Les Cafés Géo de Lyon accueillent Jean-Paul Bravard, Professeur émérite de géographie à l’Université Lyon 2, pour évoquer la gestion des grands fleuves en Chine. Plusieurs voyages au Vietnam, en Chine et dans les pays du Mékong dans le cadre de missions d’expertise ou de participations à divers colloques, lui ont permis d’accumuler certaines observations qu’il nous livre aujourd’hui.

  1. La répartition géographique de la ressource

Même si l’on peut noter une progressive ouverture, la question de la gestion de l’eau en Chine fait encore l’objet de peu de publications en raison notamment des enjeux politiques qu’elle soulève. Ce pays qui compte pas moins de 20% de la population mondiale ne représente que 7% des ressources en eau de la planète. L’eau est donc un enjeu primordial pour la société chinoise. 50% des fonds de la Commission nationale du développement et de la réforme lui sont d’ailleurs consacrés. Malgré tout, près de 400 villes et de 30 millions de ruraux sont rationnés en eau.

Pour synthétiser, une ligne est-ouest qui court de Shanghaï jusqu’à Chongqing à peu près différencie une Chine sèche d’une Chine humide. A l’ouest et au nord, le volume des précipitations annuelles est souvent inférieur à 400 mm d’eau. A titre de comparaison, le volume moyen en France est de 800 mm et le Bassin parisien, qui manque d’eau, compte en moyenne 600 mm de précipitation. En conséquence, le nord et l’ouest de la Chine sont confrontés à l’avancée des déserts et au phénomène des pluies acides ce qui n’est pas sans effet sur les sols. A contrario, la Chine du sud est bien mieux pourvue en eau.

Cette dichotomie nord-sud s’explique en bonne partie par l’impact du relief sur les masses d’air. Les chaînes de montagne du sud bloquent l’humidité de la mousson estivale. L’Himalaya notamment empêche les masses d’air humide de remonter par le sud ce qui explique la sécheresse du plateau tibétain. Les flux qui pénètrent par la Mer de Chine ne suffisent pas à pallier cette carence. Pékin par exemple est une ville froide en hiver qui ne connaît pas la mousson avant juillet alors qu’au sud, elle commence au mois de mai. Lorsque la mousson s’arrête dans le sud de la Chine, Pékin manque d’eau. Certes les barrages assurent une réserve conséquente en eau potable pour la population mais ils ne permettent pas d’alimenter en eau l’agriculture.

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