Géographie et littérature (2/2)

Une première version de ce dossier a été mise en ligne le 9 février 2013. Nous remettons en ligne ce dossier suite à la mise à jour de notre site, les articles cités en références étant à nouveau disponibles. Cette seconde version du second dossier sur « Géographie et littérature » (après un premier dossier consacré à l’œuvre de Julien Gracq), a été actualisée consciencieusement avec les liens vers les articles tels que republiés sur le nouveau site des Cafés géographiques. Le complément bibliographique n’a pas été retouché et est republié tel que lors de sa première parution.

Après le dossier sur « Julien Gracq et la géographie » et comme « lancement » de la nouvelle rubrique « Littérature » des Cafés géographiques, voici le deuxième volet consacré aux liens entre « Géographie et littérature ». La rencontre de la géographie et de la littérature par les écrivains-géographes (Julien Gracq, Lucien Gachon, Michel Bussi, etc.), mais aussi par l’ensemble des écrivains, se poursuit dans ce dossier par d’autres récits, de Jules Verne à Simenon, des spatialités du vin dans la littérature au paysage-outil des écrivains et/ou géographes, de la géopoétique à la bande dessinée et au manga. De la géographie de la « consommation » des livres comme produits culturels à l’analyse de la géographie imaginaire dans les récits (en mots ou en dessins), les liens entre géographie et littérature sont décryptés par les géographes comme révélateurs des liens entre géographie et imaginaire, entre espaces de vie et espaces représentés et/ou fantasmés. Les métaphores de l’amour ou de la haine de tel ou tel espace (urbaphobie pour les uns, urbaphilie pour les autres ; attirance pour la forêt-écran pour les uns, peur de la forêt-danger pour les autres ; le désert entre espace de brutalité, espace-refuge et espace de l’espoir ; etc.), les espaces du récit traduisent, par leurs descriptions poétiques, des pratiques, des représentations et des imaginaires spatiaux. « Parce que le moindre lieu, manie de géographe, est porteur de sens »1.

L’imaginaire de l’île au trésor Source : Frédéric Durand et Marie Redon, « Qu’est-ce qu’une île aujourd’hui ? », Cafés géographiques, rubrique Des Cafés, compte rendu du café géographique du 25 avril 2007, 25 avril 2007.

L’imaginaire de l’île au trésor
Source : Frédéric Durand et Marie Redon, « Qu’est-ce qu’une île aujourd’hui ? », Cafés géographiques, rubrique Des Cafés, compte rendu du café géographique du 25 avril 2007, 25 avril 2007.

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Des bourgs aux métropoles : l’habitat au centre ancien

Café géographique à Toulouse le 13.04.2016,
avec Fabrice Escaffre (Géographe, Maître de Conférences en Aménagement et Urbanisme, Université Toulouse Jean-Jaurès, LISST-Cieu).

  1. Pourquoi s’intéresser aux centres urbains ?

Depuis les années 70-80, les centres urbains, ou centres anciens, ou centres ville, connaissent une mutation profonde liée au passage de la ville à l’urbain. La ville s’étend, de nouvelles centralités apparaissent autour de polarités de commerces, d’emplois et de loisirs, renforcés par l’étalement résidentiel. Les espaces urbains deviennent polycentriques dans les métropoles, mais aussi dans les petites villes comme Condom (Gers) où se développent, autour du centre historique ancien, des centres nouveaux d’activité qui le concurrencent.

En même temps, la fonction résidentielle de ces centres anciens devient problématique : faut-il en faire des villes musées autour du patrimoine historique ? Ou des centres commerciaux attractifs à force de piétonisation et de terrasses ? L’habitat devient sélectif dans les métropoles en fonction des revenus et de l’âge, ou bien il est abandonné dans les petites villes où on ne compte plus les logements vacants (jusqu’à 20%). L’offre d’accès au logement se développe à la périphérie : quel sens a alors la fonction d’habitat dans les centres anciens ?

Comment définir les centres anciens à l’heure de la mobilité ? La morphologie urbaine (les boulevards) ne suffit plus Les périmètres retenus par les politiques de la ville (OPAH, territoires prioritaires, etc.) sont très variés, englobent parfois le péricentre moins ancien mais qui connaît les mêmes problèmes. Comment les centres anciens sont-ils vécus ? Font-ils quartier ? Les modes d’habitat sont en fait multiples avec les déplacements quotidiens actuels.

Quelle est la situation de l’habitat en centre urbain : sélection ou abandon ? Qui vit en centre-ville, et qui n’y vit pas ? L’image d’un peuplement mixte est-elle encore valable ? Veut-on y rester ? Les jeunes couples s’installent au centre, mais le quittent dès le premier enfant, dont les enfants n’auront pas connu le centre-ville : ne pas rester est devenu une sorte de réflexe. Quelles mobilités : voiture ou transport en commun ? Ces derniers existent bien dans les métropoles, mais les citadins des villes petites et moyennes sont forcés de recourir à la voiture pour accéder aux activités périphériques car on ne peut pas y développer les transports en commun. Comment travailler sur les centres ville ? Les programmes d’amélioration de l’habitat (OPAH) semblent à bout de souffle.

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Le terrorisme frappe les hétérotopies

Quoi de commun entre la plage de l’hôtel de Sousse en Tunisie, la salle de concert du Bataclan à Paris, l’aéroport de Bruxelles en Belgique, le site de Palmyre en Syrie ou encore la discothèque gay d’Orlando en Floride ? Le terrorisme frappe-t-il au hasard ou n’y a-t-il pas dans ces lieux quelque chose de commun ?

Relire Michel Foucault peut permettre de répondre à ces interrogations. Lors d’une conférence au Cercle d’études architecturales donnée en 19671, Foucault fonde le concept d’« hétérotopie »2. Il distingue ainsi des lieux qui se différencient des autres car ils fonctionnent comme des « contre-espaces », des utopies localisées comme, par exemple, la tente d’indiens dans le grenier ou le lit des parents occupé par les enfants, mais aussi les clubs de vacances, les musées, les bibliothèques ou encore les bateaux. Ces hétérotopies se logent donc dans l’espace privé ou public, des espaces de l’intime ou de l’extime3.

Ces hétérotopies ont alors un autre fonctionnement : les groupes sociaux y agissent suivant des règles qui ne répondent plus ou plus totalement à celles qui peuvent s’exercer dans les espaces environnants. Dans ces espaces, les comportements sociaux et corporels sont modifiés.

Foucault explique que ces lieux servent en quelque sorte à « effacer, neutraliser ou purifier » les autres espaces. Dit autrement, les espaces fonctionnent comme des soupapes : expressions des sentiments et des émotions qui sont normés habituellement et contrôlés dans les espaces du quotidien.

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L’Espagne, une nation éclatée ?

Compte rendu du café géographique de Saint-Brieuc
21 avril 2016

Cyril Trépier est géographe, il enseigne à l’université de Cergy et en classe préparatoire à Meaux. En 2011, il soutient sa thèse « Analyse géopolitique de l’indépendantisme en Catalogne ». Elle est éditée en 2015,  dans la collection Logiques politiques, L’Harmattan. Cet ouvrage ainsi que « L’Espagne en crise(s), une géopolitique au XXIe siècle » de Nacima Baron, professeure à l’université de Paris-Est, et de Barbara Loyer, professeure à l’université de Paris 8, Armand Colin, 2015, sont les deux ouvrages de référence pour ce café géographique.

Ce café géographique s’est tenu dans le cadre du projet pédagogique des lycées Renan et Rabelais sur le thème « La musique dit le monde », autour du combo barcelonais Muyayo*Rif invité en résidence. Le sujet de ce soir « L’Espagne, une nation éclatée ? » fait écho à ce groupe de musiciens au répertoire espagnol et catalan. Et en guise d’introduction, les Muyayo ont chanté pour l’auditoire l’Estaca, composé en 1968 par Lluis Llach. Chanson de résistance sous le franquisme, elle est aujourd’hui l’hymne populaire catalan.

Le groupe barcelonais MUYAYO*RIF

Le groupe barcelonais MUYAYO*RIF

Depuis 2008, l’Espagne est confrontée à une crise économique profonde qui a révélé les faiblesses du système politique mis en place en 1975, à la fin de la dictature franquiste. Entre mouvement « indignés », exacerbation des revendications indépendantistes, émergence de nouveaux partis, le pays apparaît comme un territoire fragmenté et socialement fracturé. L’État espagnol va-t-il pour autant éclater ? Pour répondre à la question posée, ce soir, par les Cafés Géographiques, Cyril Trépier prendra pour exemple le cas de la Catalogne.

(La Constitution de 1978 a permis ultérieurement, à partir de 1981, l’organisation du territoire espagnol en 17 Communautés autonomes qui disposent toutes d’un régime plus ou moins large d’autonomie par rapport à l’État central. Trois de ces Communautés autonomes sont reconnues comme des nationalités, la Catalogne, le Pays basque et la Galice, communautés « historiques » car chacune reçut un statut d’autonomie sous la II° République de 1931 à 1936).

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Territoires de santé, santé des territoires : vers des déserts médicaux en France ?

Café géographique du 03/ 05/ 2016 au Gazette Café de Montpellier, avec Christophe Evrard, maître de conférences de l’Université Paul Valéry Montpellier 3. 

« Les professions de santé sont en mauvaise santé. »

Cet exposé a pour objectif de vous aider à comprendre le pourquoi et le comment de la situation de la démographie médicale en France, mais surtout de montrer quelles conséquences territoriales cela implique. Les médias sortent souvent ce sujet quand il faut se mettre quelque chose sous la dent : les déserts médicaux, les difficultés de certaines populations pour trouver un médecin au quotidien, le déficit de la sécurité sociale… sont autant de thématiques récurrentes. Mais parmi ces thèmes, la baisse du nombre de médecins est une réalité fréquemment soulignée, ainsi que l’augmentation du nombre de « déserts médicaux ». En 2013, un rapport du Conseil National de l’Ordre des Médecins souligne que le nombre total de médecins (généralistes, spécialistes et chirurgiens) a enregistré une baisse de -0,3%. D’ici 2020, la France risque de manquer de médecins ! Toutefois, certains faits établis il y a quelques décennies, permettent d’apporter les premiers éléments de compréhension de la situation actuelle.

Des disparités géographiques récurrentes…

Il est à remarquer dans un premier temps, que les disparités géographiques entre les régions du Nord et du Sud de la France sont « classiques », et ne datent pas d’aujourd’hui. Ces oppositions géographiques se fondent sur le nombre de médecins et l’accès au soin des populations, soit la densité médicale. Son application aboutit à l’existence de disparités territoriales entre les régions du Sud, mieux pourvus en médecins que les régions se trouvant au Nord. Ce fait ne date pas d’aujourd’hui : il y a déjà des disparités entre le nord et le sud de la France depuis de nombreuses décennies, et en lien avec les contextes successifs.

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Violence politique au Burundi ou l’impossible démocratisation

Ce café géographique, programmé le mercredi 25 novembre 2015, a été animé par Aloys NDAYISENGA, chef du département de géographie de l’université de Bujumbura. En 2010, il a soutenu une thèse intitulée « La reproduction d’un système paysan à travers les revenus extérieurs à l’exploitation : le cas de la région du Bututsi au Burundi ». Elle a été réalisée au laboratoire « Dynamiques Rurales », à Toulouse.

Introduction

Petit État de la région des grands lacs (environ 28 000 Km²), le Burundi est peu connu des Français et des Européens en général. Cette méconnaissance est même utilisée à des fins comiques : à la fin du film à succès « Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu », Christian Clavier présente son acolyte, avec lequel il voyage en fraude dans un train de la SNCF, comme le ministre des finances burundais ! De façon moins « légère », les Occidentaux se souviennent que deux de ses principales composantes « ethniques », les Hutus et les Tutsis, se sont affrontés dans un génocide particulièrement meurtrier dans la première moitié des années 1990. Ils ont découvert plus récemment, et en même temps que les membres de la diaspora vivant sur le « Vieux Continent », le déclenchement d’une nouvelle crise politique, dont les origines semblent se trouver dans la réélection contestée de Pierre Nkurunziza, en 2015. L’objet de ce café géographique était donc de débattre et d’apporter, en toute modestie, quelques pistes d’interprétation de ce blocage politique. Deux questions ont guidé le propos de l’intervenant et structurent ce compte-rendu : Pourquoi le « pays des mille collines » fait-il face à un nouveau cycle de violence, après ceux de 1972 et 1993 ? Et quelles sont les perspectives d’accalmie à moyens termes ?

Un territoire élevé, sous-urbanisé et uni autour d’une langue

En se limitant aux aspects généraux, le Burundi peut être subdivisé en trois grands ensembles topographiques :

  • L’Ouest du pays est cisaillé par une profonde ride, dans laquelle se trouvent le lac Tanganyika et la capitale : Bujumbura. C’est une partie du « Rift Albertien », appelée localement Imbo, et dont l’altitude n’excède jamais 1000 mètres.
  • Cette dépression est interrompue vers l’Est par une crête acérée, qui présente les plus hauts sommets du territoire (les massifs du Heha, du Teza ou encore du Twinyoni culminent tous à plus de 2600 mètres) et sépare le bassin hydrographique du Congo de celui du Nil.
  • La crête Congo-Nil est raccordée à l’Est du pays par des plateaux, qui s’affaissent doucement en direction de la frontière tanzanienne. Les « cuvettes » du Bugesera et du Kumoso, situées aux confins orientaux du territoire, ne dépassent pas 1400 mètres d’altitude.

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Le Douanier Rousseau. L’innocence archaïque.

Musée d’Orsay
22 mars-17 juillet 2016-05-22

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Prenant pour thème « l’innocence archaïque du peintre », la très belle exposition organisée par le musée d’Orsay et la Fondazione Musei Civici di Venezia, replace les œuvres de Rousseau entre ses sources d’inspiration académiques et les influences qu’il exerça sur les avant-gardes du début du XX ème siècle. Delaunay, Léger, Picasso, Kandinsky, lui doivent beaucoup.

Bizarre, l’œuvre du Douanier Rousseau ? Naïve ? Primitive ? Allez vite, déguster comme un bonbon, acide ou sucré, une œuvre non conforme qui libère et qui fait rêver.

Henri Rousseau, homme et peintre singulier

Une vie difficile (1844- 1910)

Il naît et grandit à Laval dans un milieu modeste. Sur les bords de la Mayenne, il observe la lumière et dans les églises, les chapiteaux et leur bestiaire.

Après des études de droit, il s’engage dans l’armée, puis trouve un poste à l’octroi de Paris (douane sur la Seine). Toute sa vie sera une vie immobile, sédentaire, même s’il affirmera avoir voyagé jusqu’au Mexique.

Alors qu’il n’est jamais allé dans une école d’art, il se met à peindre et obtient une carte de copiste au musée du Louvre. Ce n’est qu’à 49 ans qu’il quitte son métier de douanier pour vivre (ou tenter de vivre) de son art.

Marié, veuf, remarié, à nouveau veuf, père de nombreux enfants dont un seul lui survivra, Rousseau doit aussi endurer des échecs comme artiste peintre.

Pendant vingt ans il expose au Salon des Indépendants, parfois considéré comme celui des « peintres du dimanche », parce qu’il n’y a ni prix, ni jury. Il doit essuyer les moqueries de nombreux visiteurs et la critique acerbe d’un journaliste : « Monsieur Rousseau peint avec ses pieds, les yeux fermés ».

Mais il s’obstine et se prétend le plus fort de son temps (avec Picasso). Il n’est reconnu que pendant sa dernière décennie d’artiste, mais par les plus grands peintres de l’avant-garde de son temps : Il fascine Delaunay, Léger, Picasso, Kandinsky, qui lui achètent des toiles.

Il vit comme une apothéose de sa vie artistique le banquet organisé en son honneur en 1908 par Picasso et ses amis dans l’atelier du Bateau-Lavoir.

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L’Asie centrale, des empires à la mondialisation

Julien Thorez est géographe, chargé de recherche au CNRS, membre du laboratoire « Mondes iranien et indien ». Il a récemment dirigé la publication d’un ouvrage intitulé Asie centrale : des indépendances à la mondialisation.

L’expression « Asie centrale » désigne une entité géographique dont les limites diffèrent suivant les périodes, les approches, les auteurs. Dans le cadre de cette conférence, Julien Thorez s’intéresse à l’Asie centrale post-soviétique, aujourd’hui composée de cinq états indépendants : le Kazakhstan, l’Ouzbékistan, le Turkménistan, le Kirghizstan et le Tadjikistan. Au cœur du continent eurasiatique, cette région du monde turco-iranien été au centre du « grand jeu » entre l’empire britannique et l’empire russe au XIXe siècle. Après avoir été colonisée par l’Empire tsariste puis intégrée à l’Union soviétique, elle entre dans la mondialisation.

I] Qu’est-ce que l’Asie centrale ?

L’Asie centrale post-soviétique

L’Asie centrale est donc une région aux contours flous, englobant des réalités très variées, au point d’être considérée comme une région à géométrie –et d’autant plus à géographie- variable.  Dans son acceptation la plus large, l’Asie centrale s’étale de l’Anatolie jusqu’au désert de Gobie. Même en la restreignant aux cinq pays post-soviétiques, c’est une région très vaste de quatre millions de kilomètres carrés, néanmoins peu peuplée avec seulement soixante-cinq millions d’habitants. Sa voisine orientale, la Mongolie, constitue le pays à plus faible densité.

 Kazakhstan  Kirghizistan  Ouzbékistan  Tadjikistan  Turkménistan  Asie Centrale
Population (en M)  16,009  5,362  29,993  7,564  ~5,100  64,028
Superficie (en M de Km²)  2,717  0,198  0,447  0,143  0,488  3,993
Densité (hab/km²)  6  27  67  39  10  16

Sources : recensement 2009/2010, estimations

Les pays qui la constituent sont indépendants depuis 1991, séparés par quinze mille kilomètres de frontières dont l’existence est inédite. Leur indépendance a été en réalité plus acceptée que recherchée ; contrairement  aux pays baltes ou caucasien,  les pays d’Asie centrale n’ont pas connu de puissants mouvements indépendantistes.

Ces pays deviennent indépendants au moment où disparait le système politique qui les a engendrés – l’URSSS. Ces entités politiques n’existaient pas avant qu’elles soient créées dans le cadre de la soviétisation de l’Asie centrale avec comme principe de fonder des territoires nationaux. La carte politique est élaborée dans les années 1920-1930.

Depuis leur indépendance en 1991, les Etats centrasiatiques conduisent une politique de consolidation de l’Etat et de la nation dans le cadre politique et territorial hérité de la période soviétique. Les autorités post-soviétiques s’inscrivent dans la continuité des élites politiques soviétiques car, dans la plupart des pays, ceux qui accèdent à la présidence de la république étaient des dirigeants des partis communistes. Actuellement, les présidents ouzbékistanais (Islom Karimov) et kazakhstanais  (Noursoultan Nazarbaïev) qui étaient les leaders de leur République socialiste soviétique, sont toujours au pouvoir.

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L’impact migratoire du changement climatique au Burkina Faso

Café géo Toulouse 30.03.16
avec Véronique Lassailly-Jacob, professeur émérite de géographie à l’Université de Poitiers

Rappelons que la COP 21 (novembre 2005) s’est terminé par un accord sur trois points :

  • Réduire la production des gaz à effet de serre pour ne pas dépasser une augmentation de température de 1,5°.
  • Accélérer la transition énergétique (énergies renouvelables, etc.).
  • Promouvoir une « justice climatique ».

Ne pas respecter rapidement cet accord, c’est prendre le risque de migrations climatiques massives en provenance d’une part, des îles basses et des grands deltas, inondés à cause de l’élévation du niveau des mers et d’autre part, des zones tropicales sèches et arides désertifiées par les sécheresses.

Migrations environnementales et migrations climatiques

On compte officiellement (Norwegian Refugee Council) plus de 19,3 millions de déplacés environnementaux en 2014, victimes de catastrophes brutales (inondations, séisme, tsunamis, etc.). Ce chiffre de 19,3 millions est sous-estimé puisqu’il ne comprend que les déplacés environnementaux. Il ne prend pas en compte les migrants, victimes de dégradations lentes de l’environnement (élévation lente des eaux, érosion des côtes, désertification progressive, etc.). Ces migrants sont difficiles à comptabiliser, contrairement aux précédents.

  • Être déplacé signifie être forcé à fuir et demeurer à l’intérieur du pays, ce qui est le cas de la majorité des migrants environnementaux,
  • Être réfugié signifie migrer sous la contrainte à l’extérieur du pays, ce qui ne concerne qu’une minorité des migrants environnementaux.
  • Être migrant signifie être acteur de son déplacement.

La notion de migration environnementale a été introduite par l’ONU lors du 1er sommet de la Terre à Stockholm en 1972, en lien avec une prise de conscience des dégradations anthropiques croissantes. Celle de migration climatique apparaît plus récemment dans les rapports du Groupe d’experts Intergouvernemental d’Etudes du Climat, le GIEC.

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Une géographie de Marseille par Massilia Sound System

Souvent raillée, la géographie des œuvres culturelles a de nombreux détracteurs, qu’ils considèrent au mieux comme sympathique mais inutile. Il me semble au contraire que géographie et musique font bon ménage. Olivier Milhaud, au FIG de 2015, a analysé 3 chansons pour introduire à un large public la démarche géographique de manière très pédagogique. Le zoo de Vincennes (Bénébar), Telegraph road (Dire Straits) et Supplique pour être enterré à la plage de Sète (Brassens) deviennent sous l’œil du géographe : milieu, espace, territoire, les 3 « paradigmes » de la discipline. Cela m’a fait penser à une chanson, travaillée dans le cadre du sujet « Mers et Océans » pour la préparation aux concours de l’enseignement en 2014-2015.

Qu’elle est bleue, de Massilia Sound System (1993)*, peut être écoutée en géographe mais il me semble qu’elle justifie également une méthode géographique. Les couplets de cette chanson ressemblent (presque) à une dissertation d’agrégatif, avec un plan : 1-Milieu, 2-Espace, 3-Territoires. Nous avons donc ici une œuvre culturelle, issue de non-géographes, qui fait un tableau de Marseille comme un géographe. Ces « Messieurs Jourdain » de la géographie donnent du poids à la démarche géographique, qui est utile et utilisée hors du champ scientifique.

1er couplet : le milieu naturel

Description rapide de l’écosystème marin, hors de toute influence humaine. C’est la mise en place d’un « cadre naturel » immuable, avec des poissons, la dimension verticale du milieu marin, la chaîne alimentaire… Vision naïve d’une nature éternelle, que les hommes se doivent de respecter.

Pour le géographe, cela renvoie à une géographie dépassée. Une analyse de la biocénose comme s’il n’y avait pas d’êtres humain. L’opposition entre nature et culture qui transparaît dans ce couplet n’est plus considérée comme valable dans la  géographie actuelle. C’est donc un premier couplet de géographe physicien d’il y a 50 ans.

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