Les assiettes en délire
Christian Millau, fondateur du guide éponyme avec Henri Gault (1972) sonne la charge contre la pédanterie culinaire dans un livre savoureux : Le guide des restaurants fantômes ou les ridicules de la société française (éd. Plon). Il dénonce, sous la forme de petits tableaux de restaurants imaginaires, la flatterie médiatique qui a eu raison des plus talentueux des cuisiniers, devenus « artistes du goût », « poètes des arômes », « compositeurs des sens », « architectes des saveurs », sans compter les « Mozart » de la pâtisserie qui n’ont d’égaux que les « Picasso » de la cuisine de chasse, en attendant les Proust de la madeleine et les Gracq des poissons de Loire. Les assiettes sont devenus un champ de bataille du design qui imposent, a minima, « un tracé de mangue sur turbot infusé à l’essence de kumbawa (sic)… Autrefois, c’était toujours plus de crème, toujours plus de truffe, pour faire riche et chic, maintenant c’est toujours plus de chutney, toujours plus de curcuma pour faire jeune et moderne ».




