Carte postale de Radicofani (Italie) : dans les pas de William Turner
Photo 1 : La fontaine de la poste médicéenne et la forteresse de Radicofani © RCourtot 2011

Photo 1 : La fontaine de la poste médicéenne et la forteresse de Radicofani © RCourtot 2011

Radicofani, 28 mai 2011

Celui qui suit la via Cassia entre Sienne et Bolsena aujourd’hui ne sait pas que, lorsqu’il passe à l’est du monte Amiata, il emprunte un « raccourci », un itinéraire tracé dans la vallée de la petite rivière Paglia lors de l’aménagement des routes « nationales » du nouvel Etat Italien à la fin du 19e siècle. Il abandonne donc pour une quinzaine de kilomètres l’itinéraire originel de la voie romaine, devenue ensuite via Francigena au Moyen âge (la « route des Français »), qui escaladait les collines pour passer par Radicofani, gros bourg perché surmonté d’un rocher et d’une forteresse (il s’agit d’un neck volcanique pléistocène dont le sommet est à plus de 900m d’altitude).

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Archives – Cafés Géographiques de Strasbourg – 2005-2013

Retrouvez toutes les archives des comptes rendus des Cafés Géographiques de Tours, à consulter et télécharger au format PDF.

Les États africains sont-ils condamnés à la faillite ?, Roland Pourtier – mercredi 23 octobre 2013
 etats-africains.pdf

Rome, « Ville Éternelle » ou capitale parasitaire ?, Géraldine Djament-Tran – mercredi 23 novembre 2011
 rome-ville-eternelle.pdf

Entre islamisme(s) et régimes autoritaires, quel avenir pour le Maghreb ?, Vincent Bisson – mercredi 6 avril 2011
 islamismes-regimes-maghreb.pdf

Mexico, ville insoutenable ?, Alain Musset – mercredi 23 mars 2011
 mexico-ville-insoutenable.pdf

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Pierre, notre si cher ami

Pierre Gentelle est décédé le 4 octobre 2010.

Tu te rappelles, Pierre, nous étions dans un café boulevard de Sébastopol, c’était peu après l’an 2000. Tu me prends au mot en disant que tu pourrais un jour tenir une lettre qui s’appellerait la Lettre de Cassandre. Pourquoi Cassandre, car on ne choisit pas un pseudo au hasard. « La famille des Atrides s’impose à qui s’adresse à la famille universitaire. Mieux vaut être situé sur les marges qu’au centre, pour conjurer un sort qui donne tort à qui cherche à « voir ». Raison garder plutôt qu’avoir raison, beau programme, n’est-ce pas ? »

pierre-gentelle

Superbe programme, en effet, Pierre ! 128 lettres de Cassandre. Du Moyen-Age et son goût de la numérologie, 128 est un total qui nous est parvenu aussi par l’édition, les Que sais-je ? et autres petits opus à lire vite ou à déguster. 128 « micro-nouvelles », sous forme d’une lettre qui veut aller plus loin que la démonstration scientifique. Comme tous les pédagogues, tu aimes les commentaires, les digressions pour « ébranler » l’esprit du lecteur. Pour « faire penser, plutôt que penser » mais en reprenant – bien dans ton style – ce que tu ne voudrais pas qu’on prenne à l’absolu : « penser quand même un peu, mais sans édifier ». Là, Pierre, tu sais bien que ce n’est pas tout à fait ça : car tu veux séduire et, bien sûr, rattraper ce qui t’a peut-être le plus manqué dans ta vie professionnelle : les étudiants. Que de cohortes d’apprentis géographes aurais-tu séduits, fouaillant dans leurs certitudes, là où ça fait mal. « Pour que ça avance » aimais-tu nous dire.

Tu étais géographe parce que la géographie devait rassembler pour toi, peut-être du fait de tes multiples vies du Maroc à Paris, en passant par presque tous les pays d’Asie orientale et du Moyen-Orient, l’ensemble des questions que tu te posais. Qui d’ailleurs t’a donné ces lunettes-là pour lire le Monde ? Qu’importe ! « Tout est géographiable » disais-tu, « du Japon à mon immeuble, de l’odeur au circuit imprimé. » Tu l’as montré 128 fois et avec quel talent ! Tu étais au meilleur de cette « forme », tu as laissé aller, comme tu le souhaitais.

Terriblement perspicace jusqu’au dernier instant de ta vie, tu avais deviné qu’on changeait d’époque. Tu es le premier à te lancer dans une nouvelle collection de DVD sur les grandes villes du monde. Tu sentais que faire de la géographie imposait de changer d’outil, d’utiliser tous les ressorts de ce qui arrivait avec la révolution numérique. Combien de fois nous sommes-nous « frités » sur le fameux terrain. C’était presque de l’ordre de la croyance pour toi, cette « vérité du terrain » dont, soudainement tu te méfiais car la vérité était pour toi une trop grosse chose pour appartenir au terrain. Mais qu’une « nouvelle carte du monde » soit en train de s’écrire sous nos yeux, tu en tâtais tous les signes dans les médias qui te faisaient bouillonner le sang !

Cette touche personnelle, ces « fragments du monde, par toi entrevus ou connus, d’où le « je » est parfois inévitable », c’est ta « touche » : ce parfum de révolte, ce grondement du cœur et de l’esprit qui fouaillent la matière de l’espace pour en faire surgir une idée qui peut changer le monde.

Voici ce qu’écrit ton ami Jean-Dominique Merchet de Libé, qui partageait avec toi l’amour des morilles au vin jaune : « Pierre était un homme joyeux, la parfaite antithèse de l’austérité universitaire. Il pouvait faire rouler sous la table ses commensaux lorsqu’il racontait ses aventures féminines à l’Université de Pékin. Homme de gauche, mais sans chapelle, Pierre Gentelle gardait de sa longue scolarité au Prytanée une image contrastée des militaires : un vieux fond d’antimilitarisme mâtiné d’un intérêt pour ce monde dont il s’était éloigné mais sur lequel il ne manquait pas de m’interroger[[http://secretdefense.blogs.liberation.fr/defense/2010/10/]]. »

Et voici d’autres fleurs qui fleurissent en cet automne, car ta vie n’a pas de saisons, elles viennent de Marc, notre premier webmestre au Café : « Pierre était devenu un acteur des cafés déployant deux facettes qui rendait chacune de ses présences magnétiques : celle du conteur et celle du charmeur. Il n’y en a pas deux comme Pierre pour placer l’assistance dans le loess de la Chine des canaux, dans le chaos épique de la société afghane, ou dans le charme ubuesque d’un village du Henan. Pierre savait instinctivement tout ce qui peut faire l’attrait et l’animation d’un café et au delà, rendre la géographie séduisante. »

Pierre, tes lettres de Cassandre sont des cadeaux sublimes que nous allons lire et relire. On va déjà relire ce que tu écrivais au retour du festival de Saint-Dié où tu houspilles tout le monde et prend congé de nous par une pirouette. Comme ce matin du 4 octobre 2010 où tu es descendu, rue de Turin, goûter au frais d’une dernière baguette de pain avant ton petit café et entamer ta nouvelle vie. Pierre, merci !

Gilles Fumey

Un mot aussi du Réseau Asie

Pour les cent premières Lettres de Cassandre

Le Tour de France, ou comment le vélo dessine la France

« La Grande Boucle, avec sa caravane, me fait penser à un western » Didier Daeninckx

« C’est la fête d’un été d’hommes, et c’est aussi la fête de tout notre pays, d’une passion singulièrement française » Louis AragonLe Tour en toutes lettres, ADPF.

« La géographie du Tour est entièrement soumise à la nécessité épique de l’épreuve » Roland Barthes, Mythologies, 1951.

« Quand le solstice d’été allume à l’horizon ses premiers feux, l’homme revient à un peu de géographie »
Jean-Louis Ezine, Le Nouvel Observateur, n° 2016

à P. R., et tous ces enfants devenus géographes grâce au Tour de France.

Pour tous les observateurs du sport dans le monde, le Tour de France est une énigme. Comment cette course de 1903, conçue pour concurrencer un journal, a-t-elle pu gagner ses marques de longévité et prendre cette ampleur qui en fait un événement sportif mondial chaque année, dans la presse européenne comme sur les radios et chaînes de télévision japonaise, américaines, africaines ? Comment cette compétition s’est enracinée dans les rituels nationaux, comment est-elle devenue un spectacle suivi, {de visu}, par des millions de supporters nationaux et étrangers qui se massent sur les lieux de la course et devant leur poste de télévision ? « C’est que l’épreuve est plus qu’une course, elle s’adresse à la conscience collective, à des références communautaires autant qu’à la curiosité sportive. Elle joue avec la géographie, les provinces, les frontières. Elle met en scène un espace-nation, un décor fait du territoire lui-même » (Vigarello, 1992-1, p. 884). Le Tour de France est bien plus que cela, mais il est {aussi }cela.

Le succès du Tour de France dépasse l’enjeu cartographique mais c’est bien sur la carte du Tour, publiée chaque année, que se construit une petite part de la mémoire de la France, une leçon annuelle de géographie nationale, qui borne et jalonne la France et ses voisins de repères symboliques, constitutifs de l’identité française et, peut-être un jour, européenne. Cette dramaturgie estivale est une lutte contre les reliefs et les éléments de la géographie française, avec un dosage subtil d’épreuves sur le plat et en montagne, si possible programmées dans les fins de semaine car elles sont les plus spectaculaires. Ses jalons étapes tendent un fil sur l’Hexagone d’environ 3 500 kilomètres qui dessine chaque année une silhouette enveloppante, celle d’un « tour » qui emprunte sa mythologie à l’histoire et qui offre une géographie idéale. Mais cette géographie est constamment en reconstruction : elle épouse les questions du temps et les aléas de l’Histoire. Elle fabrique pour les villes étapes un nouveau rapport à elles-mêmes et aux autres. Elle se trempe dans les montagnes qui valident les ressources des champions. La géographie du Tour est une construction mythique qui emprunte aux lieux et aux coureurs tous les ressorts d’une histoire qui étonne par sa dynamique.

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Carte postale d’un habitat sur cour (Abidjan)
Un espace-cour à Treichville, quartier populaire d’Abidjan Crédits : Bénédicte Tratnjek, 2009

Un espace-cour à Treichville, quartier populaire d’Abidjan
Crédits : Bénédicte Tratnjek, 2009

Un espace-cour au cœur de Treichville, quartier populaire d’Abidjan. Atypique par rapport à d’autres formes d’espaces-cours de par le monde : la première impression que laisse l’habitat sur cour reste son aspect hétéroclite et désordonné. Le linge flotte sans discontinu au centre de la cour, à proximité du puits qui recueille les eaux de pluie. Autour de cet espace central, des canapés miteux sont installés sous des toits en tôle usée qui permettent de s’installer dans l’espace-cour par temps de pluie comme par grand soleil. Sous la tôle, des rigoles récupèrent les eaux et les entraînent dans la rue sans système de tout à l’égout. Elles s’amasseront dans les autres saletés de la rue de Treichville. A l’intérieur de l’espace-cour, les canapés de récupération sont accolés aux murs peints de couleur vive, mais décrépis. Derrière les murs, des pièces séparées qui accueillent des familles nombreuses. Elles se sont dotées, depuis les années 1980, de cuisines sommaires, et de postes de télévision reliées par des branchements informels au câble. L’intérieur contraste avec l’espace-cour : la lumière y est absente, les murs qui donnent sur la rue sont dotés seulement de petites fenêtres voilées par des rideaux épais. Le tout forme l’habitat sur cour, un espace clos qui ne donne sur la rue que par une petite porte sommaire, en bois, délabrée, mais qui marque nettement le seuil d’entrée entre espace public et espace privé partagé. Rien ne permet d’observer ce qui se passe à l’intérieur depuis la rue : on passe de la rue à l’espace-cour par cette seule porte. Une sorte de « sas » qui permet d’être observé par tous les habitants qui se partagent l’espace-cour, qui est bien plus vivant que l’intérieur des pièces. « Sas » non par la forme ultra-sécurisée, mais par la surveillance accrue : entrer dans l’espace-cour demande d’être identifié (et donc accepté) par tous les habitants, et non pas seulement celui que vous visitez. Pour dresser le portrait de l’habitat sur cour, il manque à la photographie le son : l’habitat sur cour n’est pas un lieu des plus reposants. Le bruit y est constant, entre les jeux des enfants et les « palabres » des adultes.
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Archives – Cafés Géographiques de Rouen – 2007-2009

La Haute-Normandie a-t-elle encore un avenir ?, Y. Guermond, M. Bussi, G. Billard, A. Brennetot, Sébastien Bourdin – mercredi 25 novembre 2009
 haute-normandie-avenir.pdf

Quand le village devient ville…, Guy Burgel et Gérald Billard, François Raulin, Sébastien Bourdin – mardi 26 mai 2009
 village-devient-ville.pdf

La réunification de la Normandie aura-t-elle lieu ?, Armand Frémont, Michel Bussi, Gérard Ducable et Daniel Lemoine, Sébastien Bourdin, David Vigneron – jeudi 11 décembre 2008
 reunification-normandie.pdf

Quels territoires pour quelles identités ?, France Guérin-Pace, Elena Filippova et Yves Guermond, François Raulin, Sébastien Bourdin, David Vigneron – mercredi 19 novembre 2008
 quels-territoires-identites.pdf

Rouen, une métropole oubliée ?, Yves Guermond, Gérald Billard et Françoise Lucchini, François Raulin – jeudi 28 février 2008
 rouen-metropole-oubliee.pdf

Ca va chauffer !, Michel Rasse et François Gay, Sébastien Bourdin – jeudi 25 octobre 2007
 ca-va-chauffer.pdf

La carte électorale française en 2007 : nouveaux clivages, nouvelles fractures ?, Pascal Buléon, Michel Bussi, Yves Guermond, François Gay et Céline Colange, Sébastien Bourdin – mercredi 16 mai 2007
 carte-electorale-francaise-2007.pdf

Carte postale de Trani (Pouilles, Italie)
Cliché Roland Courtot, septembre 2009

Cliché Roland Courtot, septembre 2009

Trani campe au loin une silhouette familière sur la côte des Pouilles : une église avancée sur la mer, une agglomération remparée sur un site perché et dominant un port abrité par des jetées. L’église, blanche du calcaire dur semblable à un marbre, est massive à sa base et close comme une église fortifiée, mais élancée pour être vue et voir au loin. Autour, le premier cercle d’habitat est celui des ruelles étroites entre les anciens palais des anciennes familles des nobles et des marchands, énormes blocs aux ouvertures parcimonieuses, qui ressemblent à des forteresses au rez-de-chaussée, mais dont les hautes façades s’ornent de quelques balcons en étage.

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L’océan, le surf et les territoires de l’éphémère

Vendredi 2 octobre 2009 – Café Le Thiers – Saint-Dié-des-Vosges

Animé par Jean-Pierre Augustin (professeur de géographie à l’Université Bordeaux III, spécialiste de la géographie des sports, notamment auteur de Géographie du sport. Spatialités contemporaines et mondialisation, Armand Colin, 2006 ; et co-auteur de Géographie des sports en France avec Loïc Ravenel et Philippe Bourdeau, Vuibert, 2008).

Le surf et les territoires de l’éphémère (source : Canal J - Sports)

Le surf et les territoires de l’éphémère (source : Canal J – Sports)

C’est avec beaucoup de patience que Jean-Pierre Augustin profite de l’ambiance très animée du Café Le Thiers pour aborder la question du surf et de ses territorialités. Comme il le remarque en introduction, le thème du Festival international de géographie 2009, « Mers et Océans », nous entraîne sur les plages bien lointaines de Saint-Dié-des-Vosges.

Le surf est l’épure des sports de glisse (parmi lesquels on peut citer également la planche à voile, le kayak-surf, le body surf, le body board…), apparus dans les années 1960 dans les médias. La plupart d’entre eux sont d’origine californienne. Jean-Pierre Augustin a d’ailleurs abordé la question des sports de glisse dans une table-ronde, « Glisse, course, croisière, l’océan sans limite ? », au FIG animée par Sylvain Allemand, avec pour autres invités Jacques Charlier (sur la question des croisières), Anne Gaugue (sur la voile-plaisir) et Isabelle Autissier (sur la voile-sport). Pour ce café géo, il se propose de revenir plus particulièrement sur la question du surf, en trois points.

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Péri-urbanisation ou désurbanisation ? Avec Thierry Rebour.

Café géographique de Châlons-en-Champagne,

Pour ouvrir ce Café Géo, Farid Benhamou présente l’intervenant du jour, Thierry Rebour, maître de conférences à Amiens et auteur de la « Théorie du rachat ». Son exposé reprendra une partie des idées développées dans ce livre.

Thierry Rebour prend la parole et rappelle que depuis la fin des années 60, on observe un renversement des flux migratoires notamment à l’échelle infra-régionale, les flux centripètes devenant des flux centrifuges. Ce mouvement a d’abord fait craindre aux géographes une « fin des villes » puis ceux-ci ont ensuite parlé de rurbanisation pour enfin en arriver à envisager ces dynamiques comme étant, peut-être, une nouvelle forme de croissance urbaine extensive, appelée péri-urbanisation, ex-urbanisation ou encore métropolisation.

Mais Thierry Rebour de s’interroger : et si ces flux n’avaient pas engendré une métropolisation mais au contraire une désurbanisation, fille d’un exode urbain ?

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La crise mondiale : une ardoise de 55 800 000 000 000 de dollars

Laurent Carroué Directeur de recherche à l’Institut français de Géopolitique, Université Paris VIII Expert du groupe Mondialisation du Centre d’Analyse Stratégique (ex Commissariat Général au Plan)

Née aux États-Unis à la fin de 2006, la crise dite « des subprimes » est devenue au premier semestre 2009 une crise systémique mondiale d’une ampleur historique tout à fait inédite. On a en effet progressivement assisté en deux ans à un double phénomène de diffusion. Le premier est de nature sectorielle : cette crise initiale de la dette nord-américaine s’est progressivement transformée en une crise financière puis économique généralisée. Le second est de nature géographique : frappant de plein fouet la puissance états-unienne, elle s’est progressivement déployée dans l’espace mondial en touchant les grands pays développés, en particulier l’Europe occidentale et le Japon, avant d’atteindre les grands pays émergents (Chine, Brésil Russie, Inde) puis aujourd’hui l’ensemble de la planète.

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