié du XX° siècle, les chemins de fer, et les ont conçus à leur image, ce que l’on voit dans les différences de tension d’alimentation des voies électrifiées ou dans le sens de circulation des trains ou dans les différences de signalisation ou de longueur de train. L’Etat a un intérêt stratégique et social (encadrement de la tarification…) qui explique cet état de fait. Il y a donc un lien étroit entre le système technique, le système social et les Etats qui a longtemps prévalu dans la politique portée par la Commission européenne.
Au cours des années 1980 toutefois, on assiste à une redéfinition des positions traditionnelles : la libéralisation dans le transport routier montre que d’autres voies sont possibles. Il est par ailleurs urgent de répondre à une crise structurelle qui touche alors le chemin de fer : la chute des trafics et le poids croissant de l’endettement. La poussée libérale et la volonté de relance de la construction européenne (Commission Delors) sont des éléments politiques favorables à une redéfinition politique du rail. Ainsi, les fédéralistes entendent se servir du mouvement libéral pour transférer une partie du pouvoir réglementaire des Etats vers la Commission tout en uniformisant l’exercice des entreprises européennes. L’acte unique de 1986, puis le traité de Maastricht en 1992 imposent finalement une politique européenne avec des décisions prises non plus à l’unanimité mais à la majorité qualifiée, supprimant le droit de veto qui avait fait obstacle à une telle évolution après 1966. Il s’en suit l’ éclatement des systèmes ferroviaires intégrés et leur recomposition à l’échelle nationale et européenne.. Tout un appareil législatif se met en place depuis 1991. L’idée est de refonder les systèmes ferroviaires jusque-là monolithiques de chacun des Etats pour assurer l’accès aux réseaux d’autres acteurs. La directive-mère 91/440 prévoit la séparation comptable des activités ferroviaires. Mais, si chaque pays assure une libéralisation interne, les options retenues aboutissent à des modèles forts divergents. C’est alors que la Commission va appliquer des « paquets » ferroviaires plus directifs pour fonder un encadrement européen unifié sur les infrastructures, la concurrence du fret, la libéralisation du transport de voyageurs international ou encore la réduction de la fragmentation du marché intérieur européen (harmonisation et interopérabilité plus poussées).
Avec la Traité de Maastricht (1992) une autre dimension est la continuité des systèmes par le financement des infrastructures, les fameux « les maillons manquants » (ce qui permet d’interconnecter entre eux les réseaux nationaux pour constituer le système européen). Le Traité de Maastricht permet un cofinancement par le budget européen de ces infrastructures redéfinies par la suite sous l’appellation (Réseau Trans-Européen des Transports).
En octobre 2013, la Commission opte pour un réseau magistral avec 9 corridors inter-modaux, afin d’éviter le saupoudrage financier. Des investissements européens de plus en plus importants servent de levier pour augmenter les investissements dont la décision de réalisation reste du ressort des Etats-membres.
Une nouvelle réalité en couche ou feuilletée s’est substituée à l’intégration verticale des monopoles d’autrefois. Différents types d’acteurs, à différents niveaux, constituent chacun un espace autonome soumis à ses propres logiques d’intégration : gestionnaires d’infrastructure, opérateurs ferroviaires, industriels et représentants du monde cheminot. Les réseaux ferroviaires restent ainsi aux mains des gestionnaires nationaux qui coordonnent leurs efforts entre eux et homogénéisent leurs normes. Des équipements privilégiés comme les systèmes de signalisation embarqués s’additionnent aux équipements existants en espérant à terme s’y substituer.
De leur côté, les grands opérateurs ferroviaires développent des stratégies européennes, comme la Deutsche Bahn qui investit dans le fret et la logistique en rachetant des acteurs non allemands. Notons toutefois le maintien des coopérations européennes, en contradiction avec le principe de concurrence entre exploitants : cf le réseau Railteam entre SNCF, Renfe, Thalys, ou les structures de participations communes des grands opérateurs transnationaux de la grande vitesse (Eurostar, Thalys) etc. Au niveau industriel, « l’Airbus du rail » souvent appelé de leurs vœux par les politiques, n’existe toujours pas, du fait de divergences industrielles acquises, notamment franco-allemandes, comme le rappelle le cas récent d’Alsthom. Dans le monde cheminot, les représentations nationales toujours prégnantes se coordonnent en partie aussi à Bruxelles, signe d’un transfert très progressif des lieux du pouvoir.
Pour conclure, la construction d’un espace européen unifié va à l’encontre de la coopération entre réseaux monopolistiques. Elle privilégie une régulation par le marché et une recomposition du secteur par « couches distinctes » et largement indépendantes : séparation des gestionnaires d’infrastructures des opérateurs de transport proprement dits, au risque de la complexité due à une intégration multi-niveaux : interétatique (entente entre gestionnaires d’infrastructures), cadre commun d’exercice et interopérabilité technique (UE), opportunités des acteurs : toutes ces formes n’avancent pas à la même vitesse.
Le risque d’une étoile ferroviaire pâlit face au coût du train vis-à-vis du car par exemple.
Intervention de Jean-Pierre Loubinoux : De l’Europe au monde, rail et mondialisation
Paul Véron donne la parole à Jean-Pierre Loubinoux, directeur général de l’UIC depuis 2009 après une carrière internationale à la SNCF. Jean-Pierre Loubinoux préside la Commission Transport du Centre français du Commerce extérieur (CFCE) et la Commission France- Argentine au Medef.
Le petit film « Rail Charts a New World » permet d’introduire le propos.
L’UIC est avant tout une plate-forme technique regroupant beaucoup d’experts, découpant le monde en continents. Cette plate-forme technique a élaboré pas mal d’études qui sont à l’origine des standards internationaux aujourd’hui. L’UIC est la référence mondiale sans être organe de certification. L’UIC a des partenariats avec des institutions politiques (l’UE ou l’ONU) et avec des acteurs financiers (Banque mondiale, etc.). L’UIC organise une cinquantaine d’événements annuels dans une trentaine ou quarantaine de villes du monde. Cette plate-forme technique maîtrise tous les aspects des systèmes ferroviaires, ce qui permet de réunir des entreprises ferroviaires par ailleurs concurrentes entre elles. Le système ferroviaire est un système fermé au plan technique.
L’UIC est aussi un observatoire géopolitique unique, car la mobilité des biens et des personnes est liée aux flux économiques, fédérateurs ou destructeurs de stabilité et de relations entre les pays. Le transport se traduit par l’accessibilité (de la globalisation au désenclavement régional). Ce que l’on observe, c’est une forte crise financière et politique. Pensons au Proche et Moyen-Orient, à l’incertitude sur l’Egypte, aux crises en Afrique de l’Ouest où le manque d’infrastructures de transport panafricaines est patent, à l’enlisement de la crise syrienne, à la fragilité du verrou jordanien et à la déstabilisation de l’Irak, pays aux immenses ressources qui ont des impacts sur les flux.
La crise entre la Russie et l’Ukraine peut impacter des flux économiques considérables. La Russie peut changer d’alliance et se tourner vers la Chine. La baisse de l’euro peut nous être favorable sauf quand on achète le pétrole en dollar, la crise financière et des dettes souveraines ont aussi des impacts sur les transports. Cela conduit à une fragmentation géographique, une diversité politique, une désintégration économique, et des replis nationaux. Le chemin de fer est synonyme de longues distances, de liens internationaux, d’investissements très importants qui ont besoin de stabilité.
Et pourtant, le chemin de fer incarne des valeurs fondamentales
C’est un système capacitaire, un système très sûr. Le train est de plus en plus reconnu comme un mode de transport à faible émission de gaz carbonique et utilisant peu d’espaces. Il développe aussi beaucoup de R&D. La grande vitesse sert de vitrine technologique. Le train est aussi un facteur de développement du PIB et créateur d’emplois (2 millions rien que pour l’Europe, 7 millions dans le monde). Lors de la crise de 1929, Roosevelt avait relancé l’économie par le développement des Inter States. Obama a tenté le même choix ainsi que Dilma Rousseff au Brésil. Ce n’est pas un développement artificiel, mais une réponse à un besoin attendu. C’est corroboré par les chiffres de l’OCDE : l’ensemble des flux de fret devrait être multiplié par 4 d’ici 2050, le ferroviaire devrait voir sa part de marché augmenter. Les flux devraient être multipliés par 7 au sein de l’Afrique, par 4 au sein de l’Asie. 11 000 milliards de dollars sont investis dans le monde dans les infrastructures de transport : 40% dédiés au ferroviaire. Jusqu’à présent, les budgets des transports des Etats ne donnaient pas une grande place au ferroviaire. A présent ils doivent assurer la rénovation de lignes existantes, la construction de lignes nouvelles, l’optimisation des infrastructures et du matériel existant, et la construction des petits maillons manquants. Certes les guerres détruisent toujours les maillons fixes, mais c’est très facile à reconstruire pour rétablir des corridors de très longue distance.
Les grandes tendances depuis 2009 montrent une baisse du fret et du transport de passager. Cependant, la demande à long terme pour le chemin de fer est forte, sachant que bailleurs de fond et politiques privilégient de plus en plus le rail. Le chemin de fer sert de colonne vertébrale dans un corps de modes de transport. Nous ne sommes plus dans une logique d’ouverture à la concurrence pour baisser les prix et satisfaire les clients, mais de plus en plus dans une philosophie de complémentarité modale. Le fret devrait être multiplié par 12 et les voyageurs par 8, d’ici à 2050.
Les chaînes logistiques envisagent d’aller du porte à porte, plutôt que de se borner à du gare à gare. D’où un nouvel accent sur les complémentarités mer-air, sur les trois axes transsibériens qui pourraient se développer face à la domination écrasante de la route maritime Asie-Suez-Europe, et qui pourraient relier Riga (port en eau profonde qui ne gèle jamais) à l’Amérique par la mer.
La nouvelle révolution technologique sera la digitalisation, en termes d’intermodalité et de gestion de la maintenance. Les programmes de signalisation satellitaire seraient beaucoup moins coûteux que les installations sur balises fixes des infrastructures.
La recherche se développe aussi, avec par exemple un programme européen très ambitieux Shift to Rail (1 milliard d’euros). Trois lettres (L.L.L) pour Long, Lourd et Loin sont mises en avant pour augmenter la capacité. En Europe les trains font 750 mètres de long, ils font 5 kilomètres de long en Chine ou Amérique du Nord. Les trains convoient 1800 tonnes en Europe, 5000 en Russie ! Les ambitions pour augmenter la fiabilité des équipements et diminuer les coûts de maintenance restent à l’ordre du jour.
Un deuxième film plus historique retrace l’histoire de l’UIC.
https://www.youtube.com/watch?v=OrVcpuOd6Ys
Echanges avec la salle
* Denis Wolff : l’alliance franco-roumaine pour la création de l’UIC a-t-elle été influencée par le géographe Emmanuel de Martonne ? Quid des relations ferroviaires entre la France et l’Italie ?
- Il y a eu une revanche des Français face aux accords de Berne dominés par les Allemands. La décision de créer l’UIC est assurément politique. La France ne voulait pas porter cette vision en première ligne tout en souhaitant freiner l’expansion ferroviaire nord-sud qui se recréait après la Première Guerre mondiale au profit des puissances centrales. La chance de l’UIC fut d’avoir dès 1922 une vision mondiale, partagée par les Russes, les Chinois, les Japonais, dès l’origine. De fait, la reconnaissance actuelle de l’UIC par les instances internationales tient à la vision mondiale qui anime toujours l’UIC aujourd’hui.
Sur les relations France-Italie, il y a eu rupture des relations avec un arrêt à Modane (problème avec la société Artesia), une opposition au tunnel de base traversant les Alpes, une opposition aux lignes grand vitesse à cause des effets tunnel.
- On parle d’interopérabilité, de vision d’intégration, mais il y a beaucoup d’obstacles. Dans les années 1955, il y avait déjà des Trans Europ Express traversant le Simplon et l’Europe balkanique. Les liaisons grandes vitesses qui leur ont succédé sont sur des schémas de grands corridors qui les rentabilisent. Les passages aux frontières sont facilités pour la grande vitesse. Reste que les grands opérateurs sont concurrents. Mais il reste des nécessités d’homologation des machines, à partir des fiches de l’UIC.
- Pensons à la ligne grande vitesse de PACA pour relier Nice à Paris en 4heures. Le projet fut abandonné au profit d’un ferroviaire régional. On parle beaucoup de très longues distances pour le fret, mais l’acceptabilité est plus forte pour un ferroviaire local qui coûte cher aussi. Est-ce que les collectivités locales peuvent supporter ces coûts ?
- Le coût du ferroviaire peut être un handicap rappelle Antoine Beyer.
- La grande vitesse coûte très cher confirme Jean-Pierre Loubinoux, ce qui suppose de desservir de grands bassins de population. Au-delà de 4 heures, l’avion reprend les parts de marché. Mais comme chacun veut que le TGV s’arrête chez soi pour contribuer au projet, la vitesse y perd automatiquement. Cependant, même les régions traversées, desservies par des dessertes capillaires de qualité avec de bonnes correspondances, peuvent en profiter.
- Antoine Beyer donne aussi l’exemple des TER à grande vitesse, développés en Nord-Pas-de-Calais.
* Henry Jacolin : la mise au point du TGV aurait-elle été possible avec une SNCF séparée de Réseau Ferré de France ? Séparer infrastructure et exploitation a désintégré un système par nature intégré.
- JPL : non ce n’aurait pas été possible, car cela aurait été trop complexe. Le record de vitesse à 574,8 km/h a été limité par la caténaire, preuve que le mobile n’est pas séparable de l’infrastructure. C’est facile dans les télécoms ou l’électricité de séparer les mobiles et leur infrastructure. Pour le rail, ça pose beaucoup de problèmes. L’intégration technique est capitale. Le regroupement en cours de RFF et SNCF a pour objet, peut-être, de refaire travailler ensemble des gens faisant le même métier : rénover les lignes existantes suppose d’optimiser les plages horaires et donc de s’entendre entre opérateur et gestionnaire d’infrastructures.
* Michèle Briançon : au kilomètre, le rail revient très cher. Mais le coût des accidents de la route et les coûts écologiques des autres modes de transport plus polluants ne sont-ils pas également très chers ?
- 1 km d’autoroute en plaine : 9 millions d’euros, alors que 1 km de LGV : 20 millions d’euros. On économise du foncier en mettant du ferroviaire (15 mètres seulement pour du ferroviaire). En termes de sécurité ou de pollution, et des autres coûts externes, le différentiel de prix s’amoindrit.
- JPL il faut un ensemble optimisé et faire travailler les modes ensemble, avec des modes concurrence honnêtes. Les comparaisons des rentabilités respectives ne sont pas faciles entre modes. Pour rentabiliser des rames TGV, il faut une occupation à 80% et trois à quatre rotations. Le coût environnemental on sait de plus en plus le mesurer. Mais cette rentabilité est sociale, pas financière.
- AB : tous les transports sont subventionnés, du fait d’une idéologie de la mobilité. Ni la route, ni le fer, ni la voie d’eau, ne payent directement la totalité des coûts. C’est toujours le contribuable. Quand on prend 100 euros de billet de train, on paye 25 euros d’accès au réseau. Quand on prend sa voiture on ne paye pas l’accès à la route (sauf sur l’autoroute)
*Michel Sivignon : on retrouve dans les petits films ou les cartes une confusion cartographique entre ce qu’on va développer et l’existant : on voit de vastes corridors, mais n’est-il pas plus facile de remplir un bateau en Chine pour San Francisco, plutôt que de faire Chine – Riga en train, puis Riga-Etats-Unis en bateau, avec quantité de frontières à traverser.
- JPL : un mode ne va jamais supplanter l’autre, c’est un mode qui complète l’autre. Les marchandises ont parfois besoin de plus de rapidité. Shanghai-Rotterdam = 21 à 27 jours. Par le train, on est à 18 et on vise 15 jours. La philosophie du zéro stock reporte le stock sur l’opérateur : plus on réduit le temps, plus on réduit la valeur marchande du stock mobile. Aujourd’hui BMW et autres marques de luxe font le trajet en train. Il y a donc une place ferroviaire justifiée par la réduction de la valeur des stocks, l’utilisation d’infrastructures existantes, la volonté des armateurs de mieux utiliser leurs propres bateaux dans l’océan indien par des allers-retours chaque fois à plein.
- AB : La saturation des ports chinois et le redéploiement vers l’intérieur chinois donne une rentabilité au fer ; mais les aléas russes posent question. Le transport sert de support à la communication de l’intégration européenne qui n’existe pas. On rend tangible l’intégration par le réseau.
*Christophe Vidal : Demande de précisions sur la R&D : ce qui compte, c’est l’accès à l’information en temps réel, la dématérialisation du titre de transport, ce qui diminue considérablement les coûts de la distribution des billets, les systèmes intelligents par puce qui peuvent anticiper la maintenance préventive. La Corée du Sud travaille sur la maintenance préventive ce qui réduit considérablement les coûts de maintenance. La technologie de signalisation satellitaire se fait dans le contexte de rivalité entre Galileo, GPS, etc. mais tout cela s’adresse à des systèmes ayant une fréquence de 10 trains par jour, donc dans des zones peu denses en circulation ferroviaire, là où jamais ni le gérant d’infrastructure ni l’opérateur n’accepteront d’investir. Donc ce sera très utile dans les Carpates, la Sibérie, le cœur des Etats-Unis.
Les échanges se poursuivent dans le hall de l’UIC, décoré par de nombreuses œuvres d’art.
Un cocktail, offert par l’UIC, a réjoui les papilles des participants. De l’avis de tous, ce fut une soirée très réussie, grâce aux intervenants, aux documents présentés et à la qualité de l’accueil offert par les représentants de l’UIC, Jean-Pierre Loubinoux, Paul Véron et Marie Plaud.
Compte rendu : Olivier Milhaud et Maryse Verfaillie.
Merci à Denis Wolff, Antoine Beyer, Henry Jacolin et Paul Véron pour leur relecture attentive