Dans ma salle de classe, quelle géographie !

Dans ma salle de classe, quelle géographie !

Représenter l’espace de la classe

Dossier proposé à l’occasion de l’exposition Change ta classe ! (14 février / 18 mars 2013, Cité de l’architecture & du Patrimoine, Paris) qui présente les travaux de neuf classes marocaines, tunisiennes et béninoises « dont l’objectif est d’une part de transformer la classe en espace de création et d’autre part de sortir de la typologie des lieux scolaires en proposant un réel espace de qualité : pour la lecture, l’écriture, les arts plastiques… ».

En 1936, Pierre George signe un article sur « Les premiers éléments de la géographie par l’expérience »[1] dans le tout premier numéro de L’Information géographique : le ton est donné pour cette revue qui publie depuis 1936 sur l’approche pédagogique de la géographie : « l’enseignement de la géographie seul nous intéresse »[2]. Pierre George consacre ainsi aux résultats proposés par Miss Sanders aux conférences d’Oxford pour « constituer dès les premières années scolaires une “expérience géographique” qui permette aux élèves d’utiliser ultérieurement, en connaissance de cause, les matériaux qui seront mis entre leurs mains, cartes, croquis, diagrammes, etc. et qui leur fournisse une réserve de points de comparaison éminemment expressifs pour eux »[3]. Appel entendu par de nombreux enseignants, dont la synergie a fait émerger de beaux manuels scolaires tels que le Géographie à vivre[4] pour le CM2. En tout premier lieu de cette « expérience géographique » comme préparation à l’enseignement de notre discipline : la salle de classe. Référent spatial pour les élèves, la salle de classe n’a depuis pas démérité, et entre par la grande porte dans les programmes scolaires !« Les salles de classe comptent parmi les rares locaux dont chacun d’entre nous a une expérience personnelle, et leur arrangement peut sembler d’une évidence si familière qu’on serait tenté de le croire universel et intemporel »[5]. L’espace de l’élève participe de la compréhension du rôle et du fonctionnement de la géographie comme discipline scolaire. Mais, derrière la porte, quelle(s) géographie(s) pour et dans la salle de classe ?

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Remonter une rivière (1/3) : le Faou de Philippe Le Guillou

L’intimité de la rivière de Philippe Le Guillou, petit livre paru en 2011, file la métaphore de la remontée d’une rivière (modeste) pour évoquer la plénitude de l’enfance, la superposition des souvenirs et la naissance d’une vocation d’écrivain tandis qu’une imprégnation paysagère constante sous-tend une véritable initiation géographique.

Avec L’intimité de la rivière, Philippe Le Guillou se réapproprie les lieux de son enfance bretonne à travers une promenade-rêverie qui célèbre les sortilèges d’un territoire-monde propice à l’enchantement. Ce court récit – moins de cent  pages – reprend le thème d’un roman précédent, Les marées du Faou, écrit dix ans auparavant, qui lui aussi met en scène un narrateur arrivé à l’âge de maturité et revisitant les lieux de son enfance. L’intimité de la rivière apparaît comme un écho de ce roman, plus intime, ayant perdu toute visée sociologique, pour se consacrer uniquement à l’écrivain-promeneur immergé dans la nature qui a éveillé sa vocation d’écriture. Cette réplique épurée correspond sans doute à la nécessité irrépressible d’un retour aux sources, d’une plongée dans l’environnement spatio-temporel fondateur d’une existence. Profondément inscrit dans l’espace, ce récit relève d’un véritable exercice d’ « autobio-géographie » pour reprendre le mot de Michel Collot.

Le village du Faou au fond de la ria avec son église et son pont

Le village du Faou au fond de la ria avec son église et son pont

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Habebamus papam

Habebamus papam 1

11 février 2013, le pape Benoît XVI annonce qu’il va rendre son tablier. L’âge l’a rattrapé. Il range au placard mitre de Pie IX, chasubles brodées de poissons et férule pontificale. L’événement est rare mais des précédents existent. Il l’a annoncé dans un discours en latin. Mais curieusement, son compte twitter n’annonçait toujours pas la nouvelle à 16h alors que les sites d’informations en ligne consacraient une bonne partie de leur page d’accueil à son départ. Ne reste plus qu’à trouver un remplaçant pour Pâques à chacun sa quête, un pape pour l’Eglise catholique, les œufs pour les enfants.

Mais qui pour remplacer le pape ? De quelle nationalité ? De quel continent ? Libération se faisait l’écho des favoris des bookmakers pour emporter la mise : le cardinal ghanéen Peter Turkson, le cardinal italien Angelo Scola, le Canadien Marc Ouellet, puis un Autrichien, un Hondurien… André XXIII aurait ses chances, selon Odon Vallet, tout comme d’autres Européens. Bref, la « compétition » semble ouverte même si les « candidats » européens semblent les plus nombreux (une liste de candidats).

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Peut-on encore croire en l’Europe quand on est Grec ?

Café Géo animé par Michel SIVIGNON, Professeur émérite de géographie à l’Université de Paris-X Nanterre, spécialiste de la Grèce et des Balkans.

Ce Café Géo a eu lieu le mardi 12 février au Pré en Bulle – 9 Lices Jean Moulin, Albi à partir de 18h30.

Présentation problématique :

La Grèce et l’Europe ou comment un Grec peut-il se sentir européen aujourd’hui ?

Essayons de tenir les deux bouts du fil historique. D’un côté le mot même d’Europe, désignant un continent, est un mot grec, et l’histoire d’Europe commence par un enlèvement, et l’image d’Europe par Félix Vallotton, peintre suisse est bien séduisante. D’un autre côté, rasant les murs les représentants de « la Troïka » (Commission Européenne, Banque Centrale Européenne et FMI) qui viennent à Athènes pour la mise en œuvre des « réformes » imposées à la Grèce. Comment raccrocher ces deux images ? Passer de l’une à l’autre a-t-il un sens ?

L’appréciation portée sur « la crise grecque » procède des deux visions idéologiques totalement opposées. D’un côté ceux qui insistent sur la responsabilité de la Grèce (son personnel politique, ses gouvernements successifs, son administration d’Etat et même ses citoyens). De l’autre ceux qui voient dans la Grèce le maillon faible choisi pour porter le fer par les forces obscures de l’idéologie ultralibérale : en ce sens, la Grèce annonce simplement le sort qui attend les autres pays européens, tels le Portugal, l’Espagne, l’Italie. La liste n’est pas close.

Et le géographe là-dedans ? Doit-il se contenter d’analyser les classes sociales devant la crise ? Le désarroi des classes moyennes, le retour des pauvres à une situation qui les renvoie aux dures années de l’après guerre civile. Ou bien peut-il avec ses outils habituels dresser une géographie de la crise qui opposerait villes et campagnes, régions prospères et régions en appauvrissement rapide. Tout en sachant qu’il peut poser des hypothèses mais qu’il est trop tôt, dans une situation mouvante, pour se fondre sur des études élaborées.

La crise n’est-elle pas un révélateur des dysfonctionnements d’une société ?
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Les frontières entre ouverture et fermeture : peut-on souhaiter la disparition des frontières ?

Le 1er février 2013 en soirée, l’établissement « le 9 bis » a accueilli le premier Café géographique stéphanois. Cette manifestation marquait la fin d’une journée d’étude dédiée à la géographie des frontières1, et invitait à une réflexion au-delà des salles de conférences et des rassemblements organisés, autour de la question suivante : peut-on souhaiter la disparition des frontières ? Animé par François Arnal (professeur en Lettres Supérieures au Lycée Claude Fauriel), ce café géo clôture un débat plus vaste consacré à la géographie et à la géopolitique des frontières : « Les frontières et les espaces frontaliers : objet d’étude géographique et géopolitique ».

CafesGeo_StEtienne_Frontieres1

Si de nombreux sujets ont été abordés pendant la journée2, François Arnal a proposé aux intervenants de poursuivre le débat dans une salle comble. Les débats entre les intervenants et le public, mais aussi entre les intervenants eux-mêmes ont permis de montrer des divergences d’opinion. Comme l’a énoncé plus tôt dans la journée Philippe Rekacewicz, « on peut tous aller voir une frontière, mais on n’y voit pas la même chose ». François Arnal rappelle que si les avis divergent, c’est parce que la définition même de frontière est ambiguë, et que certains espaces de conflit sont sujets à certaines tensions, autour du tracé, du statut et de la matérialisation des frontières. Tout cela complique la vision extérieure que nous portons sur les frontières. Les notions de limites, de territoires, de conflits mais aussi de gestion, d’échanges et de relations humaines sont à prendre en compte pour (re)penser les frontières et les espaces frontaliers. Cet objet géographique « classique » est au cœur de très nombreuses publications ces dernières années, tant la question est d’une actualité brûlante. C’est pourquoi, pour ce café géo, François Arnal a invité trois intervenants aux parcours différents, qui tous abordent la frontière par ses dimensions spatiales, mais en ont, par leur métier, une approche différente : Philippe Rekacewicz (cartographe au Monde diplomatique, animateur du blog Visions cartographiques), Bénédicte Tratnjek (géographe, IRSEM, animatrice du blog Géographie de la ville en guerre) et Luisa Pace (journaliste, spécialiste de géopolitique).

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Obscurs réseaux

Obscurs réseaux (Zero Dark Thirty, Katherin Bigelow, 2013, USA)

zdtAvec Mensonges d’État, Ridley Scott décrivait avec brio, en 2008, une spectaculaire mise en réseau du Monde : téléphones mobiles, connexions internet, satellites et autres drones y permettaient l’ubiquité, quoique parfois illusoire, d’agents de renseignement de moins en moins présents physiquement sur le terrain. Kathryn Bigelow, quiretrace dans son dernier film la traque d’Oussama Ben Laden par la CIA, reprend l’idée et systématise le propos. C’est dans la profusion de lignes et de tubes, que la réalisatrice se plaît à filmer dans un beau travelling sur d’innombrables fils reliant à un central téléphonique au son d’innombrables voix se répondant à des milliers de kilomètres, que réside l’intérêt majeur de ce Zero Dark Thirty par ailleurs bien difficile à défendre.

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Marseille-Provence 2013, capitale européenne de la culture

Café-géo de Montpellier du mardi 29 janvier 2013

Boris Grésillon (professeur de géographie à l’université d’Aix-Marseille, responsable de l’équipe « Villes, culture et grands projets » au sein du laboratoire Telemme), auteur du livre paru en 2011 Un enjeu « capitale » : Marseille-Provence 2013, Paris, Editions de l’Aube,171p.,

Clotilde Berrou (Architecte DENSAIS, Urbaniste, Mention au Prix Tony Garnier d’Urbanisme 2003 de l’académie d’Architecture, chef de projet ARM Architecture).

L’élection de Marseille comme capitale européenne de la culture a donné lieu à la création de projets audacieux, originaux et quelques fois assez fous dans tout le département des Bouches-du-Rhône, mais c’est un territoire complexe, donc difficile à fédérer. 600 évènements au total : des expositions, la construction de nouveaux musées, mais également des projets décalés comme la conception d’un « GR 2013 » qui ferait découvrir aux touristes toutes les zones de Marseille qu’ils n’auraient jamais visitées comme les quartiers « sensibles », l’aéroport ou les usines de la ville. La réputation de Marseille est aujourd’hui acquise à travers l’image qu’elle véhicule. Boris Grésillon parle de « marketing urbain et culturel » de Marseille : l’attractivité de la ville et le potentiel succès de cette opération ne peuvent s’effectuer sans l’intermédiaire des médias. Le projet Marseille-Provence 2013 peut être abordé sous l’aspect spécifique de la géographie sociale : on peut se rendre compte de nombreux dysfonctionnements qui amènent à leur tour des questions et des problèmes liés à la ségrégation sociale, à la gestion politique, ou encore aux conflits d’intérêts grandissants.

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Repas péruvien

Association Café Géo de Paris
Repas péruvien du 21 janvier 2013
Commenté par Anaïs Marshall.
Repas à Candela Caliente, bon petit restaurant péruvien au 150 boulevard Voltaire à  Paris 11ème.

Le Pérou et sa cuisine sont présentés par Anaïs Marshall maître de conférences de géographie à Paris 13, qui a vécu plus de deux ans au Pérou pour la préparation de sa thèse sur les dynamiques agraires de la côte.

Rapide rappel de quelques données : 1 285 000 km2 (deux fois et demie la France) et presque 30 millions d’habitants (2011) en accroissement rapide, dont 8 millions à Lima. Le pays se divise en trois ensembles : la côte, une bande aride quasi désertique, les Andes qui montent jusqu’à 6 950m d’altitude et l’Amazonie qui couvre la moitié du pays.

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Maîtresse, pourquoi on fait de la géographie ?

Ici le temps s’est arrêté.

Face au beffroi du vieux Lille, l’ancienne bonneterie dresse encore fièrement sa façade XIXème sur laquelle un sein rose s’est égaré. A l’intérieur, les bibelots côtoient les mannequins de plastique, les vieux bouquins et les tringles des cabines d’essayage. Un lieu pétri de charme tout à fait propice pour refaire le monde et ça tombe bien car c’est précisément cet endroit qu’a choisi Xavier Leroux, docteur en géographie et professeur des écoles, pour tenir son café géo sur un thème non encore exploré, celui de l’école primaire : alors « Maîtresse, pourquoi on fait de la géographie » ?

Après une présentation rapide des cafés géo (dont le public lillois n’est pas familier) et de leur 15ème anniversaire, l’animation s’engage autour de la question des manuels, supports particulièrement « prisés » en raison de la faiblesse actuelle de la formation, tant initiale que continue, et du côté peu explicite des programmes. Trois photographies tirées d’un manuel de cycle 3 sont présentées à l’assistance qui doit essayer de deviner à quelle thématique du programme elles se rapportent. La première présente un plan large d’un paysage de montagne, la seconde un cours d’eau, la troisième deux motards de la douane en action. Ce petit jeu, d’apparence assez futile, semble plus difficile qu’il n’y paraît car personne n’est capable d’identifier ici trois supports documentaires proposés pour traiter de la question des….frontières.

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Transports, frontières : quelles mobilités en Afrique de l’Ouest ?

Café Géo animé par Olivier NINOT, ingénieur au CNRS et rattaché à PRODIG (Pôle de Recherche pour l’Organisation et la Diffusion de l’Information Géographique), et par Jérôme LOMBARD, Chargé de recherche de 1e classe à PRODIG.

Ce Café Géo aura lieu le mardi 15 janvier au Pré en Bulle – 9 Lices Jean Moulin, Albi à partir de 18h30.

Présentation problématique :

En route !
À bord des trains, des camions ou des bus, … ce que les transports et les circulations révèlent des transformations des sociétés et des territoires en Afrique de l’Ouest.

Au cours des cinquante dernières années, les transports ont connu, en Afrique de l’ouest comme sur l’ensemble du continent, des évolutions remarquables, visibles dans les paysages, perceptibles dans la vie quotidienne, inscrite dans les économies. En se transformant, les systèmes de transport ont suivi et répondu à des besoins de mobilité croissants et diversifiés : en ville, entre villes et campagnes, d’une région à l’autre et de plus en plus aussi d’un pays à l’autre. Les circulations des personnes s’intensifient et l’augmentation de la consommation, portée notamment par la croissance urbaine, accélère les trafics de marchandises.

Des évolutions conjointes des transports et des circulations ressortent quelques grandes tendances qui se présentent aussi comme des défis à relever pour le sous-continent : des relations plus complexes et plus ambiguës entre transports, territoires et développement ; la multiplication de solutions alternatives aux transports collectifs en ville ; des différenciations croissantes entre circulations des « riches » et circulations des « pauvres ». À partir de quelques exemples pris dans différents pays ouest africains, il s’agira d’illustrer et de discuter de ces grandes tendances et des défis qui leur sont associés.

(Première publication le 15 janvier 2013, à l’url http://www.cafe-geo.net/article.php3?id_article=2556)

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