Compte rendu café géographique de Saint-Brieuc du 25 février 2016

Marcel Dorigny, professeur à l’université de Paris 8, est l’un des spécialistes des processus d’abolition de l’esclavage et des mouvements indépendantistes. Il est l’auteur de nombreux ouvrages, en particulier « Atlas des premières colonisations : XVe-début XIXe siècle », Editions Autrement, 2013 ; « Atlas des esclavages » en collaboration avec Bernard Gainot, Editions Autrement, 2013 ; « Grand Atlas des empires coloniaux » Editions Autrement, 2015.

flyer une géographie des esclavages

Marcel Dorigny rappelle que le sujet proposé par les Cafés Géographiques étant très vaste, il abordera  aujourd’hui l’esclavage colonial, celui issu de la traite.

Si le plan chronologique s’impose pour comprendre l’engrenage qui se met en place à partir du XVIe siècle, l’approche géographique est indispensable car l’esclavage colonial a modifié durablement les territoires de trois continents.

En guise d’introduction : l’esclavage, une pratique permanente

L’esclavage n’est pas une invention de l’époque coloniale, consécutive aux Grandes Découvertes. C’est une pratique permanente qui n’est attaché ni à une civilisation, ni à un espace géographique, ni à une époque donnée. L’un des fragments d’écriture les plus anciens est un décompte d’esclaves, en Mésopotamie qui date des environs de 2600 av. J.-C. Les grandes civilisations de l’Antiquité (Egypte pharaonique, Grèce antique, République romaine) étaient des sociétés esclavagistes. Le travail humain était principalement un travail servile. Captifs de guerre, les esclaves étaient vendus sur des marchés d’esclaves à Rome, à Athènes…L’esclavage a existé partout, dans les empires précolombiens, dans les empires arabes ainsi qu’en Asie du sud-est.

En Europe occidentale, à partir du Vème siècle, un grand nombre de pouvoirs locaux succèdent à l’Empire romain. Ces sociétés médiévales n’ont plus les moyens militaires de capturer des esclaves. L’esclavage va donc lentement disparaître dans le courant du Moyen Age, il sera remplacé par d’autres pratiques comme le servage. Le travailleur forcé est sur place (plus besoin de razzias), il va être asservi c’est-à-dire qu’on lui impose un ensemble de contraintes, c’est le régime féodal. Si l’esclavage antique n’existe plus entre la Loire et le Rhin, il perdure en Europe méridionale (Sud de l’Espagne, Portugal, Sicile, Chypre) ; ces formes antiques qui survivent vont rencontrer le nouvel esclavage, l’esclavage colonial.

1 – Des Grandes Découvertes…

Depuis l’Antiquité, l’Europe occidentale reçoit des produits de luxe (soie, porcelaine, parfums, épices) d’Extrême-Orient et de l’Inde acheminés par la route de la soie. Ce réseau ancien de routes commerciale transcontinentales entre l’Asie et l’Europe atteignait les ports de la Méditerranée orientale (Antioche) où les marchands italiens (Vénitiens, Génois, Florentins) récupéraient la marchandise pour la vendre sur les places européennes.

La formidable expansion de l’Empire ottoman à partir du XIVe siècle compte parmi les plus grands bouleversements de la période. Avec la chute de l’Empire byzantin (prise de Constantinople en 1453), tous les produits venus d’Extrême-Orient passent par l’Empire ottoman. Les Turcs imposent de nouvelles taxes en particulier sur les épices qui deviennent extrêmement chers. L’expansion territoriale (prise de Chypre en 1570, pièce maîtresse de l’empire commercial de Venise)  leur assure le contrôle des routes commerciales entre la Méditerranée et l’Océan Indien. Pour se dégager de ce passage obligé, naît dans les milieux des navigateurs, une idée simple mais géniale, trouver une autre voie commerciale. Initié par l’Infant Henri le Navigateur en 1415, les  Portugais vont chercher à contourner, par voie maritime, l’Afrique pour accéder à l’Océan Indien et atteindre la source des produits. Ces navigateurs portugais qui dessinent les premières cartes maritimes (les portulans) vont mettre trois quarts de siècle(1488) pour  trouver un passage au sud de l’Afrique qu’ils baptisent le Cap de Bonne Espérance. A mesure qu’il avancent dans la découverte des côtes africaines, ils entrent en contact avec les sociétés africaines avec lesquelles ils échangent des produits. Il y a deux produits qui les fascinent : l’or (« la famine monétaire » Marc Bloch, de l’Europe va cesser avec la découverte et la conquête de nouveaux mondes qui rempliront les trésors européens et favoriseront  l’expansion commerciale de l’Occident) et les esclaves. Il y a, en effet, à proximité des côtes africaines des marchés d’esclaves internes à l’Afrique. Les Portugais achètent des esclaves qu’ils amènent dans un premier temps au Portugal et au sud de l’Espagne (travail des cultures irriguées qui exigent une main d’oeuvre importante) puis sur les îles au large des côtes de l’Afrique (Madère, Canaries, Cap Vert, Sao Tomé, Principe) où ils se sont installés. Ces îles peuplés d’esclaves achetés sur le continent africain marque le début de la traite négrière. L’économie de plantation (y compris la canne à sucre) commence là. Les Portugais ont « inventé » cette nouvelle forme d’esclavage par déportation d’une partie de la population d’Afrique.

Pendant que les Portugais longent les côtes africaines à la recherche d’un passage, les Espagnols, recherchent d’autres routes maritimes pour atteindre l’Extrême-Orient. Christophe Colomb qui a offert ses services aux Rois Catholiques, Isabelle de Castille et Ferdinand d’Aragon, et qui a lu les récits de Marco Polo, a un raisonnement imparable : puisque la terre est une sphère, il faut naviguer vers l’ouest pour arriver à l’est. Il pense pouvoir atteindre en 3 à 4 semaines les côtes de l’Inde ou de la Chine, mais il fait deux erreurs : la Terre est beaucoup plus grande que dans ses calculs ; entre l’Europe et l’Asie, il y a un continent (que l’on appellera en 1507 l’Amérique). Les quatre voyages de Christophe Colomb (1492, 1493, 1498 et 1502) et sa découverte des Antilles marquent le début de l’implantation espagnole sur ce nouveau continent.

Là où s’installent les Espagnols, essentiellement dans les grandes Antilles (Hispaniola, Cuba, Porto Rico, la Jamaïque), la population autochtone disparaît en une génération. Pour exemple, les Indiens d’Hispaniola sont passés de 8 millions d’habitants en 1492 à quelques centaines en 1540. Les causes de cette destruction humaine sont diverses : massacres, persécutions longuement décrite par Bartolomé de las Casas, travail forcé, mais la principale cause de cette mortalité fulgurante est « le choc bactériologique ». Les Européens apportent, sans le savoir, des microbes, des virus (en particulier celui de la rougeole) pour lesquels les indigènes ne sont pas immunisés. Se pose alors pour la poignée d’Espagnols sur place, guerriers, administrateurs, religieux, la question de la mise en valeur de ces nouvelles terres. La solution est très vite trouvée, la déportation de population, inaugurée par les Portugais. Deux dates significatives : 1492, arrivée de Christophe Colomb à Hispaniola (Saint-Domingue) ; 1503, premier navire acheminant des esclaves d’Afrique dans les colonies espagnoles d’Amérique. La mécanique s’enclenche, elle fonctionnera jusque dans les années 1860 (1863, date du dernier bateau négrier connu).

2 – …à la traite atlantique

Pour illustrer son propos, Marcel Dorigny présente plusieurs documents.

Le rythme de la traite atlantique (1514-1866)

Le rythme de la traite atlantique (1514-1866)

Le premier est un graphique représentant le rythme de la traite atlantique de 1514 à 1866. Que constate-t-on ? Jusqu’à la fin du XVIIe siècle, la déportation de main d’oeuvre reste limitée (la barre des 20 000 esclaves embarqués par an n’est atteinte que vers 1680). A partir des années 1740-1750, l’accélération spectaculaire, avec un rythme annuel de 70 à 90 000 esclaves transportés, correspond à l’introduction de la monoculture sucrière (à noter de brusques chutes du trafic négrier lors des guerres intra européennes). Ce rythme soutenu se poursuit jusque dans les années 1830-1840 et correspond à l’économie de plantation sucrière dévoreuse d’hommes dans les îles à sucre (Jamaïque, Saint-Domingue) mais aussi à Cuba et au Brésil pour la canne et le café. Le besoin de main d’oeuvre est croissant car les techniques agricoles n’évoluent guère dans le cadre d’une exploitation extensive (s’il faut plus de sucre pour satisfaire la demande de l’Europe, il faut plus de plantations et donc plus d’esclaves). Pendant près de deux siècles, l’Atlantique,  sillonné de bateaux négriers qui transportent 300 à 400 esclaves entre les côtes d’Afrique et les colonies européennes d’Amérique, devient une sorte d’autoroute du trafic négrier. Le record absolu est atteint en 1829, avec plus de 100 000 captifs transportés, alors qu’à cette date les grandes puissances avaient déjà signé la convention de Vienne (1815) interdisant le trafic négrier… La traite illégale triomphe. Progressivement, on constate un reflux de la traite négrière sous  l’effet de l’action des mouvements antiesclavagistes (rôle des philosophes des Lumières) très actifs, en particulier, en Angleterre et des abolitions successives de l’esclavage aux Amériques (Angleterre en 1834, France en 1848). C’est l’abolition de l’esclavage qui va assécher le trafic négrier.

Les routes du commerce négrier (XVIe-XIXe siècle)

Les routes du commerce négrier (XVIe-XIXe siècle)

Le deuxième document complète le graphique  précédent, il s’agit des routes du commerce négrier du XVIe au XIXe siècle. On distingue trois circuits principaux.

Le plus connu, c’est le « commerce triangulaire » (ou « circuiteux »). Le « triangle » fonctionnait ainsi : les bateaux partaient d’Europe (Bristol, Londres, Liverpool, Bordeaux, Nantes, La Rochelle…)  en direction des côtes d’Afrique  où étaient achetés les esclaves ; puis ils traversaient l’Atlantique pour rejoindre les îles de la Caraïbe et le continent américain où les captifs étaient vendus. Enfin, les navires chargés de sucre, de café, de cacao rentraient en Europe où ces productions coloniales étaient vendues. Ce commerce supposait une très faible intervention monétaire. Les esclaves, sur les côtes d’Afrique, étaient achetés avec des marchandises, des produits manufacturés (tissus, armes, verroterie, alcools…) qui remplissaient les cales des bateaux quittant les ports d’Europe. Tandis que la façade atlantique de l’Europe travaillait directement pour la traite, l’intérieur de l’Europe, loin des ports, travaillait, elle aussi, pour la traite négrière (tissus de la vallée du Pô, armes de la vallée du Rhin). Pour compléter son analyse, Marcel Dorigny précise que, finalement, ce qui circule sur l’Océan Atlantique, c’est du travail (les produits manufacturés, les esclaves évalués en fonction de leur force de travail, les produits tropicaux), essentiel pour comprendre le développement d’une économie préindustrielle en Europe et son l’enrichissement, l’histoire de l’Afrique (absence de démarrage d’une économie préindustrielle, perte de sa force de travail et déficit démographique) et le démarrage de l’Amérique (force de travail et apport démographique).

Le deuxième circuit (le premier en nombre d’esclaves transportés), c’est le trafic sud-sud, en « droiture », des côtes de l’Afrique (du Golfe de Guinée à l’estuaire du Congo) au Brésil qui va être pendant des siècles le premier réceptacle de la traite négrière. C’est le commerce portugais (le Brésil est une colonie portugaise jusqu’en 1822) : navires, capitaux, encadrement sont entre les mains des Portugais, les seuls de l’Europe à avoir une implantation continentale en Afrique. Le passage par Lisbonne est l’exception.

Le troisième circuit est celui de l’Océan Indien. Les esclaves sont achetés sur les côtes de l’Afrique de l’Ouest, de l’Afrique de l’Est ou à Madagascar (grand réservoir d’esclaves) et sont vendus dans les colonies européennes de l’Océan Indien, principalement les îles Mascareignes (île Bourbon, île de France). Ce trafic (moins important que les deux autres) est le seul des commerces négriers européens à être en contact avec le commerce négrier arabe. Zanzibar est le grand marché d’esclaves de la côte est de l’Afrique, où se côtoient marchands européens et marchands arabes. Les Arabes remontent, par la Mer Rouge et le Golfe Persique, très loin au nord à l’intérieur du continent eurasiatique pour vendre, jusqu’à la cour du tsar de Russie, des esclaves (Hannibal, esclave de Pierre le Grand, est l’arrière grand-père maternel de Pouchkine).

Ces trafic négriers sur l’Océan Atlantique et l’Océan Indien sont coordonnés, commandités depuis l’Europe. Les puissances maritimes de l’Europe participent toutes à l’activité négrière mais quatre pays assurent plus de 90% de la traite (histogramme des pays européens organisateurs de la traite) :

Le Portugal,  petite puissance  qui, avec  4 650 000 esclaves déportés sur ses navires, a joué un rôle prédominant dans la traite et dans le peuplement africain du continent américain ; il est le grand pourvoyeur d’esclaves pour leur colonie, le Brésil, mais aussi pour les colonies des autres puissances (Espagne,  France,  Angleterre).

Le  deuxième  pays est  le  Royaume-Uni  avec 3 097 000 esclaves transportés. L’apogée de la traite, le XVIIIe siècle, correspond à l’âge d’or de la puissance commerciale maritime anglaise. Le  commerce  négrier  est un  commerce comme  les  autres, les Anglais sont  sur  tous  les  marchés.

Le troisième pays  est  l’Espagne  avec 1 600 000 esclaves déportés. Une place modeste en rapport avec l’immensité de son empire mais au XVIIIe siècle, l’Espagne, en déclin, a recours à la traite étrangère (Portugal, Angleterre).

La France arrive en quatrième position avec 1 313 000 esclaves. Ses colonies à esclaves sont pourtant petites, mais  Saint-Domingue (française depuis 1685)  devient  le premier producteur mondial de sucre au XVIIIe siècle. Avec 550 000 esclaves, Saint-Domingue, l’usine à sucre, est le marché d’esclaves par excellence. Avec l’indépendance de Saint-Domingue (qui devient Haïti en 1804), la traite française s’effondre.

L’histogramme des pays destinataires de la traite  est une bonne illustration de la géographie de l’esclavage de plantation. Deux grands ensembles géopolitiques reçoivent près de 10 millions d’esclaves, soit 80% de la traite atlantique : le Brésil et les Antilles toutes colonies confondues.

Le trafic des principaux ports négriers européens (1500-1815)

Le trafic des principaux ports négriers européens (1500-1815)

La traite s’appuie sur des ports de la façade atlantique de l’Europe. Le document que nous présente Marcel Dorigny met en évidence cette géographie des ports négriers européens.

Les trois grands ports négriers britanniques viennent en tête, Liverpool, Londres et Bristol. Liverpool a assuré, seul, 4 894 expéditions, soit autant que tous les ports français réunis. La traite anglaise a travaillé pour toutes les puissances coloniales, en particulier pour la France dont la demande de main d’oeuvre servile dépasse les capacités de sa flotte marchande. Liverpool, 1er port négrier d’Europe possède aujourd’hui un musée de l’esclavage et de la traite.

Le deuxième ensemble, beaucoup plus éclaté, est constitué des ports négriers français : Nantes (42% de la traite française), La Rochelle, Bordeaux, Le Havre-Rouen, Saint-Malo, Lorient, Vannes.

Les ports des Provinces-Unies, grande puissance navale, forme le troisième groupe : Amsterdam, Rotterdam, ports de la côte de Zélande.

L’Europe des ports négriers se concentre donc dans un triangle délimité par Liverpool, Bordeaux et Amsterdam. Ailleurs, les activités négrières sont plus modestes, mais peu de ports n’ont pas participé à la traite (seuls sont indiqués sur cette carte, les ports d’où sont partis plus de 10 expéditions). La traite est un « commerce ordinaire », moteur de développement économique qui favorise l’enrichissement des ports et de l’Europe occidentale.

Loin de ce triangle nord-atlantique, Lisbonne semble reléguée à un rôle subalterne (92 expéditions pendant la période considérée) alors que le Portugal,  a été le premier pays européen organisateur de la traite. Ce paradoxe souligne la nature spécifique du monde colonial portugais. Empire transatlantique au plein sens du terme, le Portugal a été la seule puissance européenne à s’implanter de part et d’autre de l’Atlantique sud. Le commerce négrier ne passe jamais par le Portugal, c’est un trafic sud-sud, « en droiture » dont les bases logistiques sont en Afrique et au Brésil. Lisbonne est la capitale du trafic négrier par son activité bancaire mais pas par ses activités portuaires. Notre intervenant souligne d’ailleurs que, à Lisbonne, il n’y a aucun monument, rien…qui rappelle le trafic négrier.

 

Marcel Dorigny soulève un autre aspect de la traite transatlantique qui aura des conséquences démographiques et sociales considérables : la place des femmes dans la traite.

Au début de la traite, de 1600 à 1680, la proportion des femmes est à peu près égale à celle des hommes. Elles sont essentiellement esclaves domestiques. Avec le développement de la grande plantation sucrière (fin du XVIIe siècle), les planteurs ont besoin d’une main d’oeuvre robuste pour travailler dans les champs de canne (des hommes de 15-30 ans). Les cargaisons de traite sont alors composées d’un tiers de femmes, voire beaucoup moins après 1830. Cette sous représentation choisie par les colons va avoir des conséquences démographiques et sociales considérables : le non renouvellement de la population servile (d’autant plus que les femmes pratiquent l’avortement ou l’infanticide pour que l’enfant à naître ne soit pas esclave – l’enfant étant du statut juridique de la mère) participe à l’augmentation de la traite… d’où des cargaisons toujours plus importantes de captifs au XVIIIe siècle.

Les traites vers Saint-Domingue et Cuba (1701-1866)

Les traites vers Saint-Domingue et Cuba (1701-1866)

Il s’agit d’un document représentatif de l’évolution de la traite négrière dans deux îles à sucre des Caraïbes, Saint-Domingue et Cuba.

Après le traité de Paris (1763) par lequel la France perd ses colonies d’Amérique du Nord (la Nouvelle France), et se replie sur ses colonies tropicales (Saint-Domingue, Martinique, Guadeloupe, Guyane, Mascareignes), l’orientation de la politique coloniale française est claire et ambitieuse : faire de la France le pourvoyeur de l’Europe en denrées coloniales (sucre, café). Saint-Domingue devient alors « l’île à sucre » par excellence, ce qui suppose une traite négrière intensive, visible sur le graphique, le nombre d’esclaves vers l’île dépassant les 45 000 par an (la moitié des esclaves partis d’Afrique sont vendus à Saint-Domingue). L’intensité de la traite est telle qu’à la veille de la Révolution française, 85% des habitants de l’île sont des esclaves…le soulèvement des esclaves en 1791, la faiblesse des planteurs et leurs querelles mèneront à l’arrivée au pouvoir d’un ancien esclave Toussaint Louverture, à l’abolition de l’esclavage en 1794 et à la première république noire indépendante du monde en 1804.

Espagnole, Cuba demeure longtemps en dehors des circuits négriers. L’effondrement de Saint-Domingue, suivi de l’afflux des colons français réfugiés, ouvre la voie à l’essor très rapide de la grande plantation esclavagiste, sucre à l’ouest, café à l’est. Cuba va prendre le relais de Saint-Domingue, dans l’économie mondiale. Le graphique met en évidence l’arrêt immédiat de la traite vers Saint-Domingue et son essor vers Cuba. Marcel Dorigny nous fait remarquer que jamais la traite vers Cuba n’atteindra les sommets de Saint-Domingue. La hantise d’un nouveau Saint-Domingue (l’île est secouée par une vague de soulèvements d’esclaves vers 1840) incite les planteurs à introduire la machine à vapeur et à chercher une main d’œuvre  de substitution(main d’œuvre chinoise venue de Californie).

3 – Des résistances aux abolitions…

Les résistances à l’esclavage

A la mise en servitude est intrinsèquement lié son contraire, la résistance. En 1503 arrive le premier navire négrier à Saint-Domingue, en 1506 a lieu la première révolte connue d’esclaves. La résistance est multiple, elle peut prendre la forme d’une résistance passive au sein de la plantation comme les avortements, les suicides, la rupture du rythme du travail,  ou encore les empoissonnements. Les planteurs vivent dans la peur permanente d’être empoissonné (toutes les tâches domestiques sont assurées par les esclaves). Beaucoup d’entre eux ont des goûteurs et lorsqu’il y a empoisonnement ou suspicion d’empoisonnement, la répression est brutale. La résistance peut être violente, l’insurrection, révolte collective, est l’acte de résistance qui a laissé le plus de traces écrites. Le rythme des insurrections d’esclaves dans l’espace caraïbe est une des constantes de la région ; il y a peu voire pas d’années sans révoltes.

Marcel Dorigny nous rappelle l’histoire de l’esclave  Makandal, symbole de toutes les résistances qui va marquer durablement les mentalités à Saint-Domingue. Parti en marronnage (il a fui la plantation de son maître), il mène pendant plusieurs années des révoltes dans le nord-ouest de l’île, des razzias sur les plantations et des empoisonnements. Chef charismatique des bandes d’esclaves marrons, ses pouvoirs deviennent mythiques lorsque arrêté et condamné au bûcher, il arrive à s’évader des flammes et à reprendre le combat. Repris, il est brûlé en 1758 mais le mythe de l’insurgé immortel va, à Saint-Domingue, perdurer  jusqu’à la révolution de 1791 dont beaucoup d’esclaves lui attribueront l’initiative. Aujourd’hui, il est considéré comme un symbole de la lutte noire anti-esclavagiste.

Les abolitions (fin XVIIIe-fin XIXe siècle)

L’abolition de l’esclavage s’effectue selon trois modalités.

Le premier scénario est exceptionnel, c’est celui de Saint-Domingue. L’esclavage a été aboli par une insurrection d’esclaves. Le soulèvement des esclaves d’août 1791 dans la plaine du nord-ouest de l’île  aboutit à l’abolition de l’esclavage deux ans plus tard (1793). Marcel Dorigny rappelle le contexte particulier de cette colonie française : un territoire très majoritairement peuplé d’esclaves (plus de 85%), le mythe Makandal qui encourage les esclaves à se soulever, la division des planteurs et surtout le contexte de la Révolution française (les députés de la Convention décrète à l’unanimité, en février 1794, la liberté générale, légitimant l’initiative de ses commissaires de la République envoyés dans la colonie, Sonthonax et Polverel, et mettant ainsi en accord le statut juridique des personnes et les principes des Droits de l’Homme). L’abolition révolutionnaire imposée par les esclaves à Saint-Domingue, devenue la République d’Haïti en 1804, est restée un cas unique  dans le processus de sortie de l’esclavage des colonies européennes.

Dans le deuxième scénario, le plus classique, l’initiative de l’abolition de l’esclavage revient aux  métropoles. Le mouvement abolitionniste international, impulsé par les Anglais se démarque du précédent haïtien en insistant sur son refus de la violence  et de tout projet d’abolition immédiate. Le schéma idéal est l’abolition graduelle, la première étape devant être l’abolition de la traite (la fin de la traite entrainant par voie de conséquence la fin de l’esclavage). En 1815, les puissances réunies à Vienne, sous la pression de l’Angleterre, déclarent illégale la traite négrière. Mais les espérances sont vite déçues, l’esclavage ne disparaît pas, une traite illégale s’organise rapidement. Par ailleurs, le processus d’abolition par degrés de l’esclavage s’effectue, dans les colonies, dans des rapports conflictuels. L’exemple le plus emblématique est celui de la Jamaïque, colonie anglaise depuis 1654. Ile à sucre et terre de révoltes des esclaves,  elle est secouée, en 1831, par une grande insurrection menée par l’esclave Samuel Sharpe qui sera violemment réprimée par les Anglais. Si l’ordre est rétabli dans la colonie anglaise, la répression provoque des débats dans l’opinion publique anglaise de plus en plus acquise au discours des abolitionnistes. En 1833, la Chambre des Communes vote l’abolition de l’esclavage dans les colonies de la  Couronne.

En France, avec le rétablissement de l’esclavage en 1802, les abolitionnistes s’organisent dans des sociétés (Comité pour l’abolition de la traite, Société française pour l’abolition de l’esclavage) en attendant le moment favorable. Le retour à la République en 1848 qui portent au pouvoir des abolitionnistes convaincus comme Victor Schoelcher et Arago, permet enfin l’abolition de l’esclavage dans toutes les colonies et possessions françaises (décret du 27 avril 1848).

Enfin, le troisième scénario correspond aux abolitions tardives dans les Etats indépendants issus des grands empires coloniaux (Etats-Unis, Colombie, Venezuela, Brésil…). Les indépendances dans ces territoires aux sociétés esclavagistes, ne s’accompagnent jamais de l’abolition de l’esclavage car ceux qui prennent le pouvoir sont eux-mêmes des propriétaires d’esclaves (comme les premiers présidents américains). Les abolitions sont proclamées, deux voire trois générations après les indépendances (deux exemples : Etats-Unis, indépendance en 1783, abolition en1865. Brésil, indépendance en 1822, abolition en 1888). Ces nations nouvelles se sont construites dans un premier temps grâce au maintien de l’esclavage.

La reconversion des économies coloniales esclavagistes

Avec l’abolition de la traite, les abolitions de l’esclavage et la répression de plus en plus efficace de la traite illégale, se pose alors, pour les planteurs, le problème de la main d’oeuvre, d’autant plus que les anciens esclaves refusent de travailler sur les plantations de leurs anciens maîtres. Le recours à l’importation de travailleurs sous contrat s’impose comme la seule solution. C’est l’engagisme.

L’engagé, on va d’abord le chercher en Afrique, réservoir traditionnel de l’esclavage. Marcel Dorigny donne l’exemple de la France : le gouvernement de Napoléon III concède à la compagnie de commerce Régis, de Marseille, le monopole pour l’introduction de 20 000 engagés africains dans les Antilles. C’est dans le bassin du Congo qu’ils seront recrutés selon une procédure légale : achats d’esclaves immédiatement affranchis, embarqués sur les bateaux de la compagnie en direction des Antilles françaises. Une nouvelle catégorie vient peupler ces colonies à esclaves : les engagés. Il y a aujourd’hui, en Guadeloupe, des « villages Congo » où vivent leurs descendants (ils ne se sont pas toujours bien intégrés à la population antérieure). En Europe,  cette pratique déclenche une vague de protestations (pétitions contre cette traite déguisée). Le contrat avec la compagnie est annulé en 1861 alors que 18 000 Africains ont déjà été introduits.

Une autre source de travailleurs est alors trouvée : les Indiens. Les Indes orientales étant sous contrôle anglais, la France signe, en 1861, un traité avec l’Angleterre pour organiser l’importation de main d’oeuvre indienne dans les colonies françaises. Cet engagisme indien va durer, pour la France jusqu’en 1898 et pour l’Angleterre jusqu’en 1917. Plus de 500 000 indiens seront introduits dans l’ensemble antillo-guyanais franco-anglais. Aujourd’hui, la culture indienne s’est perpétuée à Guyana (anciennement Guyane anglaise) mais aussi dans les Antilles françaises (le madras, tissu avec lequel s’habillent les femmes martiniquaises ; le colombo, un des plats les plus communs de la gastronomie antillaise). Les temples tamouls révèlent la permanence de la culture indienne en Martinique et en Guadeloupe. Dans l’Océan Indien, cette migration d’engagés indiens a encore été plus importante, notamment à Maurice et à La Réunion.

Indiens et production de sucre en Guadeloupe (1853-1892)

Indiens et production de sucre en Guadeloupe (1853-1892)

L’évolution de ces deux courbes est très significative : la population engagée est  le substitut à la main d’oeuvre servile sur les plantations sucrières de 1853 à 1883. Avec la crise sucrière à la fin du XIXe siècle (concurrence de la betterave  à sucre) l’importation d’Indiens s’effondre.

4 – … à l’esclavage contemporain

L’esclavage colonial va lentement disparaître à la fin du XIXe siècle, le « paradigme sucrier » n’est plus, au XXe siècle, le moteur de l’économie marchande. Pourtant les rapports publiés régulièrement par le Bureau des Nations Unies, ainsi que ceux des associations de défense et de lutte contre l’esclavage montrent que  l’esclavage est aujourd’hui très présent dans le monde. L’esclavage est pourtant interdit partout. Tous les pays, membres des Nations Unies, ont signé la Charte de l’ONU par laquelle l’esclavage est interdit (Article 4 de la Déclaration universelle des droits de l’homme « Nul ne sera tenu en esclavage ni en servitude; l’esclavage et la traite des esclaves sont interdits sous toutes leurs formes »).

Les formes d’esclavage, si elles sont différentes de celles de l’esclavage colonial, n’en existent pas moins. On distingue trois formes essentielles d’esclavage dans le monde aujourd’hui.

Planisphère, les esclavages contemporains

Planisphère, les esclavages contemporains

La première forme d’esclavage est un esclavage traditionnel ancestral. En Afrique (Mauritanie, Soudan, nord du Sénégal, Nigéria) persiste l’esclavage coutumier et le trafic d’enfants ; en Inde, au Pakistan et au Népal, la servitude pour dettes touche près de 12 millions de personnes ; en Asie du sud-est (Birmanie, Cambodge, Laos, Thaïlande) on pratique le trafic d’enfants achetés à des familles pauvres et vendus comme domestiques, ouvriers ou prostitués.

La deuxième forme d’esclavage, quantitativement la plus importante, est l’esclavage industriel (textile, mines, plantations), forme d’exploitation de la main d’oeuvre, souvent des enfants, dans des conditions de servitude extrême. Marcel Dorigny donne quelques exemples : dans l’industrie textile, la confection de ballons de football, au Pakistan, assurée par des petites filles de 7-8 ans ;  au Brésil, main d’oeuvre venant des favelas pour travailler dans des plantations de canne à sucre, réintroduite pour fabriquer du pétrole vert (l’éthanol)…

La troisième forme d’esclavage est l’esclavage domestique.  Il se pratique dans nos sociétés développées, en Europe, aux Etats-Unis. Il s’agit de petites filles (10  12 ans) que l’on va chercher dans les pays pauvres (Bangladesh, Indonésie, Philippines, Sri Lanka) pour travailler comme domestique dans les pays riches.   Cet esclavage domestique a été maintes fois dénoncées par les associations de lutte contre toutes les formes d’esclavage (à Paris, le Comité de lutte contre l’esclavage moderne) mais elles ont rarement eu gain de cause devant les tribunaux, les employeurs étant souvent des diplomates qui bénéficient de l’immunité diplomatique.

Aujourd’hui, les structures juridiques existent pour interdire toutes les formes de servitude; l’ONU publie chaque année un rapport détaillé de la situation dans tous les Etats mais…les formes de servitude ne disparaissent pas pour autant…

Questions

1 – Est-ce que l’on est en mesure de connaître le pourcentage de la population  déportée par rapport à la population totale de l’Afrique ?

La question est simple, la réponse beaucoup plus difficile.

Nous connaissons avec une grande précision les chiffres de la traite car les archives sont importantes (comptabilité tenue par les capitaines des bateaux négriers pour rendre compte aux armateurs) : 13 millions d’Africains déportés.

Ce qui est plus compliqué à préciser, ce sont les victimes à l’amont de la traite : la capture, le transport vers la côte, l’attente dans les forts (le plus connu est celui de Gorée) qui peut durer des mois et dans des conditions très précaires pour les captifs. Pendant longtemps, on avançait le rapport de 10 morts/1 déporté, soit 130 millions de morts. Aujourd’hui, à partir de calculs plus complexes qui tiennent compte en particulier de l’évaluation des densités de population en Afrique (systèmes agricoles, population des villes à partir de fouilles archéologiques, Gao, Tombouctou…) on avance le rapport de 5-6 morts/1 déporté, soit 60 millions de morts à l’amont de la traite.

Pour calculer les conséquences démographiques de la traite, il faut donc comptabiliser les déportés (les plus jeunes et les plus robustes), ceux qui sont morts avant l’embarquement et ceux qui ne sont pas nés.

Et pour répondre à votre question, il faudrait pouvoir évaluer la population de l’Afrique au moment de la traite, or l’histoire démographique de l’Afrique reste mal connue…

2 – J’ai deux questions : quel a été le rôle de l’Eglise catholique dans  l’esclavage ?  En tant que noir et haïtien, il y a une question que je me pose toujours quand je constate les ressemblances entre le vaudou haïtien et le vaudou bénin : le peuplement de Haïti provient-il majoritairement du Bénin ?

Concernant la 1ère question : pour l’Eglise catholique ainsi que pour l’Eglise anglicane, la traite négrière était un « bienfait » car elle agrandissait le royaume du Christ. Les captifs étaient automatiquement baptisés. L’Eglise n’a jamais condamné la traite et l’esclavage avant les abolitions, elle a accompagné le trafic négrier. Dans le Code noir français de 1685, les huit premiers articles concernent exclusivement la religion. Il y a eu, bien entendu, des prêtres et des pasteurs qui se sont élevés contre l’esclavage, en dissidence avec leur Eglise (Abbé Grégoire en France). En Angleterre, les grands leaders abolitionnistes, dans les années 1780, sont des pasteurs d’églises dissidentes (Wilberforce, Clarkson) qui atteignent le public lors de leurs sermons. La dissidence la plus spectaculaire est celle des quakers, aux Etats-Unis, au XVIIIe siècle, qui interdit à leurs membres de posséder des esclaves (Benjamin Franklin est le plus célèbre d’entre eux).

Concernant la 2ème question : Il est vrai que Haïti est l’île la plus africaine des Caraïbes (par ses paysages, sa culture) ; le vaudou « religion nationale » est très proche dans ses pratiques de celles  dans le Golfe du Bénin (Dahomey, Togo, Bénin). Mais il n’y a pas de statistiques fiables pour affirmer que la majorité des esclaves vendus à Saint-Domingue venait du Golfe du Bénin. Cette continuité culturelle entre les anciennes colonies esclavagistes et l’Afrique se retrouve aussi au Brésil, à Cuba. Il y a quelques années, le musée Dapper, à Paris, a organisé une exposition d’objets d’art venant du Brésil et d’Afrique ; les objets rituels fabriqués au XIXe siècle étaient quasiment identiques alors que les populations n’étaient plus en contact depuis 200 ans.

3 – Concernant les abolitions tardives dans les Etats indépendants issus des empires coloniaux européens, comme le Brésil, qu’est ce qui les amené à abolir l’esclavage ?

En Europe, l’opinion publique a beaucoup compté ; en revanche, dans ces nouveaux pays indépendants, l’opinion publique ne s’est pas mobilisée contre l’esclavage. Ce qu’il faut prendre en compte, pour comprendre ce qui a amené ces Etats à abolir l’esclavage, c’est la Révolution Industrielle qui est un des bouleversements les plus importants dans l’histoire de l’humanité. Les économistes, dès 1760, affirment que l’esclavage n’est pas rentable, qu’il est une forme archaïque du travail et que le travail libre lui est supérieur (on peut introduire la concurrence, la division du travail, les machines). Au XIXe siècle, la Révolution triomphante rend obsolète le travail servile ; l’esclavage devient progressivement, à partir des années 1840, une forme de travail dépassée. Les Etats indépendants d’Amérique qui vont entrer dans l’économie mondiale du marché vont s’adapter à cette nouvelle donne.

4 – C’est une expérience personnelle, j’ai rencontré, en Egypte, il n’y a pas si longtemps, des anciens esclaves qui affirmaient qu’ils regrettaient le temps, d’avant 1956, où ils étaient esclaves ?

Il y a quelques années, Arte a programmé une émission sur l’esclavage en Mauritanie. Les reporters qui avaient repéré une femme esclave dans une famille ont entrepris de la libérer, elle n’a jamais voulu. L’esclave n’est pas toujours d’accord pour être libre…

5 – Quelle a été l’incidence de l’esclavage dans les Antilles françaises au niveau économique, politique, social ?

Vaste question ! Les séquelles de l’esclavage ? La propriété (plus en Martinique qu’en Guadeloupe) reste entre les mains des descendants des colons. Ils possèdent la terre, les capitaux, ont réorienté leur stratégie d’investissement vers le commerce (les supermarchés appartiennent à des grands propriétaires). Bernard Hayotte, descendant d’une famille installée en Martinique depuis le XVIIe siècle est richissime. Il détient en franchise toutes les enseignes de la grande distribution en Guadeloupe et Martinique. Philanthrope et mécène, il a financé et inauguré sur un de ses domaines, la propriété Clément, un musée d’art contemporain (le seul dans la Caraïbe). Les grandes familles continuent à dominer la société. Chez les descendants d’esclaves, il y a un mal être qui s’exprime de différentes façons (en 2008, il y a eu de grandes grèves contre la vie chère). Sont-ils tentés par l’indépendance ? Certainement pas, les Antilles sont des départements français qui bénéficient des mêmes lois qu’en métropole, des infrastructures nécessaires à la population (scolaires, hospitalières, voirie, service postal…). Les Antilles, c’est l’Europe dans une Caraïbe pauvre. Un autre exemple pour vous montrer toute la complexité de la situation des Antillais : dans les années 1960, le taux de natalité était très élevé, et l’offre de travail insuffisante. La France a organisé le départ en métropole de milliers d’Antillais avec la garantie d’un travail (poste, gendarmerie, police et surtout hôpitaux) ; ils ont occupé les emplois subalternes, les postes de direction étant détenus par les « métro ». C’est cela aussi les séquelles de l’esclavage, le maintien d’une société hiérarchisée.

Mais l’héritage le plus difficile, c’est le mal être d’une grande partie de la population issue de ces sociétés esclavagistes.

Compte rendu rédigé par Christiane Barcellini
relu par Marcel Dorigny, mars 2016