La dernière excursion de l’association des cafés géographiques a conduit le groupe à découvrir ou retrouver l’habitat rural lorrain désormais bien éloigné de ce qui a été appris dans les ouvrages qui traitaient du système d’openfield, avec des fermes jointives situées en cœur de village. Tout a changé, tout s’est transformé avec la rurbanisation des villages, le déplacement des fermes devenues installations classées. Habiter relève de la spatialisation et encore d’une pratique souvent très dilatée des territoires. Depuis trente à quarante ans, au rythme où s’affirment et s’étalent les effets de la renaissance rurale détectée dès 1975 par Bernard Kayser, cette fonction essentielle a beaucoup changé en sens, en charge affective et encore au gré des mobilités souhaitées, consenties ou subies. L’évolution tient également compte des changements dessinés dans la taille des ménages, des effets du vieillissement, des écarts de fiscalité mobilière et immobilière, des distances-temps consenties pour se déplacer et encore du coût du budget énergétique[1]. Se pencher sur ce thème éclaire un objet géographique original ; celui de la projection de l’homme dans son espace pratiqué et familier. Ceci débute par le microcosme (le couloir qui distribue les pièces, le garage ; voire l’atelier, la véranda, la terrasse, le jardin et son prolongement en verger)[2] et se poursuit avec toutes les mobilités que nous acceptons ou subissons. Pour affiner cela, nous sommes invités à nous rapprocher de l’architecture, de l’histoire patrimoniale des lieux, de la sociologie et encore de la mise en scène des territoires, en tenant tout à la fois compte des espaces privés, des lieux destinés à l’usage (usoir ou parge du village lorrain), du mobilier rural qui a « citadinisé » l’ambiance (éclairage, abri bus, salle des fêtes), enfin de l’espace public où s’applique le principe de précaution (chicane, ralentisseurs de la vitesse automobile).
Lors des dernières Journées du patrimoine, les citoyens motivés (il fallait s’inscrire plusieurs semaines à l’avance puis, le jour même, attendre longuement) ont pu découvrir ce réservoir.
Au dix-neuvième siècle, le baron Haussmann confie à l’ingénieur Eugène Belgrand le soin de concevoir les travaux nécessaires à l’alimentation en eau de Paris. Son projet (1858) prévoit deux réseaux indépendants : le premier, alimenté par des eaux fluviales, pour les fontaines, parcs et jardins et le second, alimenté par des sources situées à parfois plus de cent cinquante kilomètres, pour la consommation des Parisiens.
Les aqueducs et les réservoirs alors érigés sont toujours opérationnels : la moitié de l’eau potable provient des sources. La capitale est alimentée, pour l’autre moitié, par des eaux fluviales captées dans la Seine et la Marne en amont.
26-27-28 septembre 2014
Le voyage est organisé par Maryse Verfaillie pour l’association Les Cafés Géographiques (de Paris). Il a bénéficié de l’aide précieuse de Nancéiens :
-Jacqueline et Christophe Terrier, membres de longue date des Cafés géo,
-Colette Renard-Grandmontagne, André Humbert et Jean-Pierre Husson, enseignants à l’Université de Lorraine.
Au carrefour des routes européennes, la Lorraine effectue de belles reconversions. Nancy, crée ex-nihilo il y a dix siècles, a bénéficié de grandes richesses naturelles.
Elle a conservé l’écrin forestier de Haye et l’exploitation des mines de sel gemme. Mais les mines de fer sont fermées et les activités sidérurgiques ont pratiquement disparu.
Plusieurs apogées ont laissé à la capitale de la Lorraine un patrimoine architectural exceptionnel : ville médiévale et Renaissance, ville des Lumières (Place Stanislas), ville Art nouveau.
Mais le siècle passé a confronté la ville aux crises industrielles. Aujourd’hui la métropole, coincée entre le talus forestier de la Côte de Moselle à l’ouest et les marais de la Meurthe à l’est, a mené de nombreuses batailles. La reconversion économique s’accompagne de la réhabilitation des périphéries et de projets (mégalomanes ?) en Cœur de ville.
« Le système rejette certains endroits »
Trap Street, 2014
Li Qiuming (Lu Yulai) est un jeune topographe – ingénieur selon sa mère, stagiaire pour ses collègues. Outre son emploi dans une compagnie de cartographie, il s’est spécialisé dans les systèmes de vidéo-surveillance : installation et détection pour des clients ne souhaitant pas passer par les circuits officiels. Il connaît la ville comme sa poche : Nanjing (Nankin), métropole de l’est chinois, au nord-ouest de Shanghai, n’a aucun secret pour lui.
Une rencontre va fragiliser l’équilibre précaire de cette vie banale. Une rencontre située. Devant l’ « allée de la forêt » (Guanglin Xiang), une femme apparaît et s’y engouffre. Une apparition sous forme de révélation. Cette allée, cette voie sans issue et son mystérieux « Laboratoire 203 » dans lequel semble travailler cette intrigante personne, deviennent dès lors des points de focalisation, des lieux obsédants et énigmatiques dont les coordonnées géographiques demeurent inconnues, introuvables, absentes des cartes topographiques et des GPS.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a institué en 1988 une Journée mondiale de lutte contre le sida. Depuis cette date celle-ci est organisée tous les 1er décembre pour sensibiliser les différents acteurs et l’opinion internationale aux moyens les plus appropriés à la lutte contre la pandémie. Dans le même temps les avancées de la recherche permettent une connaissance grandissante du fléau jusqu’à pouvoir reconstituer aujourd’hui son origine et les étapes de sa diffusion.
La revue américaine Science a publié le 3 octobre dernier un remarquable travail scientifique permettant de reconstituer le parcours géographique du sida (VIH ou virus de l’immunodéficience humaine) depuis son apparition dans l’actuelle République démocratique du Congo dans les années 1920.[1]
Café géographique à Toulouse le 23.04.2014
par Farid BENHAMMOU
Farid Benhammou est agrégé de géographie et docteur en géographie de l’environnement de l’ENGREF – Agro Paris Tech. Passionné depuis l’enfance par la faune, comme il le confie lui-même en préambule de « son » café-géo, il est aujourd’hui considéré comme l’un des spécialistes français des grands prédateurs. Il travaille sur les conflits autour de la conservation de l’ours et du loup depuis 1998. En 2007, il soutient une thèse distinguée par le Comité national français de géographie: « Crier au loup pour avoir la peau de l’ours : une géopolitique locale de l’environnement ». Il est l’auteur de nombreux articles sur le sujet et a été invité en 2012 dans l’émission « La tête au carré », l’émission scientifique de la radio France Inter.
Une anecdote : l’ibis sacré, un animal majestueux qui déchaîne les passions.
Céline Broggio, géographe, Université Jean Moulin Lyon 3.
Virginie Chasles, géographe, Université Jean Moulin Lyon 3.
Sophie Pamiès, médecin, Direction de l’écologie urbaine (Lyon).
Les Cafés Géo de Lyon accueillent le 26 mars 2014 à 18h au Café de la Cloche, deux maîtres de conférences en géographie Virginie Chasles et Céline Broggio de l’Université Jean Moulin Lyon 3 et Sophie Pamiès, médecin territorial, médecin directeur de l’Ecologie urbaine à Lyon. Ce Café Géo vise à articuler des discours scientifiques et une pratique de terrain. Il s’agit d’articuler un champ de la géographie (la géographie de la santé) et un terrain d’action (le quartier des Buers à Villeurbanne), et de voir s’il est possible de mobiliser le territoire pour préserver et améliorer la santé des populations concernées. Cette question est ancienne mais est renouvelée par des enjeux de santé, notamment le surpoids et l’obésité. Ce propos vise alors à relier les facteurs individuels mais aussi le rôle du territoire comme déterminant de santé. De ce fait, l’intervention s’organise en trois temps : en premier lieu, il s’agit de présenter le territoire comme un élément déterminant de la santé ; ensuite, l’objectif est d’expliquer pourquoi l’obésité (et plus particulièrement infantile) est un enjeu de santé publique majeur et enfin, la présentation du terrain d’action ouvre la réflexion sur la problématique de l’urbanisme favorable à la santé.
Grand Palais, Galeries nationales
17 septembre 2014- 2 février 2015
Super Nana, Nana enragée ou Nana engagée, douze ans après sa disparition, le Grand Palais lui rend honneur. C’est l’occasion de découvrir une œuvre variée et parfois méconnue, puisque cette artiste, farouchement autodidacte, a certes produit des tableaux mais aussi des sculptures, des architectures, du design et du mobilier, des films et aussi des romans. Une œuvre aux couleurs vives, mais pertinentes, parfois « brut de décoffrage » mais toujours audacieuse.
La photo est de piètre qualité. La forte et intimidante présence policière à proximité de la place Tahrir au Caire, où a été prise cette dernière en septembre 2014, n’aide pas à faire les bons réglages. Suspendue à un mur de pierre, une banderole blanche dit en substance : « Aidez-nous à rouvrir nos rues » ! Cet appel au secours attire notre attention sur ce qui constitue probablement l’une des principales victimes collatérales des soubresauts de la transition politique en Égypte, à savoir l’usager du centre-ville du Caire.
Sur la douzaine de murs construits entre fin 2011 et début 2012 afin d’empêcher les rassemblements, sur la place Tahrir, d’opposants au régime militaire qui assurait alors l’intérim après le départ de Moubarak, il en reste plus de la moitié aujourd’hui. On assiste donc depuis près de trois ans dans certains quartier du centre-ville du Caire, à la dégradation des conditions de circulation automobile et piétonnière, à l’effondrement des économies de quartier (commerces fermés, livraisons et entretien non assurés) et, désormais, à la montée d’une forte colère.
Café géographique au Café de Flore, Paris
Mardi 27 mai 2014
Avec Charlotte Prieur et Rachele Borghi (Université Paris-Sorbonne)
Animation Judicaëlle Dietrich
Rachele Borghi revient sur ces thématiques courantes mais peu connues, car invisibilisées ou ignorées. On pense parfois que ces questions ne concernent pas la géographie. L’idée est d’expliquer comment des géographes regardent la ville, et plus largement l’espace, en ajoutant une catégorie d’habitude cantonnée à la chambre à coucher. A travers la sexualité, on mélange les autres catégories pour faire sortir quelque chose du chapeau.
La géographie des sexualités est assez ancienne
Les lectures des sexualités dans les espaces urbains datent déjà des années 1970 aux Etats-Unis. On s’est alors surtout penché sur les formes spatiales des communautés gays et lesbiennes qui polarisaient les questionnements initiaux : les sexualités autres. Le principal apport de la géographie à l’époque était de cartographier des zones résidentielles gays dans les villes américaines. Culture, consommation, espace urbain : les communautés gays interviennent dans le processus de gentrification des villes. Dans les années 1990, la question est abordée différemment : comment l’hétéronormativité influence l’espace public. L’espace public n’est pas qu’un support, une scène, mais il est conçu selon des normes hétérosexuelles et influence les normes sexuelles. L’hétéronormativité apparaît comme une injonction, une obligation. On la transforme en norme. Les hétérosexuel.le.s ont un accès légitime à l’espace public. Les sexualités produisent des espaces d’inclusion et d’exclusion. On abandonne l’approche cartographique et on se concentre sur les rapports entre espace, identité et pouvoirs. On crée des espaces de pouvoir, avec des catégories dominantes. La géographie féministe renouvelle ces questionnements. L’idée était de rendre visibles les sexualités dissidentes, afin de résister à l’hétéronormativité. S’y ajoutent l’étude de la bisexualité, et l’étude des trans. Ces sexualités et ces genres non normatifs ont un impact sur l’espace.
Les points faibles sont les suivants : la production scientifique est très liée au contexte gay, des hommes blancs étudient des zones commerciales, où la culture gay était prévalente. Le point fort creusait le lien entre sexualité et espace. Cela éclaire la production de connaissances géographiques – des connaissances situées, qui viennent d’un certain point de vue. Il faut voir comment le monde académique est lui aussi hétéronormé. Le prisme de la sexualité visibilise le caractère situé de la production de la connaissance, surtout assurée par des hommes blancs, riches, hétérosexuels.
En France, les études en géographie de la sexualité sont de plus en plus répandues. Le travail de Marianne Blidon a porté l’attention sur le fait que les personnes ne se questionnaient pas sur ces problématiques de recherche. Le monde académique français devait alors considérer un objet jusque-là considéré comme illégitime.






