La Mer d’Aral asséchée, son exploitation touristique.
Rive sud, près de Mouïnak

Bonne carte postale.

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Parmi les navires échoués sur les sables qui ont remplacé la Mer d’Aral, celui-ci est le seul à être vêtu non pas de rouille mais de peinture beaucoup plus fraîche. C’est qu’il est devenu un prototype, utilisé pour reportages photographiques et émissions de TV. On l’a donc repeint pour améliorer les contrastes. Etait-ce à la demande des photographes et cinéastes ou à l’initiative des sociétés locales ? Ces dernières en ont profité pour changer le nom de l’épave. Initialement, elle s’appelait « République Kirghize ». Mais on ne se trouve pas ici sur le territoire de la république en question, devenue indépendante. On l’a donc rebaptisée « Karakalpakskaïa », du nom de la république autonome incluse dans l’Ouzbékistan, où est localisée l’épave. On ne va tout de même pas faire de la publicité pour les concurrents.

Mauvaise carte postale

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Le même côté pile.

Les efforts de toilettage de l’épave ont tout de même été limités par le souci de ne pas faire de dépenses inconsidérées. A bâbord tout le bordage a été peint, mais à tribord on s’est limité au tiers avant, en laissant l’arrière dans sa rouille, puisque les bonnes photos doivent être prises sur l’autre flanc et au pire de trois quarts. On a également laissé de ce côté l’inscription ancienne de République  Kirghize, parce que repeindre les lettres coûte cher et qu’on ne la voit ordinairement pas sur les photos.

Tels sont les effets de la « mise en tourisme » de la catastrophe de la Mer d’Aral, dont l’exploitation de l’image, grâce à un petit investissement peut devenir profitable.

Bien sûr l’assèchement de la mer est unanimement attribué aux excès de l’irrigation en amont, pendant la période soviétique.

On peut tout de même relire Elisée Reclus: « Au commencement du siècle actuel (le 19°) l’eau baignait les collines dont la base est maintenant à 60 km du bord, et les Kirghiz montrent une mosquée construite jadis sur la rive orientale et qui en est éloignée maintenant de plusieurs lieues. Le désert de sable ne cesse de s’agrandir aux dépens de la solitude des eaux et l’on peut suivre du regard la formation des dunes sur le littoral » (Géographie universelle. Tome VI. P.413). Reclus écrivait ces réflexions en 1881.

 Michel Sivignon, avril 2001