Santiago et le reste du territoire chilien : quelles relations ?

Présentation par Fransisco MATURANA, professeur de géographie à l’Université Alberto Hurtado, Chili.
Ce Café Géo a eu lieu le mardi 11 octobre 2016 au Saint-James, Place du Vigan à Albi à partir de 18h30.

Présentation problématique :

Au Chili, 85% de la population est urbaine et sur ce total, approximativement 40% des habitants vivent dans la région Métropolitaine, où se trouve la capitale du pays : Santiago. Cette concentration est un processus qui se développe depuis le début de la conquête du pays par les Espagnols et qui se concrétise aujourd’hui par une telle ampleur.

En effet, il y a plusieurs moments dans l’histoire du pays qui expliquent une telle concentration à Santiago. Le premier, se réfère à la conquête espagnole et la forte résistance exprimée par les Indiens Mapuche, qui ont empêché l’articulation des centres urbains au sud du pays au cours des 200 premières années de la conquête. Un deuxième élément, qui est associé au point antérieur sur les conditions de paix à Santiago, est que cette ville a été la première à avoir développé une infrastructure urbaine, des liaisons ferroviaires, le contrôle sur les exportations, entre autres. Tout ceci a contribué à la concentration économique et au contrôle politique sur les autres villes. Un autre aspect à prendre en compte a été la crise du salpêtre qui a touché le nord du Chili entre les années 1920-1930. Cette crise a produit une migration de population du nord vers le sud du pays, mais Santiago a été la ville qui a le plus attiré la population vers elle. Un autre élément à relever est l’inexistence d’un centre urbain qui fasse contrepoids à la puissance de la ville de Santiago. A tout cela, nous ajoutons le processus migratoire ville-campagne qui agit depuis les années 1940 vers les différents centres urbains du pays, Santiago étant la ville la plus attirante. Ainsi, cette hypermacrocéphalie est un exemple des fortes disparités spatiales qu’il est possible de trouver au Chili.

Si nous analysons la distribution du PIB par habitant, il est possible de voir que la région minière d’Antofagasta dans le nord du Chili possède un PIB par habitant 10 fois plus élevé que celui de la région avec le plus faible PIB dans le pays, La Araucania1. Ainsi, nous avons une région avec des valeurs similaires aux pays européens comme la France ou l’Italie, mais par contre, sur quelques kilomètres, nous avons des territoires dont les revenus ressemblent à ceux que nous pouvons observer au Nigeria et au Soudan.

C’est dans ce contexte que cet exposé veut discuter le rôle de cette ville dans la structure du système de villes du pays. Il s’agira de montrer le contraste socio-économique du pays, le processus historique et l’évolution de la concentration de la population qui constituent aujourd’hui cette hypermacrocéphalie. Nous discuterons les théories et arguments pour répondre aux questions suivantes : comment arrivons-nous à un tel point de concentration ? Quels événements historiques ont contribué à la formation d’un tel processus ? Quel est le rôle de l’Etat dans cette concentration ?

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Untaking space, philosophie nomade, les écotopies aux Etats-Unis

Café géo du 4 mai 2017, avec Damien Delorme, professeur de Philosophie

Qu’est-ce que la philosophie nomade au travers de ce projet « Untaking space » ? Comment le fait pour un philosophe, de partir en voyage lui permet de penser l’espace ? Qu’est-ce que le voyage à vélo apprend au philosophe sur l’habitation de l’espace ?

Le voyage

Voyage de janvier à Aout 2016, tracer une ligne verte de Miami à Vancouver

Il lui a permis de faire la synthèse de 3 aspects, l’expérience du voyage à vélo, l’expérimentation pédagogique et la recherche en philosophie. Il a relié à vélo 30 écotopies. Ce sont des lieux en résistance avec le modèle dominant de développement économique et d’exploitation de la nature, qui inventent de nouvelles relations avec cette dernière. Ce sont, entre autres, des fermes urbaines, des fermes bios, des parcs naturels, des écovillages, des départements de philosophie de l’environnement.

Concept de philosophie nomade 

Voyager à vélo lui permet de philosopher, c’est une expérience existentielle, spirituelle et philosophique. Une « field-philosophy » qui passe par 4 aspects :

– une réincarnation : être dans le corps, et puis après verbaliser.

– une concrétisation : ne pas partir dans des abstractions, faire naitre des idées précises d’expériences précises.

– cela complexifie le rapport la réalité, fait émerger un pluralisme des opinions, et apprend à se méfier des généralités

– humilité :  le cycliste se retrouve en position de vulnérabilité, il devient réceptif à la sagesse, c’est une ouverture nouvelle

I- Le concept d’écotopies

Concept d’Ernest Callenbach issu de son roman Ecotopia (1976) : Le fait de désigner des lieux qui reprennent la question d’organiser la vie commune autour des questions écologiques. Replacer la question centrale de l’écologie sur la question d’habiter. On entend « utopie » dans écotopies, donc quelque chose qui ne pourrait pas se réaliser en apparence.

Mais en fait cela rouvre l’imaginaire politique, ainsi les écotopies sont des lieux où l’on invente. Si l’on revient à l’étymologie, on entend deux racines grecques, oikos qui est le domaine et topos qui le lieu.  Ainsi c’est aussi une interrogation profonde de ce qu’est habiter. L’habitation d’un territoire peut s’articuler sur des problèmes locaux, (stocker de l’eau, produire de la nourriture) et aussi une préoccupation qui comprend des préoccupations environnementales globale, afin d’inventer un nouveau modèle.

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Un dessin systémique dans la géographie de Anton van der Wyngaerde : Zahara des thons

Le dessin du géographe n° 65

Fig.1: El amadraba de Zahara, Anton van der Wyngaerde, 1565, 153 x 53,5 cm (papier, plume et lavis sepia), Vienne, Osterreichische Nationalbibliotek.

(La taille du dessin oblige ici à le présenter en 2 parties, la partie supérieure venant à gauche de la partie inférieure)

Ce dessin de belle taille a pour sujet la amadraba de Zahara. D’après le dictionnaire de la langue espagnole, ce terme désigne à la fois :

– le lieu de la pêche aux thons et l’endroit où ils sont préparés après la capture,

– le filet et/ou le cercle de filets qui servent à leur capture,

– la saison de pêche.

L’auteur y a porté de nombreuses indications manuscrites de lieux, d’actifs et d’activités, ainsi qu’une grande légende explicitant des lettres inscrites dans l’image, faite de 2 listes des mêmes lettres (ce qui ne simplifie pas leur identification) , mais de taille différente:

  • Celle de gauche concerne les lieux et les sites géographiques :

A La tour de Mecca (Meca)

B Cap de Trafalgar

C Cap du Sportel (Espartel) , il y a 7 lieux jusqu’au cap de Trafalgar terre du duc (de Medina Sidonia) et jusqu’au Détroit ( ?)

D Alcasar segar (Tanger ?)

E Château de Barbate

F Rio de Barbate (qui vient d’Alcala)

G Salines

H Cap de Plata

K Tour de la tollar ( de l’atalaya = tour de guet) d’où les thons sont observés

+ 5 lieues de mer depuis la almadraba de Zahara jusqu’à Cera Sagar (Tanger ?)

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Jérusalem et ses frontières

Compte rendu du Café géo du 25 avril 2017 au Café de Flore (Paris)
Intervenant : Emmanuel Ruben

Modérateur : Daniel Oster

Emmanuel Ruben, normalien, est géographe de formation, mais après une courte période d’enseignement en banlieue parisienne, il décide de se consacrer à une œuvre littéraire ainsi qu’à un travail de dessinateur et d’aquarelliste. Obsédé par le thème des frontières, il a vécu dans un certain nombre de villes-frontières comme Istanbul, Riga, Kiev et Novi Sad. Et il a séjourné deux fois à Jérusalem en 2010 et 2014. De cette expérience il a tiré un ouvrage Jérusalem terrestre (Editions Inculte, 2015), support privilégié de ce Café géo.

Comment votre rapport à la géographie a-t-il évolué à travers vos livres ? Comment expliquer le choix de Yalta dans votre premier roman, Halte à Yalta (2010) ?

E. Ruben rappelle le caractère mythique du lieu où aurait été décidé le partage de l’Europe, sujet correspondant à son intérêt pour les frontières. Il rappelle que Khrouchtchev a fait « cadeau » de la Crimée à l’Ukraine en 1954. Pour un géographe romancier, il est aussi intéressant de rappeler l’espoir déçu de Julien Gracq qui voulait faire une thèse de géomorphologie sur la Crimée.

 Dans La ligne des glaces, roman publié en 2014, vous écrivez une sorte de fable géopoétique sur l’infini des frontières, située dans un archipel de la Baltique. Le héros doit en cartographier la frontière maritime. Quel est le rapport entre géographie et fiction ?

Le pays imaginaire (« La Grande Baronnie ») est une synthèse des trois pays baltes. Il représente un futur dystopique de ce que pourrait devenir l’Union européenne dans un contexte de confrontation à la Russie.

Et dans Icecolor (2014) ?

Dans ce texte consacré à l’artiste danois Per Kirkeby, peintre et géologue de formation, E. Ruben a voulu montrer que, dans sa tentative de déchiffrage géopoétique du Grand Nord, il faisait des tableaux stratigraphiques.

Dans Les ruines de la carte (2015), quelle relation explorez-vous entre le pouvoir imaginaire des cartes et la fiction ?

La fascination d’E. Ruben pour les cartes trouve un écho dans sa passion pour des peintres ou des écrivains.

Le livre part d’une réflexion sur la carte représentée au fond du tableau de Vermeer L’art de la peinture. Il y élabore une théorie qu’on peut rapprocher de celle de Borges dans L’art de la cartographie. Le Gréco a aussi suscité son intérêt avec Vue et plan de Tolède (1610-1614) où le peintre juxtapose carte et paysage.

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Les États-Unis, espaces de la puissance, espaces en crises

Six mois après la parution de leur Atlas des États-Unis. Un colosse aux pieds d’argile [https://www.autrement.com/ouvrage/atlas-des-etats-unis-christian-montes-pascale-nedelec-cyrille-suss], et au lendemain de l’investiture du président Donald Trump, les cafés géo de Lyon accueillent, 1e 1er février 2017, Pascale Nédélec et Christian Montès pour une présentation à deux voix intitulée « Derrière le choc des urnes, des mutations radicales ? Le regard de l’Atlas des États-Unis 2016 ». Pascale Nédélec est docteure en géographie et AGPR à l’École normale supérieure. Sa thèse de doctorat [https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00946236/PDF/NEDELEC_DA_construire_Las_Vegas.pdf] propose une réflexion sur l’urbanité et la citadinité de Las Vegas. Elle a coordonné un dossier régional sur « les États-Unis, espaces de la puissance, espaces en crises » sur Géoconfluences [http://geoconfluences.ens-lyon.fr/informations-scientifiques/dossiers-regionaux/etats-unis-espaces-de-la-puissance-espaces-en-crises].

Christian Montès est professeur des universités à l’université Lumière Lyon 2 et est rattaché à l’UMR 5600 EVS. Nous avons déjà eu le plaisir de l’accueillir pour plusieurs cafés géo dont l’un portait sur les capitales d’État aux États-Unis [https://cafe-geo.net/les-capitales-detat-des-etats-unis-small-is-powerful/] et l’autre sur les transports urbains à Lyon [http://cafe-geo.net/les-transports-dans-l-amenagement-urbain-a-lyon/]. Il a récemment publié un ouvrage en anglais sur la géohistoire des capitales d’État américaines [http://press.uchicago.edu/ucp/books/book/chicago/A/bo16720894.html].

Introduction

La question qui guide leur présentation est ce savoir si en travaillant sur leur atlas, ils sont parvenus à voir des mutations profondes aux États-Unis qui expliqueraient le vote pour Donald Trump.

Christian Montès commence d’emblée par préciser qu’ils n’ont pas fait de pronostics dans leur atlas, mais qu’à travers les cartes et les graphiques qu’ils commenteront ce soir le public pourra mesurer le niveau de surprise des auteurs à l’égard des résultats de l’élection de novembre.

Qu’est-ce qu’un atlas et qu’y trouve-t-on ?

Pascale Nédélec et Christian Montès ont été contactés par les éditions Autrement pour faire un atlas sur les États-Unis. Pascale Nédélec explique que c’est un exercice très codifié, mais qu’ils ont bénéficié d’une très grande liberté éditoriale. Ils ont cherché un équilibre entre présenter des informations et des visuels que l’on trouve (presque) partout et insuffler des choses plus originales, notamment leurs propres centres d’intérêt pour la géographie des États-Unis et leurs propres sujets de recherche. Il s’agissait, sans négliger les passages obligés, de proposer d’autres éclairages que ceux habituels pour participer à une meilleure compréhension des États-Unis. Les atlas sont des ouvrages qui périment très vite ; la rédaction a commencé au début de l’année 2016 car les éditions Autrement souhaitaient sortir l’ouvrage avant les élections. Les auteurs ont cherché à mettre en avant des dynamiques structurelles et des éléments plus conjoncturels. Selon eux, l’élection de Donald Tump s’inscrit dans une évolution sur le temps long. Faire un atlas suppose d’utiliser un certain nombre de données. Dans le cas des États-Unis, on n’en manque pas, et la difficulté est plutôt celle des choix à faire tant les sources à utiliser sont nombreuses. Les auteurs ont donc essayé de prendre les données les plus parlantes, les plus fiables, et avec beaucoup de profondeur historique. Cet ouvrage s’adresse à des universitaires, des étudiants, mais aussi le grand public, ce qui explique l’alternance entre des pages très codifiées et des pages plus originales ou même amusantes…

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Géographie et pédagogie dans les préaux des écoles

Dessin du Géographe n° 64

 

Jean Julien (1888-1974) : Marseille, le port de commerce
Esquisse pour le préau, école de garçons, rue Saint-Martin, Paris, 3e
1933, huile sur toile

Cette aquarelle a été présentée par le peintre Jean Julien au concours, lancé par le Ministère de l’Instruction Publique, pour la décoration du préau d’une école de garçons de la rue Saint-Martin à Paris dans les années 1930. Je n’ai pas retrouvé de notice bibliographique concernant cet artiste et ignore presque tout de son parcours professionnel, sauf qu’il a travaillé pour la commande publique (tableaux à la mairie de St-Ouen), qu’il a voyagé en France méditerranéenne et en Afrique du Nord, et qu’il a créé des affiches pour le tourisme dans l’entre-deux-guerres.

Son aquarelle représente le vieux port de Marseille vu depuis le quai de la Mairie (ou aujourd’hui quai du Port  ). Le quai de Rive neuve est donc au second plan, et la colline de Notre-Dame-de-la-Garde ferme l’horizon sud du bassin.

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A propos des finisterres et sutures du globe

Jacques Bethemont, géographe, un ami très cher vient de nous quitter. Il avait fourni aux Cafés Géographiques un texte mis en ligne le 6 mars 2006 avec le titre « La grive de Montboissier » http://cafe-geo.net/wp-content/uploads/grive-montboissier.pdf . C’était, disait-il, sorti de ses « tiroirs », le récit d’une visite du château de Montboissier ou du moins de ce qu’il en reste, à la suite d’une relecture du Chateaubriand des Mémoires d’Outre-Tombe. Châteaubriand y avait vécu.

Avec « Les finisterres et les sutures du globe» Jacques Bethemont nous propose ici une réflexion géographique, sous la forme d’un récit de voyage aux Etats-Unis en 1989.Il publia, la même année avec Jean-Michel Breuil « Les Etats-Unis, une géographie régionale » (Masson 300p.), puis en 1991 chez le même éditeur « Les Etats-Unis, une géographie thématique ».

Finisterres et sutures du globe

Finisterre, mot ambigu puisqu’à la fin de la terre répond l’ouverture sur la mer, c’est-à-dire sur une multitude de routes. Sans doute en allait-il autrement lorsque la terre était plate et que la mer n’ouvrait que sur l’infini ou le vide. La fin de la terre coïncidait alors avec le bout du monde et cela laissait place à bien des spéculations dans l’Occident du Vieux Monde, surtout si ce finisterre était borné par une île au-delà de l’île. Au large de Mull, la petite île de Iona abrite encore les tombeaux des défunts rois celtes dont les âmes étaient parties vers le large. Dans l’Ouest de l’Irlande, parmi les moines de l’Abbaye de Ballinskelligs, de rares cénobites gagnaient plus au large l’île de Skellig pour méditer dans des cellules exposées aux grands vents et aux tempêtes. Sur la fine pointe de l’île, ils avaient même sculpté des sièges de pierre à l’aplomb de la falaise. Quel était leur vertige ? Faisaient-ils face à l’infini divin ou au néant ?

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La Pologne face aux enjeux de mémoire

Le nouveau Musée de la Seconde Guerre mondiale inauguré à Gdansk (Pologne) en janvier 2017 (AFP PHOTO / Wojtek RADWANSKI/ www.huffingtonpost.fr)

A plus d’un an du centenaire de l’indépendance de la Pologne (proclamée le 11 novembre 1918), le gouvernement nationaliste du parti Droit et Justice (PiS) de Jaroslaw Kaczynski, au pouvoir depuis novembre 2015, entend profiter de l’occasion pour imposer sa vision de l’histoire et exploiter à son profit le sentiment patriotique des Polonais. La controverse née autour du nouveau Musée de la Seconde Guerre mondiale, construit à grands frais à Gdansk, illustre les enjeux politiques autour des questions de mémoire. Depuis la chute du communisme en 1989, la Pologne regarde son passé avec un immense intérêt ce dont témoigne par exemple, la prolifération des lieux de mémoire et des musées à visée mémorielle[1].

La question des relations judéo-polonaises

Après 1945, les nouvelles autorités polonaises sont amenées, pour légitimer leur pouvoir, à insister sur les souffrances de la nation polonaise tandis que le sort des Juifs pendant la guerre est occulté pour l’essentiel. C’est seulement dans les années 1980 qu’un débat public est engagé sur la responsabilité des Polonais à l’égard de leurs concitoyens juifs pendant la guerre. La diffusion d’extraits de Shoah, le film de Claude Lanzmann, à la télévision polonaise en 1985, contribue à l’émergence de ce débat. Mais il faut attendre la parution, en 2001, du livre de l’historien américain d’origine polonaise, Jan Tomasz Gross, Les voisins. Un pogrom en Pologne, 10 juillet 1941[2], pour donner toute son ampleur au débat national. Le thème juif occupe désormais une place essentielle, suscitant nombre d’investigations scientifiques et un déploiement mémoriel multiforme qui culmine avec l’édification du Musée d’Histoire des Juifs de Pologne, inauguré en 2014 à l’emplacement même de l’ancien ghetto de Varsovie.

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Peinture et géographie. Rencontre avec Roland Courtot

Exposé de la conférence-débat du 25 février 2017 avec Roland Courtot à l’Institut de Géographie de Paris.

La rencontre, programmée dans un des hauts lieux de la géographie française (une salle de cours de l’Institut de Géographie de la rue St Jacques à Paris) aurait pu s’appeler aussi « le Peintre et le Géographe », car l’exposé a porté autant sur les deux disciplines et leurs acteurs que sur les relations qu’elles entretiennent depuis longtemps. Cette invitation de la part de l’équipe des Cafés Géographiques s’inscrivait dans la continuité de la page web du dessin du géographe publiée le 1/2/2017 (http://cafe-geo.net/quelques-croquis-dexcursions-geographiques-au-debut-du-19eme-siecle/) et d’une rencontre antérieure avec le géographe aquarelliste Simon Estrangin (café géographique du 15 mars 2016, voir le compte rendu par Michel Sivignon : http://cafe-geo.net/simon-estrangin-et-la-geographie-sur-le-vif/).

J’ai limité ces réflexions aux rapports entre les œuvres graphiques des peintres (peintures, dessins,  fresques, etc.) et la géographie, qu’on pourrait situer dans la « géographie  des œuvres d’art », afin de la distinguer de la « géographie de l’art » telle qu’elle est définie par Boris Grésillon dans son ouvrage déclaratif de 2014 (« Géographie de l’art » Economica, 2014) comme une branche de la géographie culturelle, celle du système socio-spatial de l’art et des activités urbaines qui l’accompagnent.

On peut, en introduction, rappeler quelques parallèles entre la géographie et l’art graphique et pictural, rappeler quelques liens que ces deux « arts » entretiennent depuis longtemps, au moins dans l’histoire européenne. Ils possèdent un objet en commun, le paysage, ils l’observent sur le terrain et voyagent en remplissant des carnets de dessins, ils en construisent des images selon des techniques semblables : sur un plan, en deux dimensions, avec des points, des traits, et des surfaces. Rien d’étonnant à ce qu’ils se soient mutuellement nourris et enrichis.

Bien sûr leur finalité n’est pas la même : le peintre traduit les formes et les impressions esthétiques et sensibles du paysage, le géographe analyse les formes d’organisation de l’espace pour comprendre la façon dont les sociétés humaines l’occupent et dont les logiques naturelles le façonnent. Sensibilité d’un côté, raison de l’autre ? Ce n’est pas aussi tranché, puisqu’il existe une géographie du vécu et du sensible, et que des peintres ont introduit dans leurs paysages des logiques raisonnées pour l’interpréter (comme les formes géométriques du cubisme par exemple).

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Comment Le Monde cartographie la planète

Les Cafés géographiques ont bénéficié le mercredi 8 février 2017 d’une soirée exceptionnelle dans l’auditorium du journal Le Monde.

Delphine Papin, chef du service infographie au Monde, Flavie Holzinger et Francesca Fattori, journalistes-cartographes en charge de la partie internationale, nous ont parlé des enjeux qu’il y a à concevoir et à réaliser – souvent dans l’urgence – des cartes pour ce prestigieux quotidien du soir.

Ces trois journalistes sont proches des Cafés géographiques et aussi des Cafés géopolitiques qu’elles ont longtemps animés.  C’est grâce à leur talent et à leur pugnacité que Le Monde a accepté et reconnu l’intérêt de décortiquer l’actualité à travers le prisme de cartes complexes car rien ne s’explique simplement si l’on veut être rigoureux.

Delphine, Flavie et Francesca sont intervenues successivement.

Etre journaliste-cartographe au journal Le Monde (Delphine Papin)

La carte, une nécessité pour  « raconter l’actualité autrement »

Guerre en Syrie, migrants à Calais, attentats en Europe ou Elections présidentielles autant de sujets que le journal Le Monde a fait le choix de raconter en carte.

A côté  des journalistes-rédacteurs, des journalistes-photographes, des journalistes-dessinateurs, il y a depuis quelques années dans l’équipe du quotidien, des journalistes-cartographes dont l’objectif est de faire comprendre l’actualité par le territoire. La carte permet aux lecteurs de mieux comprendre un conflit.  Son rôle est alors d’accompagner le texte voire même de s’y substituer. Si la carte est un des outils utilisés par Le Monde pour traiter l’actualité, cette « révolution » est récente.

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