Être jeune et périurbain : la double peine ?

par

Catherine Didier-Fèvre

Café de Flore (Paris 6e), le 29 janvier 2019

 

Depuis sa thèse soutenue en septembre 2015 à l’Université Paris-Ouest Nanterre, Catherine Didier-Fèvre a quitté son terrain de recherche et d’enseignement à Sens (Yonne) pour Lyon, où elle continue de s’adonner à deux activités en lien avec la géographie : transmission, d’une part, puisqu’elle continue d’enseigner en CPGE Littéraires et vulgarisation, d’autre part. Elle est en effet fidèle aux Cafés géographiques où elle intervient ce 29 janvier 2019 pour une deuxième fois cette année, après un passage par les Cafés géographiques de Lyon en septembre 2018 consacré au thème de la culture dans ces espaces. Si les deux intitulés des Cafés (Se cultiver dans les espaces périurbains : une mission impossible ?, Être jeune et périurbain : la double peine ?) peuvent laisser à penser le périurbain comme un espace en négatif, l’approche de celui-ci par les jeunes habitants montre une vision positive faite de pragmatisme et de débrouille.

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Le Grand Paris, dix ans après : et pourtant, il tourne!

par

Aurélien Delpirou et Cédrick Allmang

Café de Flore, le 19 février 2019

Le Grand Paris n’est pas un sujet nouveau pour les Cafés géographiques. Plusieurs personnalités sont intervenues sur ce sujet au cours des dix dernières années : Frédéric Gilli en 2010, puis Simon Ronai et Nicole Sergent en 2015 ont été invités au café de la Mairie, avant les élections régionales pour exposer les enjeux d’attribution et de répartition des compétences entre la Métropole du Grand Paris et le Conseil Régional.

Ce 19 février 2019, le propos est de dresser un bilan d’étape, une vue d’ensemble d’une construction du Grand Paris que Pierre Veltz qualifie de « coquille vide ». Le Grand Paris mérite-t-il vraiment qu’on organise pour lui les « Journées du Grand Paris » à l’École d’Urbanisme de Paris, installée depuis 2015 à Champs-sur-Marne ?

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La rivalité irano-saoudienne. Focus sur le Hezbollah libanais

La rivalité irano-saoudienne
Focus sur le Hezbollah libanais

Une conférence de

Didier Leroy

Chercheur à l’Institut Royal Supérieur de Défense
Professeur assistant à l’Université Libre de Bruxelles

A l’Institut de Géographie de Paris, le 9 février 2019

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La géopolitique pour les nuls. Comprendre le Moyen-Orient par les cartes

Pascal Orcier Cartographe et géographe
Festival Vagamondes  la Filature de Mulhouse samedi 12 janvier  2019

Le Moyen-Orient fait référence au mystère, à l’exotisme et on l’a parfois surinvesti. Mais il est   souvent défini de l’extérieur. D’où vient ce nom de Moyen-Orient ?

En 1914, l’empire ottoman était encore puissant, contrôlant l’Anatolie et le Proche-Orient tel que vu par les Français et qui comprenait les régions de l’Iran à la Palestine.

Pour les Anglais, le Moyen-Orient est la zone séparant l’Europe du monde indien, une zone intermédiaire allant de l’Iran à l’Égypte englobant la péninsule arabique et la Turquie

Il fallait contrôler cet espace qui va se singulariser. Après les accords Sykes&Picot de 1916, le Moyen-Orient va s’insérer dans le grand jeu mondial avec des acteurs limités au départ : ottomans, français, anglais et russes, des acteurs beaucoup plus nombreux aujourd’hui.

Comment concevoir sa place et celle de tous les autres sur un même espace ?

Comment situer la région dans les ensembles qui l’entourent ? L’Iran parait comme un intermédiaire en termes de peuplement. En effet, alors que la région est un des plus anciens foyers de peuplement, elle est aujourd’hui un creux sur la carte de la répartition mondiale du peuplement, entre les deux aires de peuplement dense que sont l’Europe et l’Asie du sud.. Cette région a perdu sa centralité politique depuis le Moyen-Âge où le monde rayonnait autour de Damas ou encore Bagdad , Constantinople puis Istanbul,. Aujourd’hui, la région est en retard de développement malgré un PIB de 3750 milliards contre 18 162 milliards pour l’UE, il est vrai.

La région est politiquement non structurée. Depuis 1981, des pays du Golfe sont bien réunis dans le CCG [Conseil de Coopération du Golfe], une réunion d’états riverains qui exclut l’Irak, le Yémen et l’Iran. Une alliance entre des régimes monarchiques traditionnalistes et riches, plutôt que de partenaires commerciaux. Le pauvre Yémen, l’Iran et l’Irak républicains n’ont pas été invités à la rejoindre  Bien que membres de l’OMC, les pays de la région fonctionnent avec des accords bilatéraux mais qu’ont-ils à échanger entre eux ? Ils importent leurs produits alimentaires et exportent des hydrocarbures, peu d’échanges sont possibles localement. Ils sont pourtant au cœur des flux mondialisés car même si l’approvisionnement européen en pétrole ne dépend plus uniquement du Moyen-Orient, il en va tout autrement pour les Asiatiques.  Les hydrocarbures moyen-orientaux sont déterminants pour les émergents d’Asie et 80% des importations de la Chine, de la Malaisie, de la Thaïlande, de l’Indonésie ou de Singapour passent par Ormuz.  C’est aussi une autre explication du désengagement américain  de la région. Les Etats-Unis sont de moins en moins dépendants de leur pétrole maintenant qu’ils ont développé la production nationale d’hydrocarbures non conventionnels. (Gaz et pétrole dits de schiste)

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Vers une politique plus égalitaire de l’espace public ?

Présentation par Edith MARUEJOULS, Docteure en géographie, Bureau d’études L’ARObE (L’Atelier Recherche OBservatoire Egalité), Chercheuse associée au laboratoire ADESS/CNRS de l’université Bordeaux Montaigne.

Ce Café Géo a eu lieu le mercredi 14 février 2018 exceptionnellement au sein de l’INU Champollion d’Albi à partir de 18h30. 

Présentation problématique :

Quelles relations peut-on faire entre la répartition différenciée des femmes et des hommes dans la cour de récréation, dans les loisirs, dans l’espace public, dans la charge mentale et l’urbanisme ? En quoi l’approche par le système du genre permet d’interroger la création, l’aménagement et les usages des espaces publics ?

La démarche qui consiste à étudier les espaces sous l’angle de la dynamique des rapports sociaux de sexe questionne notre « consentement collectif » à ce qui fait société. Observer ensemble les effets structurels du système de genre au cœur des inégalités basées sur le sexisme nous (re)donne du pouvoir en privilégiant les valeurs sur la norme. Au-delà des analyses statistiques et de la définition opérationnelle des inégalités, le débat s’articule alors autour des notions de mixité, de partage, et redéfinit les espaces publics comme espaces de négociation, de renoncement et d’égale liberté. De l’occupation légitime à l’occupation égalitaire, il s’agit de déconstruire l’appréhension des espaces et des équipements publics afin de dépasser les prescriptions d’usages pour proposer des espaces « d’émancipation » favorisant la relation entre les unes et les uns.

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L’Irak après Daech

Cyril Roussel, Université de Poitiers
Festival Vagamondes Mulhouse
12 janvier 2018

Réfléchir à l’Irak après DAECH revient à analyser les enjeux territoriaux car DAECH est un produit de l’Irak, né dans la région sunnite d’Anbar. Depuis les accords Sykes-Picot de 1916, l’Irak, dans la sphère d’influence anglaise, a conservé les 3 wilayats de l’empire ottoman: Bagdad, Mossoul et Bassora.

Dans les années 60, le régime de Bagdad a essayé de modifier la société où prédominaient les logiques communautaires, où se côtoyaient arabes, kurdes, turcomans, turkmènes, yazidis, chrétiens. Le prolongement de la plaine mésopotamienne (région d’Erbil) occupe une grande part du nord de l’Irak, où réside la majorité des Kurdes, minorité persécutée, disséminés dans un territoire enclave aux contours flous. Si DAECH se bat en plaine, les Kurdes se battent en montagne où ils mènent une guérilla depuis 1950.

Le mouvement politique kurde se structure au début des années 50 autour de la figure du général  Mustapha Barzani, ancien chef de tribu dont le fils Massoud, a dirigé la région autonome du Kurdistan irakien de 2005 à 2017,sans pour autant réussir à unifier le mouvement et mène la révolte de 1961

Face à eux l’Irak se construit autour de partis dont le parti Baas, que l’on trouve aussi au Liban et en Syrie, un parti nationaliste arabe,défendant une idéologie pan arabe qui s’oppose au nationalisme des Kurdes dont les revendications sont nationales. Émerge progressivement un mouvement pan-kurde, qui associe le PKK  (Peshmergas de Turquie), le PDK (Barzani) et l’UPK  répartis entre la Turquie, la Syrie et l’Irak.

Au début des années 70, le parti Baas vient de prendre le pouvoir à Bagdad et entame des pourparlers avec les Kurdes sur la reconnaissance d’une région autonome mais la loi promulguée par Bagdad en 1974 est rejetée par les Kurdes qui reprennent les armes. En 1975, l’Iran cesse de soutenir les Kurdes d’Irak en échange d’un accord avec Saddam Hussein sur le Chatt el Arab. Les Kurdes d’Irak sont isolés car le PKK qui naît en Turquie en 1978 a une couleur marxiste qu’ils ne partagent pas mais continuent à résister.

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Les nouvelles routes de la soie : le grand dessein chinois

Café Géographique de Saint-Brieuc, 9 novembre 2018

Emmanuel Véron, est géographe. Il vient de rejoindre l’Ecole Navale en tant qu’enseignant-chercheur de géopolitique et de relations internationales après quatre années à l’INALCO (Département des Etudes chinoises). Spécialiste de la Chine et sinologue, il a soutenu sa thèse en 2016. Ses recherches portent sur les mutations de la Chine et sur les aspects géopolitiques et géoéconomiques liés à l’expansion de la puissance chinoise. 

Emmanuel Véron se propose d’analyser dans le cadre de ce café géographique la géopolitique des « nouvelles routes de la soie »,  pour mieux comprendre le grand dessein chinois. Pour la première fois, avec ce projet lancé en 2013, la Chine  prend l’initiative d’un plan qui a une dimension globale (diplomatique, économique, éventuellement militaire) et qui a pour terrain l’espace mondial. Les conférences, tables rondes, colloques, articles, documentaires qui se multiplient sur le sujet sont révélateurs des questions qui se posent sur ce tournant majeur dans la stratégie chinoise d’expansion de sa puissance qui pourrait modifier l’ordre mondial.

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Israël, l’obsession du territoire

Julieta Fuentes-Carrera, Philippe Subra

Tout droit venue de Mexico où elle enseigne, Julieta Fuentes-Carrera est accueillie par Daniel Oster, qui, en guise de présentation, brandit haut son livre, qui donne son titre au Café de ce mardi 18 décembre : Israël, l’obsession du territoire, publié chez Armand Colin en 2018. Sous-titré Aménagement et géopolitique en Israël et en Cisjordanie, il s’agit de la version grand public de sa thèse préparée et soutenue en 2013 à l’Institut Français de Géopolitique de l’Université Paris 8. Philippe Subra, qui a collaboré à l’ouvrage, y travaille également. Spécialiste de la géopolitique de l’aménagement du territoire, il apportera à l’intervention un regard nourri de ses propres exemples français et européens, et une mise en perspective de cette somme à la fois récente et colossale.

Daniel Oster interroge Julieta Fuentes-Carrera sur ce qui a motivé le choix d’un tel sujet de thèse et la manière dont elle a conduit son travail de terrain. Réflexive, elle précise d’abord qu’elle n’est aucunement juive, ni arabe, ni n’a de lien affectif particulier aux territoires étudiés ; mais que sa première visite, en 1999, lui a montré une organisation spatiale inversée par rapport à celle du Mexique, et que cela l’a intriguée. Alors que dans son pays d’origine les populations précédaient les aménagements, en Israël, l’aménagement était réalisé avant l’arrivée de l’essentiel de la population actuelle (juive). D’où ces grandes autoroutes n’arrivant nulle part, ces HLM vides, attendant qu’on les peuple. Julieta Fuentes-Carrera fait alors quelques recherches sur Internet. Le site de l’IFG et une offre de thèse apparaissent parmi les résultats ; la bourse du gouvernement français tombe. Elle conduit alors son Master et son Doctorat à ce sujet.

Philippe Subra prend la parole : il s’agit, pour lui, de la mise en forme d’un travail entrepris pendant plusieurs années, où il dit n’avoir joué qu’un rôle mineur. La thèse est « remarquable » : elle explore une dimension du conflit israélo-palestinien totalement négligée. Elle a l’audace de montrer qu’un conflit qui « passionne », peut être abordé, au même titre que les territoires « calmes » que lui travaille, du point de vue de l’aménagement, et plus encore : que l’importance des politiques d’aménagement dans le conflit et dans la prise de contrôle du territoire est cruciale. L’intérêt de ce livre réside donc ici : dans l’explication du processus par lequel une stratégie d’Etat remarquablement intelligente, menée dans des contextes différents, aboutit à un constat sans appel : Israël contrôle aujourd’hui 90% du territoire de l’ancienne Palestine. Il ajoute qu’on a bien ici affaire à un livre de chercheur, et non de militant : l’ouvrage est documenté de références consultables, d’articles, d’entretiens, de très nombreuses cartes originales, etc.

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Détruire ou construire ? L’aménagement des zones inondables en question

Sylvain Rode – Maître de conférences en aménagement de l’espace et urbanisme
Université de Perpignan Via Domitia – Unité Mixte de Recherches ART-Dev

Selon l’Evaluation Préliminaire du Risque d’Inondation effectuée en 2011 dans le cadre de la mise en œuvre de la Directive européenne Inondation de 2007, 18,5 millions de personnes et 10 millions d’emplois seraient exposés au risque inondation en France. La vulnérabilité est donc forte compte tenu de la forte exposition des populations au risque inondation. La prévention est dès lors un enjeu important et réaffirmé qui passe, notamment, par le contrôle de l’urbanisation en zone inondable. Deux questions, antagonistes et légitimes, se posent alors : faut-il – et si oui, comment ? – construire en zone inondable ? Doit-on détruire les biens en zone inondable ?

1- Construire. Vers un urbanisme résilient en zone inondable ?

Le Monde du 28 janvier 2018 titrait « Face aux crues, un urbanisme à réinventer ». Ce titre qui renvoie à la notion de résilience pose la question de son opérationnalité : comment prendre en compte et accepter dans certains territoires la possibilité d’une inondation ? Pendant longtemps la logique d’ « ouvrages » (barrages, digues, …) en vue de maîtriser l’aléa a été dominante. Mais depuis quelques années la résilience a fait émerger un nouveau paradigme qui est celui de l’acceptation de l’inondation. Il s’agirait de faire en sorte, en cas de crues, que les dégâts soient minimes et que le fonctionnement (des services, des transports, …) soit maintenu. Dès lors a émergé un nouveau champ de l’urbanisme –l’urbanisme résilient – qui pense la ville avec l’eau. Il s’agirait de « construire avec l’eau » (Ryan, 2010). Cette nouvelle approche est encouragée par l’Etat, notamment dans les situations de renouvellement urbain. Les friches urbaines et industrielles deviennent alors des terrains d’expérimentation de cette ville pensée avec l’eau. Cette approche n’est toutefois pas toujours bien perçue par les services déconcentrés de l’Etat, les techniciens des services « risques » considérant que la priorité est de limiter les constructions et l’urbanisation en zone inondable.

Construire résilient en zone inondable : quelles formes urbaines et architecturales ?

L’urbanisme résilient est de plus en plus expérimenté. Il prend forme notamment à travers trois grandes caractéristiques :

– La première est celle d’un urbanisme et/ou d’une architecture de surélévation. Soit l’habitat est surélevé sur le principe des constructions sur pilotis, soit c’est l’îlot tout entier qui est surélevé. Dans le premier cas, les pièces de vie se situent au premier étage, le rez-de-chaussée destiné à être inondé étant occupé par des parkings par exemple. Les quartiers Matra à Romorantin ou Pirmil-les-Isles à Rezé fournissent des exemples de cette forme d’urbanisme résilient.

– La deuxième est celle d’un urbanisme « transparent à l’eau ». Le quartier dans son ensemble est conçu alors pour être inondé en minimisant les dégâts. Des axes de circulations (de l’eau) sont construits notamment entre les habitations et perpendiculairement au cours d’eau susceptible de déborder. A Narbonne, le parti de composition urbaine de la ZAC les Berges de la Robine intègre ce principe de « transparences hydrauliques ».

– La troisième est celle d’un urbanisme valorisant la présence sensible de l’eau. Il s’agit de marquer dans le paysage la présence de l’eau par le maintien d’une végétation adaptée aux zones humides ou par des éléments qui rappellent la présence de l’eau ou qui donnent des repères de crue (ligne bleue le long d’un immeuble par exemple à Saint-Pierre-des-Corps).

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Se nourrir avec toute la géographie du monde

Ce café est, pour ainsi dire, une mise en abîme : il s’agit de se nourrir intellectuellement en parlant de… se nourrir. C’est ce à quoi Gilles Fumey, habitué des Cafés qu’il a créés avec ses étudiants de prépa il y a vingt ans, s’adonne au soir du 27 novembre 2018 au Café de Flore. Ce professeur à la Sorbonne, actif dans la diffusion de la géographie au grand public (blog Géographies en mouvement sur Libération.fr, président de l’Association pour le développement du Festival international de géographie de Saint-Dié), a pour spécialité la géographie de l’alimentation, à laquelle il a consacré plusieurs de ses ouvrages (voir en fin de compte rendu). Elle tombe cette année au programme du concours de l’ENS, rappelle Daniel Oster, qui présente l’intervenant : de quoi attirer les plus jeunes à cette thématique riche, en renouveler les réflexions et en faire bouger les lignes de force alors que de nouvelles pratiques alimentaires sont mises au jour (et mises à jour, dans le tout nouvel Atlas de l’alimentation, CNRS-Editions, dont il est l’auteur).

Daniel Oster demande d’abord à Gilles Fumey d’expliquer le titre de ce Café et, plus largement, de définir ce qu’est et recouvre, pour lui, la géographie de l’alimentation. La « sienne » résulte, pour ainsi dire, d’un glissement d’une approche tantôt économique, géopolitique, tantôt catastrophiste de l’alimentation sur Terre (« il faut nourrir neuf milliards d’hommes », « géographie de la faim »), à une approche géoculturelle de l’alimentation. L’Atlas des cuisines et gastronomies, écrit avec Olivier Etcheverria et publié il y a quatorze ans pour le Festival International de Géographie dont c’était alors le thème, en atteste. Traduit en plusieurs langues, il a répandu l’idée que l’alimentation était aussi une pratique culturelle à forte dimension spatiale. Gilles Fumey ajoute que le choix d’une telle thématique à l’ENS n’est pas un hasard, pas plus que l’ouverture d’un Master consacré à ces questions à l’Université Paris-Sorbonne : il répond non seulement aux aspirations des jeunes générations ignorant où leurs intérêts pour l’alimentation peuvent les mener professionnellement. Mais aussi aux interrogations propres à une période de transition entre des pratiques anciennes, qui ne se transmettent plus, et des pratiques nouvelles qui doucement s’imposent, sans toutefois évincer totalement les modèles traditionnels ou « de masse », comme les fast food. Et la transition est aussi sensible en termes de géographie : alors qu’il y a dix ans, la mondialisation de l’alimentation et l’idée que « nous allions tous finir au McDo » étaient sur toutes les lèvres, « le local » est aujourd’hui la grande préoccupation des consommateurs et des chercheurs. C’est sur cette géographie, plutôt que les pratiques alimentaires elles-mêmes, que veut porter ce Café.

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