A la recherche de l’accélération à travers l’affiche ferroviaire

Café animé par Kevin Sutton, maître de conférences en géographie à l’Université Grenoble Alpes, le samedi 1er octobre 2016 au Nova Bowling (Saint-Dié-des-Vosges)

Associer recherche de vitesse et train est une banalité, mais  analyser l’ « accélération » suppose que l’on pose un référent extérieur et que l’on définisse le domaine de l’accélération. C’est à cette tâche que Kevin Sutton nous invite en introduisant son exposé par la présentation de deux petits films ; l’un  de Jean Mitry, illustré par un poème symphonique d’ A. Honegger, montre la machine à vapeur Pacific 231 en 1949 , l’autre, de 2005, est une publicité pour le TGV.

En cinquante ans la représentation visuelle de l’idée d’accélération a changé. Dans le premier cas, le référent est une péniche et les images magnifient la puissance de la locomotive et la prouesse technique. Dans le second, l’accélération est montrée par des hommes-oiseaux qui franchissent tous les obstacles dans un mouvement continu sans bouger (comme dans un avion), pouvant ainsi optimiser leur temps.

A partir de ces deux exemples, trois problématiques se dégagent : accélérer, c’est aller de plus en plus vite ; accélérer, c’est aller plus vite que les autres ; accélérer, c’est accroitre les possibles. Pour les traiter, Kevin Sutton s’appuie sur plusieurs affiches publicitaires des chemins de fer français et suisses.

Plusieurs affiches mettent en valeur la performance. Sur trois affiches, de dates différentes, l’exceptionnalité de la performance technique est mise en scène. L’excellence est liée à la vitesse : en 1935, le PLM propose un Paris-Lyon en 4h50 ; en 2007 c’est le record de 574,8 km/h que glorifie la SNCF; et plus récemment l’affiche du CNAM sur « Les défis du rail » montre l’AGV (automotrice à grande vitesse) avec le slogan « Toujours plus vite » (ce successeur du TGV a été mis en service en Italie en 2012). Par quel graphisme suggérer la vitesse ?

Affiche du CNAM (2009) « Toujours plus vite! Les défis du rail »

Sur un tableau de 1937 à l’iconographie classique, F. Aubet ne porte l’idée de vitesse que par l’affirmation textuelle « Le train va plus vite ». Mais en 1960 les trois termes de la performance « Vitesse, Exactitude, Confort » s’inscrivent dans la forme simplifiée de l’hexagone suggérant ainsi visuellement que la vitesse est domestiquée. La SNCF a aussi fait appel pour sa publicité à des artistes renommés. Salvador Dali conçoit en 1969 une série d’affiches dans lesquelles l’idée de diffusion de la vitesse est représentée par de grands faisceaux. Aujourd’hui la perception du mouvement est liée à l’inclinaison même des lettres TGV.

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Chine ancestrale ou éveillée

Chine ancestrale ou éveillée, 20 octobre – 2 novembre 2016

Le voyage a été organisé par Maryse Verfaillie, pour l’association Les Cafés géographiques (de Paris).
Entre Chine ancestrale et Chine éveillée, entre montagnes et littoraux, nous avons balayé 13 siècles d’histoire en 13 jours. Un véritable défi !
Le présent compte rendu est exceptionnel. Il s’agit de la publication du Carnet de voyage du participant Jean-Marie Renard, dessinateur et caricaturiste de son métier.
En dernière page, vous sera également offerte la reproduction d’un tableau réalisé par une autre participante, Marie-Laure Viney.

Le voyage a été réalisé avec l’agence Arts & Vie. Le compte rendu a été mis en page par Bernard Verfaillie, puis publié sur le site par notre webmestre.

Il est constitué de 38 croquis réalisés à partir des sites visités (les croquis 13 et 14, puis 33 et 34 peuvent être vus comme des doubles pages). Il est suivi de caricatures représentant les participants au voyage.

Carnet de voyage en Chine de Jean-Marie Renard

Croquis 1

Croquis 1

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Quelques croquis d’excursions géographiques au début du 19ème siècle

Le dessin du géographe, n°63

Rodolphe Toepffer (1799-1846), fut le directeur d’un collège Genevois. Il est ainsi l’auteur des Voyages en Zigzag (Paris 1844) qui relatent les excursions annuelles organisées à travers les Alpes avec ses collégiens. Il s’agit de voyages de découverte menés par un pédagogue admirateur de Jean-Jacques Rousseau. Le récit du parcours par monts et par vaux est ponctué de dessins à la plume. Il fourmille d’anecdotes cocasses, de scènes curieuses, de rencontres avec des personnages pittoresques sur le chemin ou dans les auberges, et présente les paysages traversés. La marche est à la fois une épreuve physique d’initiation et le moyen de multiplier les observations naturalistes, d’herboriser, de chercher les insectes, de discuter de la carte, d’admirer les grands paysages romantiques ou de trouver les traces de l’histoire. La géographie de  l’équipe consiste principalement à suivre la carte, évaluer les distances et à identifier les points remarquables dans le paysage, à comprendre la vie des villages traversés.

Les récits sont illustrés de dessins réalisés d’une plume alerte. Ils ont été édités par Schmidt à Genève, par la technique bon marché de l’autographie (sorte de lithographie sur carton). Plus tard, les textes ont été regroupés et imprimés à Paris dans les Voyages en Zigzag, puis les Nouveaux Voyages en Zigzag (1856) assortis de quelques gravures sur bois de facture plus romantique.

L‘excursion de 1841 vers Venise,  passe par la haute vallée de l’Aar et le col de Grimsel où séjourne, à ce moment, l’équipe de Louis Agassiz, naturaliste, pionnier de l’étude des glaciers. Tœpffer fait un croquis de « l’hôtel des neuchâtelois», un énorme bloc de la moraine médiane qui sert d’abris à l’équipe de recherche.

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Le dessin de Tœpffer représente la langue du Lauteraarglenscher, avec des trainées de blocs  alignés dans le sens de l’écoulement de la glace.  Le motif central du rocher-couvercle est placé entre les trois plans du glacier et des deux versants qui  encadrent l’espace : la nappe de glace est  dominée par de grands versants raides sous les sommets de l’Oberland Bernois A gauche, la silhouette puissante du Lauteraarhorn (4042m) prolongée par l’arête du Schrechkorn (4078m), à droite la masse aigue de l’Eiwigsheenhorn (3329 m). Les éperons, parois rocheuses et couloirs d’avalanche esquissés, contrastent avec le détail des  gros blocs de la moraine au premier plan.

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Les parcours des jeunes accompagnés par l’action sociale : approches géographiques et enjeux de politiques publiques

Café Géo de Lyon du 7 décembre 2016
avec Fleur GUY (docteure en géographie, chercheuse associée à l’UMR 5600 Environnement Ville Société)
et Maryse BASTIN JOUBARD (Directrice ESSE, secrétaire nationale de la FNARS, chargée des politiques jeunesse au sein de la FNARS)

C’est Fleur Guy qui se charge d’ouvrir ce Café Géo sur le parcours des jeunes accompagnés par l’action sociale sur la base de ses travaux de recherche.

Ce Café Géo aborde une action sociale spécifique : le cas des placements des adolescents en foyer, c’est-à-dire les cas où un mineur est retiré de son domicile familial pour vivre en foyer ou en famille d’accueil. Il convient d’emblée de faire remarquer que le placement en établissement s’inscrit dans un dispositif complexe structuré par de multiples acteurs : juges des enfants, travailleurs sociaux, associations qui gèrent les établissements, etc… Un placement peut intervenir dans deux situations : lors d’un signalement de danger pour le mineur ou alors lorsque le mineur est mis en cause par la police. Dans le cas de signalement de risque de danger pour un mineur, c’est l’aide sociale à l’enfance ou le juge des enfants qui intervient. Dans le cas d’un placement judiciaire pénal, c’est le juge des enfants qui prend la décision de placement. Dans le cadre de ce Café Géo, c’est le placement en foyer par l’aide sociale à l’enfance qui va être discuté.

L’intervention de Fleur Guy a été pensée en lien avec la question au programme des concours de l’enseignement, la France des marges. Si la marge se définit par rapport au système dominant de la société, ses normes et ses valeurs[1], le placement questionne entre autres les normes associées à la famille et au logement. Le film d’animation Ma vie de courgette, réalisé par Claude Barras, est en ce sens éclairant. Une image du film donne à voir des enfants qui vivent ensemble en collectivité. Le fait d’habiter avec d’autres jeunes avec qui il n’existe aucun lien familial remet en cause plusieurs normes dont les suivantes : l’enfant vit avec ses parents, le logement est toujours associé à la famille.

Cependant, il faut rappeler que ces enfants ne sont pas nécessairement dans des situations de marginalité sociale avant le placement. En effet, la marginalité sociale peut se définir comme le fait d’être placé hors de l’emploi, de la vie urbaine, ou par une participation faible à la vie sociale. Or, le danger ou la mise en danger qui justifie le placement ne relève en fait pas forcément de la marginalité sociale. Ainsi, selon les chiffres de l’Observatoire national de l’Action Sociale Décentralisée (ODAS) de 2006, les principales problématiques qui justifient le placement sont les carences éducatives des parents ou les problèmes de couple de ces derniers. Le chômage et les difficultés financières n’arrivent qu’en troisième position dans la liste des facteurs.

Fleur Guy rappelle que l’analyse du placement proposée s’inscrit dans une démarche de géographie sociale qui considère l’espace comme dimension de processus sociaux. Il est alors possible d’analyser deux aspects spatiaux liés à ces placements : d’une part la manière dont le placement s’inscrit dans un parcours de vie fait de déplacements dans l’espace, d’autre part les parcours quotidiens réalisés par les adolescents en situation de placement.

L’enquête de Fleur Guy a été réalisée dans quatre établissements du département du Rhône : deux urbains, un périurbain et un rural. Sa méthodologie a combiné à la fois des observations ethnographiques avec une présence de dix mois dans chacun des établissements, sur des plages horaires vairées, des entretiens avec les chefs d’établissement et les éducateurs et des entretiens avec les jeunes placés eux-mêmes en utilisant des jeux de reconstruction spatiale (JRS) afin de recueillir les représentations de ces-derniers.

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Tous à la plage
Tous à la plage Cité de l’Architecture et du Patrimoine 19 octobre 2016- 13 février 2017

Tous à la plage

Cité de l’Architecture et du Patrimoine
19 octobre 2016- 13 février 2017

Alors que Paris prend ses quartiers d’hiver, l’injonction « Tous à la plage », lancée par la Cité de l’Architecture, est fort réjouissante ! Elle rappelle qu’à leurs débuts, les stations balnéaires furent des stations d’hiver.

L’exposition dresse un panorama de l’histoire des villes balnéaires, des côtes de la Manche à celles de la Méditerranée. Elle présente la diversité architecturale de ces villes nouvelles, qui accompagnent l’évolution des pratiques sociétales et des mœurs d’une société d’abord restreinte et seulement aristocratique à une société des loisirs ouverte à tous grâce à l’invention des congés payés !

Ne résistons pas à l’injonction et courons voir ces littoraux métamorphosés où mille attractions nous attendent. Plus de 400 œuvres sont présentées : tableaux, affiches, caricatures, films, objets quotidiens….. Tous plus ludiques les uns que les autres.

De l’invention (XVIII ème) à l’âge d’or de la villégiature balnéaire (années 1930)

The beach and the Kursaal, Ostende (Flandre Occidentale, Belgique) From North Pier. Photochrome, vers 1880-1890.

The beach and the Kursaal, Ostende (Flandre Occidentale, Belgique) From North Pier. Photochrome, vers 1880-1890.

Tout est signifiant sur ce document :

– la jetée sur pilotis, construite sur l’eau, pour des promeneurs désirant voir et être vus,

– le front de mer, surélevé au-dessus de la plage qui aligne les grands hôtels,

– l’église qui rappelle les valeurs de l’Occident ;

– les divertissements nécessaires à la villégiature,  comme la grande roue.

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Festival Vagamondes 2017 à Mulhouse (10-21 janvier 2017)

Les Cafés Géographiques vous présentent la programmation du festival Vagamondes 2017, auquel les Cafés Géo de Mulhouse sont comme chaque année étroitement associés. Venez nombreux !

Consulter le programme du festival Vagamondes 2017 [Format PDF - 8 Mo]

Consulter le programme du festival Vagamondes 2017 [Format PDF – 8 Mo]

Voici la programmation du festival Vagamondes 2017 à Mulhouse en janvier qui poursuit l’expérience menée avec succès l’an dernier grâce aux talents des conférenciers invités l’an dernier (Christian Grataloup, Gilles Fumey, Jacques Levy, Antoine Frémont, Hélène et Philippe Baumert, Michel Sivignon, Michel Bussi).

Cette année, toute une équipe de la Sorbonne se réunira à Mulhouse autour de Florence Desprest : Elise Olmedo, Pascal Clerc, Florence Troin, Louis le Douarin ainsi que Serge Weber, Roland Pourtier et Dominique Roquet car Vagamondes s’intéresse aux Suds, c’est-à-dire cette année la Méditerranée et l’Afrique.

Le festival associe étroitement les spectacles aux conférences et prolonge ses actions dans de nouveaux quartiers de Mulhouse en partenariat avec les associations qui organisent par exemple des déjeuners avec les géographes (un déjeuner algérien, un déjeuner libanais, un déjeuner africain) dans un cadre très convivial.

Retrouvez plus d’informations sur le site de La Filature – http://www.lafilature.org/

Repas polonais

Repas polonais du 19 novembre 2016
Animation Anna Geppert

Le lieu :

Nous sommes dans la crypte de la Mission polonaise en France, héritage du XIXe siècle où la culture de la Pologne, rayée de la carte de l’Europe, a survécu notamment en France et à Paris. Aujourd’hui, la mission polonaise est un lieu d’appui pour de nombreux travailleurs polonais de l’Ile-de-France qui y trouvent un secours spirituel, un lien social – nombreux sont ceux qui ressentent l’isolement, loin de chez eux. La mission polonaise fournit aussi un appui social à ceux qui sont dans le besoin. A deux pas de la Cour des Comptes, c’est un petit morceau de Pologne à Paris.

La crypte n’est pas un restaurant. Animé par des bénévoles, ce point de restauration n’est ouvert que le dimanche, afin de permettre à ceux qui sont venus de loin de se retrouver après la messe autour d’un repas comme à la maison ou simplement d’un thé avec un gâteau. Les autres jours de la semaine, la crypte est fermée et aujourd’hui, elle a été ouverte pour nous recevoir.

Repas polonais dans la crypte de la Mission polonaise en France Samedi 19 novembre 2016

Repas polonais dans la crypte de la Mission polonaise en France

Samedi 19 novembre 2016

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Les risques naturels en France

Café géo du mardi 18 octobre 2016 avec Magali Reghezza-Zitt, maître de conférences à l’ENS Ulm

Au programme du Café du jour : la notion de risque naturel. S’il est connu qu’elle attire les (jeunes) chercheurs autant qu’elle capte les fonds, elle sera traitée et discutée en présence d’une des chefs de file de la spécialité en France. Auteure de nombreux ouvrages consacrés à la question, dont deux issus de ses travaux de thèse, engagée dans plusieurs programmes de recherche commandés par des collectivités – Magali Reghezza travaille en ce moment à Paris sur les risques d’inondation – elle est en même temps maître de conférences habilitée à diriger des recherches de géographie à l’ENS Ulm où elle assure notamment les cours de préparation à l’agrégation. Ses multiples casquettes devaient toutes être mobilisées dans cette intervention dynamique représentative de ses compétences « d’experte » et de pédagogue, mais surtout de sa capacité à les mobiliser simultanément dans un discours particulièrement abondant qui complique la tâche d’en rendre compte.

Puisqu’on concentrera surtout nos efforts de synthèse sur les manières dont Magali Reghezza a abordé et traité la thématique ce soir-là (car ce sont elles qui ont fait (le) débat) il faut d’abord comprendre la manière dont l’animatrice de la séance, Elisabeth Bonnet-Pineau, l’a problématisée. Elle a mis en lumière deux paradoxes : d’une part, la « recrudescence des catastrophes » en 2015, signalée par le CRED dans son dernier rapport, alors même que la connaissance et les techniques de prévention des risques semblent s’améliorer ; d’autre part, la contradiction intrinsèque entre la fréquence et l’intensité des catastrophes « naturelles » (les sécheresses s’avérant, d’après le CRED, les plus meurtrières d’entre elles à l’échelle de la planète). Le propos est déjà appelé à dépasser le sujet des « risques naturels en France », ce qu’a confirmé le déroulement de la séance : l’intervenante s’est en effet bien attachée à déconstruire, à l’aune d’un argumentaire pragmatique et précis, chacune des notions contenues dans le sujet de départ, dont il s’agissait d’évaluer le sens et la pertinence et, peut-être, de calmer les inquiétudes éventuelles dues, pour leur plus grande part, à un court-circuitage terminologique entre le « risque » et la « catastrophe » dont le public a pu s’extraire.

Des mots pour les risques, au(x) risque(s) des mots : la géographie des risques à l’heure du paradigme de la complexité.

Magali Reghezza propose d’entrer dans le sujet par l’épistémologie, suggérant ainsi que l’existence de telles problématiques, en sciences comme en société, s’explique au moins en partie par l’empilement des concepts relatifs aux risques en Géographie. Elle veut montrer, d’une part, que le champ d’étude des risques est à la mesure de ce que la Géographie en a fait : « la façon de traiter l’objet risque en Géographie montre que la discipline est vivante, qu’elle évolue (…). Et les débats qui s’y jouent se retrouvent point par point dans la façon d’envisager les risques ». Ainsi décèle-t-on, dans les premières (quand ? Elle ne les datera pas) approches des risques, l’empreinte structurelle et structurante de la discipline, des « géographes physiciens » qui s’attachent dès les années 1970 d’abord à comprendre leur paramétrage « naturel », préalable indispensable à la compréhension de ce qu’on qualifie alors parfois « nuisance » ou de danger ; par la suite, à l’heure où la géographie physique se renouvelle en une « géographie de l’environnement », les géographes insistent sur le rôle de l’anthropisation dans la transformation des processus physiques, sur l’importance des sociétés dans la fabrique des risques dits naturels, et cherchent in fine à dénaturaliser les catastrophes.

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Une balade de Bellevue à Vélizy et Meudon-la-Forêt

Retrouvez le compte rendu de la sortie organisée à Meudon par les Cafés Géographiques, le 4 juin 2016.

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pdf_icon_16 Sortie géographique à Meudon, 4 juin 2016 (format PDF – 2Mo)

France, un voyage

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Hervé Tardy, Jean-Louis Tissier,  France, un voyage, Editions de La Martinière, 311 p, 2016

Cet ouvrage n’est pas seulement un « beau livre » comme il y en a tant qui paraissent à l’approche de Noël. Trois raisons principales permettent de le distinguer au sein de cettecatégorie : la qualité et l’originalité des photographies, l’intérêt des commentaires appartenant à deux registres différents, la présentation géographique à la fois « classique » et stimulante de la France. Cela fait beaucoup d’atouts d’autant plus que ceux-ci sont mis en valeur par une composition très réussie et une rare qualité d’écriture.

D’abord, l’objet lui-même auquel les Editions de La Martinière ont apporté un soin tout particulier avec son format 24×28,5 judicieusement choisi et ses photographies occupant souvent une pleine double page. Incontestablement nous avons entre les mains un bel objet qui se laisse admirer avec ce qu’il faut de séduction et…de pertinence. Mais la grande réussite du livre tient également (surtout ?) à l’originalité des prises de vue permises par l’autogire à bord duquel le photographe s’est installé pour survoler la France. Si l’autogire est une machine volante de création relativement ancienne (premier vol officiel en 1923), il reste encore peu connu même s’il connaît actuellement un certain succès dû à sa grande maniabilité, ses progrès techniques et sa faible consommation en carburant. Et s’il n’autorise pas le vol stationnaire, contrairement à l’hélicoptère, l’engin porté par un rotor et poussé par une hélice permet de photographier à faible altitude en « survolant les lieux sans les dominer ». A partir de 2008, pendant 600 heures de vol, le photographe Hervé Tardy a entrepris une « chasse constante », toujours en embuscade, à la recherche des combinaisons visuelles révélant l’infinie diversité de la France, ce qui nous vaut cette magnifique collection de 161 images.

Un classement en 7 grandes régions

A la suite de la table des matières placée au début de l’ouvrage, une carte de France localise les 131 lieux survolés durant  le « voyage ». Si les littoraux représentent la part belle de ces lieux, l’essaimage de ceux-ci à travers le territoire national  donne à voir un échantillon représentatif de la diversité de notre pays, à la réserve près que le monde urbain n’a été qu’effleuré, sans doute pour des raisons liées à l’autogire qui ne permet pas de photographier à une altitude suffisante seule capable de rendre compte de l’organisation de l’espace urbain. Ainsi, la partie consacrée à l’Ile-de-France apparaît comme le parent pauvre du livre tout en permettant d’achever la présentation de toutes les régions françaises (métropolitaines). C’est donc une géographie partielle de la France qui est proposée avec un regard sensible accordé aux paysages sans oublier les hommes qui habitent ces lieux. L’éditeur a tout à fait raison de souligner le penchant d’Hervé Tardy pour « une photographie à tendance humaniste ».

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