Qu’est ce que la géographie aujourd’hui ? (R.Marconis)
Café Géo animé par Robert MARCONIS, Professeur émérite de l’Université Toulouse II – le Mirail, agrégé de Géographie.

Éléments de problématique :

Pour le grand public, la géographie est d’abord une discipline scolaire, traditionnellement associée à l’histoire dans le système éducatif français. Depuis les débuts de la IIIème République, histoire et géographie ont pour mission de donner aux élèves, de l’école élémentaire au baccalauréat, les bases d’une éducation civique enracinée dans l’espace et dans le temps.

Très tôt, comme l’histoire, la géographie a su éviter le piège d’une instrumentalisation à des fins politiques en s’affirmant comme une discipline scientifique, visant à rendre compte avec méthode et de façon rigoureuse, de la diversité de l’espace terrestre. Un espace terrestre où à différentes échelles, s’organisent des territoires d’une grande variété, résultant de la combinaison de processus naturels et de l’action des groupes humains.

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Repas haïtien

Animé par Jean Marie Théodat, le 2 février 2010
Ce repas prévu dès décembre survient juste après le tremblement de terre qui a lieu à Haïti voici trois semaines, le 12 janvier. Aussi les convives se pressent nombreux dans cet étonnant appartement de la rue Saint-Jacques, l’ancien cardo de Paris, au cœur du Quartier latin, pour venir écouter et apporter leur soutien à Jean Marie Théodat à la suite de cette tragédie.
Après avoir étudié au lycée Fénelon, Jean Marie Théodat a été pendant 5 ans professeur de collège à Nanterre, puis il a été chargé de cours à l’université de Nanterre, où l’a fait venir Michel Sivignon, avant d’être, depuis 1998, maître de conférences à Paris-1 (Panthéon Sorbonne).
M. Sivignon fut aussi son président de jury de thèse, thèse intitulée « Une île pour deux : Haïti et la République dominicaine », avec comme interrogation : Haïti est-elle encore une île, ou en forme-t-elle deux, ou s’agit-il d’une île siamoise ?

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Géopolitique à l’heure du numérique : la Géographie sert-elle (toujours) à faire la guerre ? (E.Eveno)
Café Géo animé par Emmanuel EVENO, professeur de Géographie à l’Université Toulouse II le Mirail, co-responsable du Master professionnel eAdministration et Solidarité numérique du Centre universitaire Champollion.
Le redécoupage électoral du Tarn : quels enjeux identitaires et géopolitiques ? (G.Buono)
Café Géo animé par Gérard Buono, professeur agrégé de géographie au lycée Soult de Mazamet et intervenant au centre universitaire Champollion d’Albi.

Éléments de problématique :

Pourquoi un journaliste peut-il titrer : « Le Tarn, symbole des invraisemblances du découpage électoral » (L’EXPRESS, 31/07/2009) ?

La loi vient de modifier la carte électorale en vigueur depuis 1986 afin de tenir compte de l’évolution de la population et de rendre en principe la représentativité des députés plus homogène : 33 circonscriptions sont supprimées, 22 sont créées en métropole et dans les collectivités d’Outre-mer et 11 attribuées aux Français de l’étranger (6 pour l’Europe, 2 pour les Amériques, 2 pour l’Afrique et 1 pour l’Asie-Océanie).

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Liste des comptes rendus des Cafés Géo d’Albi

Retrouvez ci-dessous la liste des comptes rendus des Cafés Géographiques d’Albi, publiés sur le site :

Hommage à Pierre Gentelle

Lorsque Pierre Gentelle nous rendit visite pour 4 heures de cours de concours le 9 décembre 2008, dans le cadre de la nouvelle question de programme « Nourrir les hommes », il avait pris un soin méticuleux à se renseigner sur les caractéristiques du CAPES et de l’agrégation, s’inquiétant du décalage entre son année de passage de l’agrégation, fort lointaine, et les réalités actuelles des concours. Son cours « Nourrir le premier peuple du Monde. La Chine face au défi alimentaire », ponctué d’anecdotes et de facéties, avait enthousiasmé les étudiants.

Lorsqu’il revint à Chambéry, c’était pour la 7e édition de notre journée d’études Géo’rizon, le jeudi 17 décembre 2009, consacrée à « l’Asie orientale » et à laquelle il participa aux côtés de Marie-Orange Rivé-Lasan, Philippe Pelletier et Guillaume Giroir. Clôturant la journée, il avait néanmoins captivé l’auditoire, fatigué par une journée bien pleine. Sans Powerpoint ni document, mais avec des images dans les mots, il avait atteint la cible des géographes en devenir. Un sens du verbe et de l’expression qui faisait à chaque fois mouche. Collant au programme de Terminale, cette journée d’études avait pu être suivie, en sus des étudiants, par deux classes de Terminale accompagnées de collègues enseignants du Lycée d’Argonay, près d’Annecy. Les lycéens avaient été fascinés par son sens de la formule, son humour corrosif, son côté « vulgarisateur » (quel mot mal choisi !) dont la géographie a tant besoin, et son comportement de franc-tireur. Ils avaient regretté leur départ vers le bus qui devait les ramener dans les horaires impartis vers leur lycée. Pierre Gentelle m’avait demandé les coordonnées de l’enseignante qui avait fait les démarches, pas toujours simples, auprès de son établissement pour pouvoir emmener ces deux classes à cette manifestation. Il tenait à lui adresser un message directement : « donnez-moi l’adresse de la prof des terminales que je la félicite », et elle reçut effectivement un courriel qui l’a beaucoup touchée.

Il y avait chez Pierre Gentelle cette passion de l’enseignement et de la transmission, une réponse aux diverses sollicitations toujours enthousiaste, sans complication et affichage de titres, un respect pour les étudiants et les petites universités de « province » qui les accueillent.

Si je devais retenir deux choses de Pierre Gentelle, ce serait d’une part le doute, si souvent oublié des chemins académiques pavés de certitudes. Ce serait d’autre part un don de la captation : captation du public et de l’auditoire, comme de ses lecteurs des Lettres de Cassandre, captation des faits essentiels et des articulations majeures, captation des tics, des petits travers de ces contemporains.

Si la géographie a perdu beaucoup avec la disparition de Pierre Gentelle, elle a surtout perdu un de ses meilleurs « médiateurs » ou « passeurs » dans une phase où sa remise en cause comme discipline à part entière est régulière.

Lionel Laslaz
Directeur du Département de Géographie de l’Université de Savoie

2010-10-14 01:35:56

Les forêts grecques aujourd’hui et leur devenir

Café cartographique « Les forêts grecques aujourd’hui et leur devenir », avec pour invité Michel Sivignon, 8 octobre 2010, 19h30, au Kiss Bar, St-Dié-des-Vosges.

Introduits par Jasmine Salachas, deux cafés cartographiques autour des incendies de forêts se déroulent en cette soirée du vendredi 8 octobre à St-Dié-des-Vosges. Le premier concerne les incendies en Grèce à l’été 2009[1]. Le second, animé par le géographe Jean Radvanyi, aborde une actualité très brûlante à travers les incendies de forêts en Russie à l’été 2010 (en écho au café géo de Paris quelques jours plus tôt). « De l’imaginaire à la réalité… Grèce, Russie : un état des lieux » va être au cœur de ces deux cafés cartographiques qui vont entraîner le public du Festival international de géographie dans des décors forestiers très différents.

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Pierre, notre si cher ami

Pierre Gentelle est décédé le 4 octobre 2010.

Tu te rappelles, Pierre, nous étions dans un café boulevard de Sébastopol, c’était peu après l’an 2000. Tu me prends au mot en disant que tu pourrais un jour tenir une lettre qui s’appellerait la Lettre de Cassandre. Pourquoi Cassandre, car on ne choisit pas un pseudo au hasard. « La famille des Atrides s’impose à qui s’adresse à la famille universitaire. Mieux vaut être situé sur les marges qu’au centre, pour conjurer un sort qui donne tort à qui cherche à « voir ». Raison garder plutôt qu’avoir raison, beau programme, n’est-ce pas ? »

pierre-gentelle

Superbe programme, en effet, Pierre ! 128 lettres de Cassandre. Du Moyen-Age et son goût de la numérologie, 128 est un total qui nous est parvenu aussi par l’édition, les Que sais-je ? et autres petits opus à lire vite ou à déguster. 128 « micro-nouvelles », sous forme d’une lettre qui veut aller plus loin que la démonstration scientifique. Comme tous les pédagogues, tu aimes les commentaires, les digressions pour « ébranler » l’esprit du lecteur. Pour « faire penser, plutôt que penser » mais en reprenant – bien dans ton style – ce que tu ne voudrais pas qu’on prenne à l’absolu : « penser quand même un peu, mais sans édifier ». Là, Pierre, tu sais bien que ce n’est pas tout à fait ça : car tu veux séduire et, bien sûr, rattraper ce qui t’a peut-être le plus manqué dans ta vie professionnelle : les étudiants. Que de cohortes d’apprentis géographes aurais-tu séduits, fouaillant dans leurs certitudes, là où ça fait mal. « Pour que ça avance » aimais-tu nous dire.

Tu étais géographe parce que la géographie devait rassembler pour toi, peut-être du fait de tes multiples vies du Maroc à Paris, en passant par presque tous les pays d’Asie orientale et du Moyen-Orient, l’ensemble des questions que tu te posais. Qui d’ailleurs t’a donné ces lunettes-là pour lire le Monde ? Qu’importe ! « Tout est géographiable » disais-tu, « du Japon à mon immeuble, de l’odeur au circuit imprimé. » Tu l’as montré 128 fois et avec quel talent ! Tu étais au meilleur de cette « forme », tu as laissé aller, comme tu le souhaitais.

Terriblement perspicace jusqu’au dernier instant de ta vie, tu avais deviné qu’on changeait d’époque. Tu es le premier à te lancer dans une nouvelle collection de DVD sur les grandes villes du monde. Tu sentais que faire de la géographie imposait de changer d’outil, d’utiliser tous les ressorts de ce qui arrivait avec la révolution numérique. Combien de fois nous sommes-nous « frités » sur le fameux terrain. C’était presque de l’ordre de la croyance pour toi, cette « vérité du terrain » dont, soudainement tu te méfiais car la vérité était pour toi une trop grosse chose pour appartenir au terrain. Mais qu’une « nouvelle carte du monde » soit en train de s’écrire sous nos yeux, tu en tâtais tous les signes dans les médias qui te faisaient bouillonner le sang !

Cette touche personnelle, ces « fragments du monde, par toi entrevus ou connus, d’où le « je » est parfois inévitable », c’est ta « touche » : ce parfum de révolte, ce grondement du cœur et de l’esprit qui fouaillent la matière de l’espace pour en faire surgir une idée qui peut changer le monde.

Voici ce qu’écrit ton ami Jean-Dominique Merchet de Libé, qui partageait avec toi l’amour des morilles au vin jaune : « Pierre était un homme joyeux, la parfaite antithèse de l’austérité universitaire. Il pouvait faire rouler sous la table ses commensaux lorsqu’il racontait ses aventures féminines à l’Université de Pékin. Homme de gauche, mais sans chapelle, Pierre Gentelle gardait de sa longue scolarité au Prytanée une image contrastée des militaires : un vieux fond d’antimilitarisme mâtiné d’un intérêt pour ce monde dont il s’était éloigné mais sur lequel il ne manquait pas de m’interroger[[http://secretdefense.blogs.liberation.fr/defense/2010/10/]]. »

Et voici d’autres fleurs qui fleurissent en cet automne, car ta vie n’a pas de saisons, elles viennent de Marc, notre premier webmestre au Café : « Pierre était devenu un acteur des cafés déployant deux facettes qui rendait chacune de ses présences magnétiques : celle du conteur et celle du charmeur. Il n’y en a pas deux comme Pierre pour placer l’assistance dans le loess de la Chine des canaux, dans le chaos épique de la société afghane, ou dans le charme ubuesque d’un village du Henan. Pierre savait instinctivement tout ce qui peut faire l’attrait et l’animation d’un café et au delà, rendre la géographie séduisante. »

Pierre, tes lettres de Cassandre sont des cadeaux sublimes que nous allons lire et relire. On va déjà relire ce que tu écrivais au retour du festival de Saint-Dié où tu houspilles tout le monde et prend congé de nous par une pirouette. Comme ce matin du 4 octobre 2010 où tu es descendu, rue de Turin, goûter au frais d’une dernière baguette de pain avant ton petit café et entamer ta nouvelle vie. Pierre, merci !

Gilles Fumey

Un mot aussi du Réseau Asie

Pour les cent premières Lettres de Cassandre

Géographie de mille hectares. À quoi pouvait servir la géographie en 1937 ?

geographie_mille_hectares

« C’est peu, un carré de 3 cm découpé dans les fils bleus, les traits rouges et les piquetés verts de la carte au 1/100000°. En ce cadre étroit, je ferai tenir toute la France. » (M. Bedel, p. 12)

La vignette, sans doute une xylographie, présente un croquis marron et blanc et un cartouche brun rouge qui l’encadre. Celui-ci symbolise les productions agricoles et l’abondance rurale traditionnelles : arçon de vigne (ou « vignette »), épis et botte de blé, le vin et le pain. Le croquis, lui, fait question par la maladresse du piqueté des vignes, de la houle des blés, des arbres épars, des filets d’eau et surtout des routes démesurées et plaquées sur le paysage et plus encore sur le village. Et comme ce croquis fait justement 3 cm² sur la couverture originale, il n’est sans doute pas l’œuvre d’un professionnel de l’édition, mais de l’auteur lui-même qui, à plusieurs reprises, se qualifie ainsi : « Je suis un géographe, je me présente ici comme tel, et c’est de géographie que je traite en ces pages » (p. 25).

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Le Lugdunum et le patrimoine culinaire antique
En ce mois de septembre et de journées du patrimoine, en Comminges, nous voici rendus. Au pied des Pyrénées, Le Lugdunum, restaurant de gastronomie de la Rome antique, nous a ouvert ses portes. Halte bienvenue entre deux visites aux monuments classés au patrimoine mondial de l’Unesco, que sont la cathédrale Sainte-Marie et la basilique Saint-Just, dressées dans un face à face audacieux dans la vallée de la haute Garonne.

En Comminges, sous la protection de Saint Bertrand et de Saint-Just

En septembre, sur le piémont pyrénéen, c’est encore l’été. Construite sur un piton rocheux, face à la barrière montagneuse des Pyrénées, la capitale, Saint Bertrand de Comminges, s’élève à plus de 500 mètres d’altitude et domine le bassin de la Garonne, torrent encore impétueux.

Une longue histoire de Celtes et de Romains a modelé la région. Carrefour naturel de voies terrestres et fluviales, entre Méditerranée et Atlantique, le pays était peuplé de Celtes, les Convènes, avant d’être romanisé. La tradition voudrait que Pompée ait fondé, au Ier s av J.C. Lugdunum Convenarum, qui prospéra jusqu’au règne d’Auguste ainsi que l’attestent les vestiges antiques : temples, thermes, théâtre, basilique.

Au XI è siècle, sur les décombres de la cité, rasée par les Wisigoths, le futur Saint Bertrand fait bâtir la cathédrale. Il est évêque du Comminges et petit-fils du comte de Toulouse Guillaume Taillefer. Son œuvre est poursuivie par un autre Bertrand devenu, sous le nom de Clément V, le premier pape d’Avignon. La cathédrale Sainte-Marie fut ensuite agrandie pour faire face à l’afflux des pèlerins qui se rendaient à Saint Jacques de Compostelle. Cet édifice mi-roman, mi-gothique a gardé un cloître admirable ainsi qu’un chœur constitué de stalles en boiseries Renaissance, mélange d’art toulousain et toscan. Le clocher-tour, domine les alentours et rappelle qu’il jouait aussi un rôle donjon.

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